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Un employé d’une start-up marocaine pilote un drone équipé de liquide désinfectant, dans une rue de Harhoura près de Rabat, la capitale marocaine, le 23 avril. |
"Il y a un vrai engouement : en quelques semaines, la demande a triplé au Maroc et dans d'autres pays de la région", souligne Yassine Qamous, le directeur de "Droneway Maroc", qui distribue sur le continent africain les produits du leader mondial chinois DJI. Selon lui, le Maroc, qui utilise des drones depuis plusieurs années déjà, "figure parmi les pays les plus avancés du continent" dans ce domaine avec un tissu industriel dédié, un réseau de chercheurs mais aussi de pilotes agréés.
Des autorisations administratives restrictives ont longtemps limité les drones civils à quelques usages spécifiques, comme les tournages de cinéma, le traitement des surfaces agricoles, la surveillance des panneaux solaires ou les relevés cartographiques. Mais tout a changé avec l'apparition de la pandémie de COVID-19 : ces dernières semaines, les robots volants sont apparus dans plusieurs villes, où les autorités les utilisent pour diffuser des messages d'alerte, détecter des mouvements suspects dans les rues ou débusquer des rassemblements illégaux sur les terrasses.
Les consignes strictes de confinement instaurées mi-mars ne sont en effet pas toujours respectées, la presse locale évoquant notamment des fêtes nocturnes entre voisins ou des prières collectives sur les toits, hors de portée des patrouilles de contrôle.
"Technologie vitale"
La préfecture de Temara, près de Rabat, a ainsi lancé la semaine dernière un système de surveillance aérienne de haute précision développé par des ingénieurs d'un groupe local, Beti3D, jusque-là spécialisé dans la topographie. D'autres pays ont aussi adopté les technologies déployées en Chine au début de la pandémie pour surveiller les mouvements des citoyens, désinfecter les espaces publics ou développer les livraisons.
"Les drones ont rapidement émergé comme une technologie vitale pour les agences de sécurité publique (...) puisqu'ils permettent de contrôler en toute sécurité les espaces publics", analyse le site de DJI, groupe chinois qui couvre à lui seul 80% du marché mondial. Si le Maroc utilise avant tout des engins importés de Chine, l'apparition de nouveaux besoins liés à la pandémie pousse au développement d'une production locale.
"Il y a une vraie demande", se réjouit Abderrahmane Krioual, le patron de Farasha, une start-up qui vient de lever des fonds pour développer à Rabat une ligne de production de drones de surveillance thermique et de pulvérisation de désinfectant. En pointe dans le secteur, le département aéronautique de l'Université internationale de Rabat (UIR) a mis à disposition des pouvoirs publics son savoir-faire fin mars pour le déploiement de drones équipés de haut-parleurs ou de caméras infrarouge capables de détecter les mouvements nocturnes ou les températures des foules.
Des piétons passent près d'un drone équipé de liquide désinfectant, exploité par une start-up marocaine, survolant une rue de Harhoura près de Rabat, le 23 avril. |
"Quelques projets sont en cours avant généralisation dans tout le pays", explique Mohsine Bouya, directeur "Valorisation et transfert" à l'UIR. Les autorités marocaines ne souhaitant pas communiquer sur le sujet, il n'a pas été possible d'avoir une cartographie précise des drones déployés depuis l'instauration de l'état d'urgence sanitaire mi-mars.
"Cadres légaux"
Contrairement à d'autres pays, le recours aux drones de surveillance ne suscite pas de débat au Maroc, où la stratégie musclée du pouvoir face à la pandémie suscite une forte adhésion, selon des indicateurs officiels. Le royaume a très vite fermé ses frontières et massivement déployé les forces de l'ordre pour faire respecter les mesures strictes de confinement ou de port obligatoire du masque, renforcées depuis le début du ramadan par un couvre-feu nocturne.
Le non respect de ces consignes est passible d'un à trois mois de prison et/ou d'une amende équivalent à 115 euros. Plus de 59.000 contrevenants ont été présentés en justice pour "violation de l'état d'urgence sanitaire", selon le dernier bilan officiel. D'après les autorités, ces mesures drastiques ont permis de limiter la contagion, avec 5.382 cas dont 182 décès depuis l'instauration de l'état d'urgence sanitaire.
Mais le nombre élevé d'interpellations (85.000 au 30 avril) a poussé la semaine dernière une responsable opérationnelle des Nations unies à citer le Maroc parmi les pays où les mesures exceptionnelles génèrent une "culture de lockdown toxique" pour les droits humains. Rabat a rejeté cette remarque en affirmant avoir pris des mesures "en phase avec des cadres légaux respectant pleinement les droits de l'Homme".
AFP/VNA/CVN