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| Des personnes font la queue dans une station-service pour ravitailler leurs véhicules en carburant à Bamako, la capitale du Mali, le 29 octobre 2025. |
| Photo : Xinhua/VNA/CVN |
Voitures et motos encombrent les artères principales. Des conducteurs épuisés somnolent au volant ou abandonnent leur véhicule pour conserver leur place dans la file. Des bidons et bouteilles vides jonchent le bord de la route, tandis que l'air est mêlé d'effluves d'essence et de poussière.
"La station est à sec depuis trois jours", confie un employé de Petro Mientao, station-service privée située près du pont Roi Fahd à Bamako. "Nous essayons de maintenir l'ordre, mais c'est difficile de voir les gens attendre sans espoir."
Le motocycliste Samba Diallo explique à Xinhua qu'il est dans la file depuis les premières heures de la veille, sans constater la moindre amélioration. "Ces temps-ci, nous comptons sur le bouche-à-oreille pour savoir quelle station pourrait recevoir du carburant", dit-il. "Certaines publient des messages sur les réseaux sociaux pour prévenir les clients dès l'arrivée de nouvelles livraisons."
Depuis près d'un mois, le pays ouest-africain est frappé par une grave pénurie de carburant. Essence et gasoil se font rares sur l'ensemble du territoire, perturbant les transports, ralentissant les activités économiques et compliquant la vie quotidienne.
À Bamako et dans les environs, la vente de carburant est désormais rationnée : chaque véhicule est limité à 10.000 francs CFA (environ 17,75 dollars) par jour. Alors que le prix officiel du gasoil est de 750 francs CFA le litre, celui du marché noir a flambé à plusieurs fois ce montant.
Selon des observateurs, la pénurie est étroitement liée à la situation sécuritaire précaire du pays.
Depuis septembre, le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM/JNIM) a multiplié les embuscades contre les convois de carburant sur les principales routes reliant Bamako au Sénégal et à la Côte d'Ivoire. Ces attaques visent à affaiblir le gouvernement et à perturber les échanges régionaux en s'attaquant aux artères économiques vitales. D'après les autorités sécuritaires maliennes, des dizaines de camions-citernes ont été détruits lors de ces assauts.
La crise du carburant se répercute désormais sur tous les secteurs. La société nationale d'électricité a averti que le manque de carburant réduisait fortement le fonctionnement des centrales thermiques. Dans certaines zones, la fourniture quotidienne d'électricité est passée de 19 heures à seulement 6.
Cette instabilité énergétique a contraint de nombreuses usines et bureaux à réduire ou suspendre leurs activités.
À l'Hôpital du Mali, la fréquentation a chuté, nombre de patients ne pouvant plus payer le transport. Le service d'ophtalmologie, qui recevait habituellement une trentaine de patients par jour, n'en accueille plus qu'une vingtaine. Sur quatre opérations oculaires programmées, seules deux ont pu être menées dans les délais.
Le gouvernement a récemment ordonné la fermeture nationale des écoles du 27 octobre au 9 novembre, mesure qui pourrait être prolongée.
La rareté du carburant a aussi provoqué une hausse du coût de la vie.
Au marché de Lafiabougou, à Bamako, Kadiatou, jeune ménagère, explique que le prix de l'huile de cuisson a augmenté de près d'un tiers en une semaine, tandis que ceux des oignons et des tomates ont doublé.
"Même le transport pour venir au marché coûte plus cher. La vie devient de plus en plus difficile", dit-elle. Les commerçants confient à Xinhua que les frais de transport ont doublé, voire triplé, les obligeant à retarder le réapprovisionnement de leurs marchandises.
Face à la crise, le gouvernement malien a lancé un "Plan d'urgence de réponse à la pénurie de carburant", incluant l'escorte militaire des convois, la création de réserves stratégiques, la simplification des procédures d'importation, des allègements fiscaux pour les entreprises énergétiques, ainsi qu'une distribution prioritaire de carburant aux hôpitaux, aux véhicules d'urgence et aux transports publics.
Les forces armées maliennes ont intensifié leurs opérations de sécurisation des axes routiers et ont repoussé le 26 octobre une attaque contre un convoi de carburant dans la région de Bougouni (Sud), neutralisant plusieurs assaillants et saisissant des armes.
Environ 200 camions-citernes escortés par l'armée sont arrivés à Bamako entre les 26 et 27 octobre, un événement perçu par de nombreux habitants comme "un signe d'espoir".
Les analystes soulignent que cette crise met en évidence la forte dépendance du Mali vis-à-vis des importations de carburant et sa vulnérabilité face à l'insécurité.
Cependant, les récentes mesures, escortes de convois, allocations d'urgence et renforcement de la coopération régionale, commencent à atténuer la pénurie dans la capitale et les principales villes. Avec la sécurisation des axes stratégiques et l'arrivée de nouvelles livraisons, les premiers signes de stabilisation apparaissent.
Depuis le coup d'État militaire de mars 2012, le Mali est confronté à une instabilité persistante et à une insurrection armée. Bien qu'un accord de paix et de réconciliation ait été signé en 2015 avec certains groupes du Nord, la violence s'est poursuivie et étendue vers le centre et le sud du pays ces dernières années.
Xinhua/VNA/CVN



