Le président français Nicolas Sarkozy donnera le coup d'envoi des ultimes négociations, en recevant le 22 juin au soir ces 20 ministres de l'Agriculture avant un dîner de travail. Il devrait à cette occasion plaider une nouvelle fois en faveur d'une régulation plus étroite des marchés de matières premières.
La semaine dernière à Bruxelles, M. Sarkozy s'en est pris à la "financiarisation" des marchés qui permet d'échanger jusqu'à "46 fois la production annuelle mondiale de blé" ou "24 fois celle du maïs".
Pour Paris, la situation est d'autant plus urgente que la question de la sécurité alimentaire après les émeutes de la faim de 2007 et 2008 est loin d'être réglée.
Ces derniers mois, les cours des céréales se sont encore envolés sur les marchés mondiaux. Quelque 900 millions d'individus souffrent aujourd'hui de malnutrition. En 2050, il faudra nourrir deux milliards d'habitants de plus.
Dans la dernière ligne droite des négociations, le ministre français de l'Agriculture, Bruno Le Maire, reconnaît qu'un accord "sera difficile à arracher". Mais il affirme qu'il ne cèdera pas pour autant sur les "orientations cardinales" de la présidence française comme la régulation des marchés pour emporter un accord.
"Ce sera fumée blanche ou fumée noire. Il n'y aura pas de demi-mesures", assure-t-il. "Ce texte doit être de substance, marquer un premier progrès vers une gouvernance agricole mondiale (...) sinon il n'y aura rien".
Pour y parvenir, la France a pris soin d'écarter les sujets les plus polémiques, au grand dam de certaines organisations non gouvernementales.
C'est le cas notamment des biocarburants souvent accusés d'être "l'un des principaux facteurs de la hausse des prix" des produits agricoles.
Sur ce point "le sujet n'est pas mûr", a fait valoir M. Le Maire qui n'a pas voulu "multiplier les sujets d'affrontement".
La France propose un plan d'actions, fondé sur cinq "piliers" : réinvestir dans l'agriculture mondiale pour "produire plus et mieux", accroître la transparence des marchés, améliorer la coordination internationale pour prévenir et gérer les crises et réguler les marchés de dérivés de matières premières agricoles.
M. Le Maire dit avoir mesuré combien les positions des pays du G20 sur le futur de l'agriculture sont "divergentes" voire "antagonistes".
Il a fallu rassurer le Brésil et l'Argentine, opposés à un contrôle des prix, la Chine et l'Inde, peu désireux de communiquer l'état de leurs stocks de produits agricoles ou encore les États-Unis qui ne souhaitent pas la constitution de stocks de réserve, susceptibles de perturber le marché.
Une mesure concrète sera proposée, la création d'une base de données (AMIS, Agricultural Market Information System) pour disposer d'une photographie de la situation mondiale des matières premières agricoles (blé, maïs, riz et soja).
Cet outil sera placé sous l'autorité de la FAO (l'Organisation des Nations unies pour l'Agriculture et l'Alimentation) et outre les États, les géants privés du secteur du négoce (Cargill, Dreyfus,...) devraient y participer.