>>À Soc Trang, visitez une pagode originale en grès
La province de Soc Trang (delta du Mékong) est réputée pour ses pagodes comme Chua Doi, Chen Kiêu (pagode totalement en grès), Chua Vang et d’autres encore. Mais la plus originale est sans conteste Dât Set (littéralement la pagode d’argile ou Buu Son Tu, de son autre nom), édifiée il y a un peu plus d’un siècle par la famille Ngô. D’une superficie de 400m², elle se trouve rue Tôn Duc Thang (5e quartier de la ville de Soc Trang). En 2010, elle a été reconnue par le Comité populaire de la province vestige historique et culturel. Aujourd’hui, elle est classée au patrimoine national.
Le portique d’entrée de la pagode Dât Set est exclusivement fait d’argile. |
Photo : Panoramio/CVN |
Du bois à l’argile
Le parcours de cet édifice est singulier. À l’origine en bois, son bâtisseur est le fidèle Ngô Kim Tây. L’ouvrage est restauré en 1906 avec la pose de 24 colonnes en manglier (une sorte de palétuvier). En 1909, un heureux événement intervient avec la naissance de Ngô Kim Tong, le fils de Kim Tây. Mais sa santé est fragile. À 20 ans, il tombe gravement malade. Sa famille l’amène dans cette pagode pour implorer la protection du Ciel et du Bouddha. Tong se voit prescrire un traitement médical et pratique le thiên (méditation). En quelques temps, il recouvre tous ses moyens.
Reconnaissant de ce qu’il estime être une intervention divine, l’intéressé décide d’officier en tant que moine et devient le responsable de la pagode Dât Set. Il se met alors en tête l’idée d’exploiter l’argile pour faire du bâtiment une pagode entièrement composée de ce matériau. Les travaux de restauration - ou plutôt de transformation - se poursuivent 42 ans durant, jusqu’à son trépas, le 18 juillet 1970.
La tour Bao Toà Liên Hoa, ou tour des lotus. |
En l’espace de quatre décennies, Ngô Kim Tong a modelé plus de 1.900 statues de Bouddha et de divinités du panthéon bouddhiste (Amitabha, Avalokitésvara, etc.). Parmi ses plus belles réussites : un stupa Da Bao, une tour Bao Toà Liên Hoa (tour des lotus), un trône de lotus, les quatre animaux légendaires (dragon, licorne, tortue et phénix), quatre paires de bougies de 2,6 m de haut, 1 m de large avec jusqu’à 200 kg de cire chacune (une paire se consume sans interruption depuis 1970), et trois bâtons d’encens géants de 1,5 m de haut pour 50 kg chacun. De quoi laisser pantois.
Un travail de titan
Le stupa Da Bao. |
Le stupa Da Bao et la tour Liên Hoa ont été reconnus en juillet 2013 record national. Construit en 1939, le stupa mesure 3,5 m de haut et comporte 13 étages, 208 portes, 208 bouddhas, le tout porté par 126 dragons miniatures. Cette œuvre artistique associe des motifs simples et raffinés. Les travaux ont duré plus d’un an. Fin 1940, Tong s’attaque à la tour Bao Toà Liên Hoa, sur laquelle trônent 1.000 Bouddhas sur autant de pétales de lotus. Au sommet, l’on peut distinguer l’auréole du Bouddha sur laquelle 500 images à son effigie apparaissent et disparaissent grâce à un astucieux effet d’optique.
Ngô Kim Tong était un autodidacte. Il n’a jamais suivi d’études d’architecture et de beaux-arts, se basant sur son vécu pour faire de cette pagode un ouvrage unique.
Pour l’argile, Tong a enchaîné les allées et venues de la pagode aux champs (à environ 1 km de là), transportant la glaise dans des sacs portés à même l’épaule avant de la mettre à sécher, de la passer au pilon, puis au tamis afin d’en ôter les impuretés. Une fois le processus terminé, il ajoutait une association de poudres spéciales pour créer une argile souple idéale pour la construction.
Plus d’un demi-siècle s’est écoulé depuis. La pagode Dât Set est demeurée intacte, sous la bonne garde de la descendance de son architecte. Une construction bâtie pour durer.
Comment s’y rendre ?
Quê Anh/CVN