La littérature vietnamienne et l’influence française

Pendant la colonisation française au Vietnam, la société, l’économie, l’art et la littérature de notre pays ont subi beaucoup de changements. Mais ce sont les impacts sur le domaine littéraire qui sont les plus notables.

Le Collège des interprètes à Hanoï en 1920.

La littérature vietnamienne, en particulier au début du XIXe siècle, possède des textes et poèmes très connus au niveau national et international, composés par de grands hommes comme Nguyên Du ou des poétesses célèbres comme Hô Xuân Huong, Bà Huyên Thanh Quan… Sous cette ère, la littérature traditionnelle prospère dans les deux genres : prose et poésie. Mais quand la colonisation française est arrivée au Vietnam, notre littérature a été fortement influencée par la leur au travers d’œuvres traduites en caractères chinois d’auteurs tels que Montesquieu, Diderot et J.J Rousseau, notamment.

Naissance du quôc ngu

Longtemps auparavant, Alexandre de Rhodes avait mis au point la première transcription phonétique et romanisée de la langue vietnamienne, le quôc ngu, ce qui a facilité l’accès à la culture française. La construction d’écoles fran-çaises comme le Collège des interprètes en 1864 à Saïgon (Hô Chi Minh-Ville actuellement) et en 1905 à Hanoï, ou encore le Lycée du Protectorat en 1908 à Hanoï, a également entraîné une augmentation du nombre de locuteurs français au Vietnam. L’influence du style littéraire français devenait de plus en plus évidente.

La littérature est devenue plus moderne avec notamment le détachement progressif du style littéraire chinois ainsi que la naissance du journalisme moderne et de la prose. Il y a certains écrivains, poètes et auteurs-traducteurs qui ont cependant appréhendé les pensées et le style d’écriture français, vis-à-vis notamment de l’accueil des œuvres françaises aux lecteurs vietnamiens. On peut citer Nguyên Van Vinh qui a traduit en vietnamien Les fables de La Fontaine, Les contes de Charles Perrault, Les Trois Mousquetaires d’Alexandre Dumas, Les Misérables de Victor Hugo...

Sous l’influence de la littérature française, il y avait deux parties : publique et non publique. L’une était légale, l’autre était illégale sous le règne du gouvernement colonial. Les œuvres appartenant à la sphère publique avaient deux tendances notables : le romantisme et le réalisme. Le style romantique représente le lyrisme de l’homme rempli d’émotions, de passions et de rêves. Son thème est souvent l’amour, la nature et la religion. Des écrivains tels que Thach Lam et Khai Hung se sont inspirés du romantisme dans la littérature française pour écrire leurs romans, en particulier le style de Lamartine.

Du côté de la poésie, l’exemple le plus marquant est Xuân Diêu, surnommé "Le roi de la poésie vietnamienne". La tendance littéraire du réalisme reflète la vie réelle avec les problèmes de la société en ce temps-là à travers le quotidien des paysans et des Vietnamiens en général. Un des auteurs remarquables de cette tendance est Nam Cao avec ses œuvres illustrant sincèrement et amèrement la souffrance des paysans vietnamiens dans les années 1930 et 1940.

De gauche à droite : le traducteur Nguyên Văn Vinh, l’écrivain Thach Lam et le poète Xuân Diêu.

À propos de la partie non publique, il s’agit d’œuvres qui soutiennent la révolution vietnamienne. Ayant pour thèmes anticoloniaux, elles représentent l’espoir de l’indépendance et le patriotisme du citoyen vietnamien à travers l’image des soldats de l’Oncle Hô. C’est pourquoi elles ont circulé clandestinement dans le pays. La révolution vietnamienne a influencé profondément le style littéraire de quelques écrivains, un vrai exemple de ce phénomène étant Tô Huu, "le poète de la révolution", "le poète du peuple".

Grand impact du style français

Après la Révolution d’Août 1945, la littérature vietnamienne s’est également vue influencée par des cultures venant d’autres pays, mais le style littéraire français reste celui qui a eu le plus grand impact sur les œuvres vietnamiennes. Après la réunification du Vietnam en 1975, la France ainsi que d’autres pays dans le monde ont parrainé souvent les frais d’impression d’ouvrages culturels et littéraires de leur pays au service des lecteurs vietnamiens. Le parrainage de la France est constant et systématique, à travers notamment le soutien du Service culturel et de coopération de l’ambassade de France au Vietnam. Ainsi, chaque année, nos maisons d’édition traduisent et impriment de nombreux livres célèbres ayant reçu le prix Goncourt (L’amant - 1984 de Marguerite Duras, Les noces barbares - 1985 de Yann Queffélec, Valet de nuit - 1986 de Michel Host).

Il y a aussi des bandes dessinées françaises mondialement connues au cours de la dernière décennie qui ont été traduites pour les lecteurs vietnamiens. La plus notable étant Astérix le Gaulois réalisée par le scénariste français René Goscinny et le dessinateur français Albert Uderzo.

 
Thuy Phong/CVN

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