Comme elle, une cinquantaine d’autres dessinateurs, programmeurs, scénaristes ou animateurs, pratiquement tous âgés d’une vingtaine d’années, travaillent dans ce studio de développement situé à Akademgorodok, une cité universitaire en banlieue de Novossibirsk, la troisième ville de Russie.
Bien loin des studios clinquants de Californie ou d’Europe, Alawar Entertainment a pourtant réussi à percer sur la scène mondiale, avec des jeux comme «Farm Frenzy», «The treasures of Montezuma» ou encore «Robber Rabbits».
Des noms certes moins célèbres que celui du jeu vidéo Tetris, créé lui aussi en Russie par le mathématicien Alexeï Pajitnov dans les années 1980, mais qui sont téléchargés pour certains plus de 50 millions de fois sur des sites Internet tels qu’Apple Store ou Android Market.
Des employés d’Alawar Entertainment, une société russe qui vend aujourd’hui dans le monde entier, avec son travail à Akademgorodok. |
De la modélisation des tsunamis aux jeux vidéos
La success story d’Alawar a débuté vers le milieu des années 1990, se souvient Alexandre Lyskovsky, directeur général de la société qui dégage aujourd’hui un chiffre d’affaires annuel de «quelques dizaines de millions de dollars». «J’étais étudiant à Novossibirsk, et avec mes amis, nous aimions beaucoup jouer aux jeux vidéos», raconte ce petit brun de 35 ans à la barbe naissante, spécialisé à l’origine dans la modélisation des tsunamis.
Peu de Russes possédaient alors un ordinateur personnel. «En revanche, il y en avait à l’université et nous y restions tous les soirs pour jouer», poursuit-il. Jusqu’à ce qu’un de leurs professeurs leur suggère d’en faire un projet d’études : leur vocation était née. Ils parviennent ensuite à se faire financer leur premier vrai jeu pour PC par des hommes d’affaires issus de l’industrie pétrolière.
Mais en 1998, la Russie est touchée par une crise économique redoutable et doit dévaluer son rouble. Alexandre Lyskovsky et ses amis renoncent à vendre leurs jeux dans le pays, et décident de se mettre à la création de jeux vidéos sur Internet, baptisés «casual games», pour les vendre aux États-Unis et engranger des dollars, devise bien plus sûre.
Puis, la société gagne en célébrité et se lance, en plus de la création, dans l’édition et la distribution de jeux conçus par d’autres entreprises. Une société de capital-risque, Almaz Capital, décide ensuite d’y investir des fonds.
Une main d’œuvre bon marché
Aujourd’hui, Alawar Entertainement possède six studios répartis en Russie et en Ukraine, et distribue par ailleurs des centaines de jeux d’autres petites compagnies, essentiellement aux États-Unis et en Europe. Les avantages d’être en Russie ? Un enseignement de très bonne qualité, et une main d’œuvre bon marché, indique M. Lyskovsky.
«Plus nous nous éloignons de Moscou, plus les salaires deviennent normaux et on peut créer pour un montant tout à fait raisonnable des produits de bonne qualité», qui seraient beaucoup plus chers s’ils étaient créés en Europe, explique-t-il. Avec l’essor des smartphones et des tablettes numériques, le groupe espère renforcer sa position dans son propre pays et convoite de nouveaux marchés en Asie et en Amérique latine.
Selon une récente étude du cabinet de consulting J’son & Partners, le marché mondial des jeux en ligne pesait 20,2 milliards de dollars en 2011 et devrait progresser pour atteindre 26,7 milliards de dollars d’ici 2013. Pour la seule Russie, le marché devrait s’établir en 2013 à un milliard de dollars contre 668 millions en 2011, pronostique le cabinet.
AFP/VNA/CVN