En Arménie, des législatives à l'issue imprévisible

Les bureaux de vote ont ouvert en Arménie dimanche 20 juin pour des législatives anticipées périlleuses pour le Premier ministre et qui pourraient déclencher des protestations après une campagne véhémente sur fond d'une récente défaite militaire.

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Mise en place du matériel de vote dans un bureau d'Erevan, le 19 juin 2021.
Photo : AFP/VNA/CVN

L'ex-journaliste Nikol Pachinian, 46 ans, devenu en 2018 chef du gouvernement à la faveur d'une révolution pacifique contre les vieilles élites corrompues, affronte l'ex-président Robert Kotcharian, 66 ans, qui accuse son rival d'incompétence et se pose en dirigeant expérimenté. La popularité record de M. Pachinian s'est effondrée après la déroute de l'Arménie lors d'une guerre contre l'Azerbaïdjan voisin à l'automne 2020.

Après six semaines de combats ayant fait plus de 6.500 morts, Erevan a dû céder d'importants territoires qu'il contrôlait depuis un premier conflit dans les années 1990 pour le contrôle du Nagorny Karabakh, une région sécessionniste azerbaïdjanaise majoritairement peuplée d'Arméniens.

Crise politique

Perçue comme une humiliation nationale, cette défaite a déclenché une crise politique en Arménie, forçant Nikol Pachinian à convoquer des législatives anticipées dans l'espoir de faire baisser la tension et de renforcer sa légitimité.

Malgré les réformes réalisées par le Premier ministre, nombre de ses anciens partisans l'ont lâché après le conflit au Nagorny Karabakh et se sont tournés vers ses adversaires, pourtant liés aux anciennes élites accusées d'avoir pillé le pays.

Après avoir obtenu plus de 70% de suffrages aux législatives de 2018, M. Pachinian vise désormais un score de 60%. Mais le seul sondage disponible ne crédite son parti Contrat civil que de 25%, derrière la formation de M. Kotcharian avec près de 29%.

D'autres partis, parmi les 25 formations en lice, ont également des chances d'entrer au Parlement, selon ce sondage publié vendredi par l'institut MPG affilié à Gallup International.

Face au risque d'une défaite électorale ou d'un score en demi-teinte, M. Pachinian a exhorté ses compatriotes à voter pour lui donner un "mandat d'acier". "Les Arméniens voient qu'il y a des forces qui provoquent des affrontements politiques, une guerre civile", a-t-il encore lancé jeudi 17 juin.

Aux derniers jours de la campagne, les deux rivaux ont effectué une démonstration de force en réunissant chacun une vingtaine de milliers de partisans sur la place centrale d'Erevan, la capitale de ce pays pauvre et montagneux.

Des sympathisants du Premier ministre arménien Nikol Pachinian participent à son dernier rassemblement électoral, le 17 juin 2021 à Erevan.
Photo : AFP/VNA/CVN

"Le gouvernement n'est pas capable de résoudre nos problèmes actuels", a accusé vendredi 18 juin devant ses partisans M. Kotcharian, soupçonné de corruption par ses détracteurs après avoir dirigé cette ex-république soviétique de 1998 à 2008. "Nous sommes une équipe qui, contrairement à l'administration politique actuelle, a de l'expérience, des connaissances, de la force et de la volonté", a-t-il assuré, mettant en garde contre des tentatives de "voler nos voix".

"Armée forte" vs "vieilles méthodes"

Dans deux bureaux de vote d'Erevan, une dizaine d'électeurs se pressaient à la porte dès l'ouverture, selon des journalistes de l'AFP sur place. "J'ai voté pour des frontières sûres", une "armée forte" et un "renforcement des relations avec la Russie", a déclaré à l'AFP Vardan Hovhannisyan, un musicien de 41 ans. "Seul Kotcharian pourra le faire".

Anahit Sargsyan, une ex-professeure de 63 ans, a de son côté affirmé avoir voté "contre les vieilles méthodes" quand "des routes n'étaient construites que sur le papier et des fonds publics volés, contre "des gens intouchables, auxquels tout était permis". "Si Nikol s'en va, tout cela va revenir. Voilà pourquoi tout le monde doit voter pour lui", a-t-elle estimé.

La campagne électorale a montré une profonde division entre les deux principaux camps et de nombreux observateurs s'attendent à des protestations, voire des émeutes après le scrutin.

Environ 2,6 millions d'électeurs arméniens sont appelés aux urnes pour élire au moins 101 députés pour cinq ans. Ouverts à 04h00 GMT, les bureaux de vote fermeront 12 heures plus tard. Les premiers résultats sont attendus dans la nuit.

AFP/VNA/CVN

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