Dette des pays pauvres : les moyens de soulager rapidement existent

Des moyens d'alléger le lourd fardeau de la dette des pays en développement peuvent être rapidement mis en œuvre, affirme la cheffe de l'ONU Commerce et Développement, tout en plaidant aussi pour un mécanisme international pérenne de restructuration.

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Aide humanitaire pour une habitante à Nairobi, au Kenya.
Photo : AFP/VNA/CVN

Pour illustrer ce qu'elle estime être une crise, Rebeca Grynspan use d'une image forte lors d'un entretien récent avec l'AFP : "C'est comme une transfusion sanguine à l'envers", du malade vers la personne en bonne santé.

De fait en 2022 - la dernière année pour laquelle on dispose de données fiables - les gouvernement des pays en développement "ont payé près de 50 milliards d'USD de plus à leurs créanciers extérieurs qu'ils n'ont reçu de nouveaux décaissements", souligne un récent rapport de l'organisation dirigée par la costaricaine.

Et si le début de 2024 a montré un regain d'accès aux marchés obligataires, y compris de certains pays considérés à risque comme le Bénin, la Côte d'Ivoire et le Kenya, le problème reste urgent.

"Nous pensons que nous sommes dans une crise de la dette, mais que ce n'est pas ressenti" parce que les marchés ne sont pas en crise, explique la secrétaire générale dans son bureau au siège européen de l'ONU à Genève.

"Ce sont les petits pays et les pays moyens, ceux qui ne font pas bouger les marchés, qui sont en détresse ou qui dépensent plus pour leur dette qu'ils ne le font pour le développement humain, la santé ou l'éducation", dit-elle.

Selon son agence, 52 pays sont dans une mauvaise passe et c'est un sujet qu'elle compte évoquer lors des réunions des grands argentiers cette semaine à Washington.

Nommée il y a deux ans et demi, Rebeca Grynspan a donné du relief à son poste en participant par exemple aux réunions du G20 mais aussi comme représentante de l'ONU sur le difficile dossier des exportations d'engrais russes.

Trop lent

Les efforts depuis des décennies pour régler les problèmes d'endettement des pays pauvres ont été nombreux, mais aux yeux de Mme Grynspan, ils sont "trop lents", y compris les dispositifs les plus récents du G20 et Fonds monétaire international.

C'est si lent et si compliqué parfois que cela en devient un repoussoir et les pays "préfèrent payer, malgré le prix exorbitant que cela représente" en matière de retard dans les investissements pour le développement durable par exemple.

Le Comité exécutif du Fonds a d'ailleurs endossé mardi des recommandations pour pouvoir aller plus vite dans le traitement des dossiers.

Mais tout en saluant ces efforts, Mme Grynspan souligne que ce sont "des formules ad hoc", et que l'on a besoin "d'un mécanisme adopté au niveau international et stable, pour la restructuration de la dette".

Que faire

La sécheresse exacerbe la pauvreté en Afrique.
Photo : AFP/VNA/CVN

Mais certains pays n'ont pas le luxe d'attendre un tel mécanisme. Il faut les soulager tout de suite, d'autant que dans une grande partie des cas c'est l'immense choc de la pandémie de COVID-19 qui a aggravé la situation et non pas la gabegie des gouvernements.

"Il y a donc une argumentation en faveur d'une aide beaucoup plus importante de la communauté internationale".

"Un fruit facile à cueillir" consisterait a supprimer les surcharges que 17 pays payent actuellement au FMI, explique Mme Grynspan.

En les exemptant de ce mécanisme qui doit inciter les pays à se passer des ressources du FMI le plus vite possible, cela permettrait de libérer 2 milliards d'USD, détaille la responsable onusienne.

"Ce sera un grand soulagement de pouvoir utiliser ces 2 milliards d'USD pour le développement durable et pour répondre aux besoins des populations de ces pays", souligne-t-elle.

C'est une décision que le Conseil d'administration du Fonds peut prendre rapidement.

Elle salue aussi une autre idée de la Banque mondiale, de la Banque interaméricaine de développement et de son homologue africaine qui consisterait à "donner des garanties permettant de réellement faire baisser les taux d'emprunt dans les pays en développement et d'attirer les investissements privés".

Elle suggère aussi "d'accélérer un peu" un nouveau mécanisme d'aide du FMI, le Resilience and Sustainability Trust (RST), qui aura pour objectif de financer la résilience des économies face aux défis structurels comme le changement climatique.

Elle cite également les échanges de "dette contre nature" ou "dette contre développement durable" ou encore des clauses qui permettent de suspendre automatiquement le paiement des intérêts de la dette en cas de désastre naturel par exemple.

"Ce sont des choses qui peuvent être décidées aujourd'hui. Nous n'avons pas besoin d'attendre une décennie pour obtenir des résultats", martèle Mme Grynspan.

AFP/VNA/CVN

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