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Un panneau de prévention des radiations, le long de la route, dans la zone d'exclusion de Tchernobyl, en Ukraine, le 22 janvier. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"Quand les gens sont partis, la nature est revenue", résume Denis Vichnevski, ingénieur en chef de la "zone d'exclusion", qui se situe dans un rayon de 30 km autour du site accidenté.
Autour de lui, un troupeau de chevaux sauvages est à la recherche de nourriture sous une épaisse couche de neige immaculée.
Une image qui pourrait sembler surréaliste à ceux qui ont gardé le souvenir du drame de Tchernobyl et des conséquences désastreuses qu'il avait entraînées pour toute forme de vie.
Le 26 avril 1986, le quatrième réacteur de la centrale de Tchernobyl, situé dans le Nord de l'Ukraine, explose, contaminant une bonne partie de l'Europe.
Et dans un rayon de 10 km autour de la centrale fermée en 2000, le niveau de radiation atteint toujours 1.700 nanosieverts par heure, un chiffre 10 à 35 fois supérieur à la norme observée aux États-Unis.
Mais selon M. Vichnevski, qui est également zoologiste, la présence humaine est beaucoup plus nocive aux animaux sauvages que les effets de la radiation.
"La radiation est partout ici et cela a des effets négatifs", rappelle M. Vichnevski. "Mais c'est moins significatif que l'absence de l'intervention humaine". Plus de 130.000 personnes ont en effet été évacuées de la région dans les jours qui ont suivi l'explosion, abandonnant bacs à sables et balançoires qui sont depuis restés là, comme figés dans le temps.
Renaissance de l'environnement
Quelque 10 km² de forêts de pins entourant la centrale ont été détruits peu après la catastrophe en raison de l'absorption d'un niveau élevé de radiation et les divers oiseaux, rongeurs et insectes qu'elles abritaient ont disparu.
Des chevaux de Przewalski, dans la zone d'exclusion de Tchernobyl, le 22 janvier en Ukraine. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Le site de la "Forêt rouge", baptisée ainsi à cause de la couleur des arbres fanés, a été rasé au bulldozer et les pins morts enterrés comme des déchets nucléaires.
Mais une nouvelle forêt de pins et de bouleaux, plus résistants à la radiation, a repoussé au même endroit depuis. Et la nature a connu de curieuses transformations.
D'une part, les espèces dépendant des déchets humains ont disparu comme les cigognes blanches, les moineaux ou les pigeons. Mais des espèces indigènes qui avaient prospéré dans la flore luxuriante bien avant la catastrophe ont réapparu : des loups, des ours, des lynx, des pygargues à queue blanche et bien d'autres.
En 1990 une poignée de chevaux de Przewalski en voie de disparition ont été amenés là pour voir s'ils pouvaient y prendre racine.
L'expérience a réussi et une centaine d'entre eux pâturent aujourd'hui sur des champs vides. "Nous appelons cela une renaissance environnementale", commente M. Vichnevski.
Marina Chkvyria, chercheuse de l'Institut de zoologie Schmalhausen, qui surveille le site de Tchernobyl, prévient toutefois que de nombreux touristes visitant la zone et les employés qui s'occupent de l'entretien de la centrale et de la construction du nouveau sarcophage détériorent cette nature. "On ne peut pas dire que c'est un paradis pour les animaux", souligne-t-elle. "Beaucoup de gens travaillent à la centrale. Il y a des touristes, des braconniers", ajoute la scientifique.
Désormais, reste donc à apprendre à utiliser cette biosphère émergente sans faire de dégâts, souligne M. Vichnevski.
"Le contraste est saisissant entre le Tchernobyl d'avant la catastrophe et celui 30 ans plus tard, assure-t-il. Ces animaux sont probablement la seule conséquence positive de cette terrible catastrophe".