Lê Thi Hoà Binh, 38 ans, est l’unique femme à pratiquer le métier de sculptrice sur pierre à Non Nuoc, un village de l’arrondissement de Ngu Hành Son (ville de Dà Nang, Centre). Elle travaille dans l’atelier Lê Thang, dirigé par son mari.
Lê Thi Hoà Binh occupée à façonner une statue de bouddha. |
À l’origine, Hoà Binh était couturière. «Je gagnais peu d’argent et mon mari payait cher ses ouvriers. J’ai donc arrêté la couture et j’ai commencé à l’aider à polir et à nettoyer les statues, confie Binh, née dans le district de Diên Bàn (province de Quang Nam, Centre). Je lui ai ensuite demandé qu’il me transmette son savoir-faire».
Son mari a tout d’abord refusé. Loin d’être découragée, Mme Binh s’est adressée à son beau-père. Discrètement, elle s’est aussi formée auprès des ouvriers de l’atelier. Devant le talent dont elle faisait preuve, son époux a finalement accepté de lui enseigner les techniques de la sculpture. «Au début, les statues que je fabriquais ne satisfaisaient pas les clients. Elles étaient vendues à bas prix. Mais j’étais déterminée à ne pas abandonner ce métier, partage Binh. À l’heure du déjeuner, alors que les employés de l’atelier se reposaient, je continuais à travailler».
Femme sculpteur, un phénomène rare
À force de persévérance, sa technique s’est améliorée et ses statues ont trouvé grâce auprès de son mari et des clients. De nombreuses commandes ont suivi. Elle est alors devenue une sculptrice confirmée, un métier qu’elle pratique depuis quinze ans.
Œuvres de sculpteurs sur pierre de Non Nuoc. |
«La sculpture sur pierre n’est pas un métier facile pour les femmes. Les mouvements sont pénibles et on travaille dans la poussière, dit Lê Thi Hoà Binh. Chaque statue doit aussi avoir une âme et un style propre». Une femme sculpteur est un phénomène rare à Non Nuoc. Elles sont généralement spécialisées dans le polissage des statues, alors que le travail au ciseau et la taille sont réservés aux hommes.
D’après Hoà Binh, pour les hommes comme pour les femmes, seule la passion et la patience permettent d’exceller dans ce domaine. «Si vous n’êtes pas convaincu de ses compétences, venez vous-même la voir à l’œuvre», invite Nguyên Khanh, artisan expérimenté de Non Nuoc.
Lê Thi Pha, la voisine de Binh, confirme : «Ses statues sont de la même qualité que celles fabriquées par les sculpteurs chevronnés». Et d’ajouter: «Ils admirent son talent. Ses gestes sont à la fois rapides, précis et harmonieux». Depuis dix ans, Hoà Binh forme aussi des jeunes de l’atelier Lê Thang, notamment Ly et Nhân.
Généralement, la sculpture sur pierre est un travail réservé aux hommes. |
Photo : Quê Anh/CVN |
Une cycliste accomplie
Il y a deux ans, Nguyên Van Suu, un Viêt kiêu établi aux États-Unis, a commandé à l’atelier Lê Thang deux statues de deux mètres : une de bodhisattva Avalokiteshvara et l’autre de Hung Dao Vuong Trân Quôc Tuân, un général de la dynastie Trân (1225-1400). Surpris d’apprendre que c’était une femme qui allait les réaliser, il a demandé à venir la voir travailler de ses propres yeux. «C’était la première fois que quelqu’un me regardait travailler pendant deux semaines. J’en suis heureuse car mes compétences ont été reconnues. J’ai davantage confiance en moi», indique Binh avec fierté.
Une fois les deux statues terminées, M. Suu et sa femme ont demandé à Hoà Binh de graver son nom en dessous. Le couple lui a même adressé une lettre pour saluer son talent.
Hoà Binh explique que son métier demande une bonne condition physique. C’est pourquoi elle pratique le cyclisme. En août 2014, elle a remporté le 1er prix lors de la course cycliste du mont Son Trà, organisée par la ville de Dà Nang. En décembre 2014, elle a décroché le prix d’encouragement lors du tournoi national de cyclisme pour amateurs et professionnels à Huê, province de Thua Thiên-Huê (Centre).
Quê Anh/CVN