Le bilan s'élevait le 30 mai à 14 morts en Allemagne, après deux nouveaux décès annoncés dans l'après-midi, consécutifs à des hémorragies provoquées par la bactérie E.coli entero-hémorragique (Eceh) : une femme de moins de 50 ans en Rhénanie-du-Nord/Westphalie (Ouest) et un homme de 75 ans dans le Schleswig-Holstein (Nord), selon les autorités régionales.
L'Institut Robert Koch, chargé de la veille sanitaire, a déjà confirmé trois décès directement imputables à l'Eceh mais "au total une dizaine de personnes environ sont mortes selon les informations des Länder" (autorités régionales), a déclaré devant la presse le directeur de l'Institut, Reinhard Burger. Et "de nouveaux décès (futurs) sont probables" , a-t-il prévenu. "Il n'y a aucune raison de lever l'alerte" , a-t-il dit : 352 cas de patients infectés ayant contracté les troubles rénaux sévères, appelés syndrome hémolytique et urémique (SHU), potentiellement mortels, ont été recensés, "mais le nombre réel est probablement nettement plus élevé" .
Confrontées à la pire vague de contaminations à l'Eceh jamais observée en Allemagne et l'une des pires au monde, les autorités allemandes craignent que le pic de contamination reste à venir, en raison d'un décalage entre l'incubation et la déclaration des cas.
"Une telle propagation est du jamais vu (...) D'habitude, on enregistre environ 1.000 cas par an, mais là nous avons 1.200 cas en 10 jours" , a dit le Pr. Jan Galle, directeur de la clinique de néphrologie de Lüdenscheid (Ouest).
L'inquiétude grandit chez les consommateurs, qui boudent les étals des primeurs. Une réunion de crise s'est tenue à Berlin entre spécialistes et responsables politiques. Les ministres européens de l'Agriculture réunis à Debrecen (Hongrie) ont affiché leur inquiétude.
Dans le Nord de l'Allemagne, principal foyer d'infection, plusieurs hôpitaux saturent. "Nous avons 61 adultes hospitalisés dont 21 en soins intensifs, et 18 enfants dont 4 en soins intensifs" , a dit une porte-parole de la clinique universitaire d'Eppendorf à Hambourg (Nord). La clinique a lancé un appel urgent aux dons de sang. " Nous utilisons entre 500 et 700 poches de plasma par jour en ce moment, contre 60 en temps normal. Nous épuisons nos réserves". "Le nombre de cas nouveaux semble baisser doucement. Mais les cas d'infections les plus graves avec SHU et complications augmentent encore" , a ajouté la porte-parole.
Les soupçons se portent sur des concombres issus de cultures sous serres en Andalousie (Sud de l'Espagne). Mais une contamination le long de la chaîne de distribution n'est pas exclue. Des analyses de lots suspects sont en cours. Les résultats ne seront pas connus avant mercredi, selon l'Espagne, qui nie en bloc les accusations allemandes et entend demander "une réponse" à l'UE pour "les dommages irréparables" portés à son agriculture.
En attendant, la Belgique a interdit le 30 mai les importations de concombres espagnols. La Russie a pris la même mesure envers les légumes espagnols et allemands et prévenu qu'elle pourrait étendre cette mesure à toute l'UE.
Des cas avérés ou suspects ont été signalés en Suède, Danemark, Grande-Bretagne, Pays-Bas, Autriche, France et Suisse, mais tous venaient apparemment d'Allemagne.
La souche rare d'Eceh qui frappe l'Allemagne est "particulièrement virulente" , selon le Pr Galle. Elle s'est révélée résistante au traitement habituel par dialyse, amenant les médecins à lancer un nouveau traitement, avec un médicament de la famille des anticorps monoclonaux. Un porte-parole de la faculté de médecine de Hanovre (Nord) a fait part le 30 mai de premiers succès. Mais l'efficacité du traitement reste à confirmer.
AFP/VNA/CVN