Créer malgré le handicap

La poterie et le dessin permettent aux enfants malvoyants de gagner en confiance et de s’épanouir. Rencontre avec des élèves de l’école Nguyên Dinh Chiêu, à Hanoi.

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La peintre Elisabeth Person enseigne à un élève de l’école Nguyên Dinh Chiêu

Des enfants malvoyants occupés à travailler l’argile. Voilà ce que le sculpteur suédois Tommy Jerhammar a découvert lorsqu’il a visité le village de céramique de Huong Canh, dans le district de Binh Xuyên (province de Vinh Phuc). «Pourquoi as-tu voulu ajouter des yeux sur ton vase ?», a demandé l’artiste à Lê Huy Hao, 19 ans. Et ce dernier de répondre: «Parce que j’aime mes yeux». «Rêves et amour apparaissent dans chacune de vos oeuvres», a dit à son tour Tommy Jerhammar, ému.

Œuvres inspirées de rêves

Lê Huy Hào est élève en neuvième classe à l’école Nguyên Dinh Chiêu de Hanoi. Il peut se déplacer seul. Pourtant, il vit dans un brouillard permanent. Il se forme à l’art de la céramique depuis qu’il est en cinquième année. Cette matière fait partie des activités extrascolaires proposées par son école. Ainsi, chaque mois, il se rend dans les villages de céramique célèbres comme Chu Dâu, Bat Tràng ou Huong Canh pour se faire la main. Différents artistes l’aident depuis plusieurs années à utiliser au mieux l’argile.

Les yeux de Hào ne lui permettent pas de voir l’ambiance de ces villages, mais il la ressent grâce au toucher. Hào se souvient qu’il y a deux ans, Thanh Nhan, un artisan du village de Huong Canh, l’avait autorisé à palper ses œuvres. Il était tellement heureux qu’il avait failli fondre en larmes. «Bien que je ne vois pas en détail mes réalisations, je crois que mes proches comprennent ce que je veux partager et l’esprit qui les entoure», confie Hào. Aujourd’hui, la poterie est devenu une partie importante de sa vie.

Luong Quôc Hung distingue lui un peu mieux les formes, mais il ne reconnaît pas les visages. Il est également élève de l’école Nguyên Dinh Chiêu et suit des cours de peinture et de sculpture depuis son enfance. Il se souvient que dès la cinquième année, Huong Giang, son institutrice, utilisait souvent des tableaux qu’il fallait décorer avec de la cire. Lorsqu’il dessinait, il apercevait quelques couleurs, mais touchait surtout la matière avec ses mains. Ses premières œuvres étaient inspirées de petites scènes de la vie quotidienne, de ses rêves ou encore de ses passions.

Hung est maintenant étudiant de deuxième année en pédagogie artistique. Mais il participe encore aux activités de La maison des arts de l’école Nguyên Dinh Chiêu. Chaque semaine, il revient dans son ancienne école pour dessiner et sculpter. «C’est ici que ma passion est née et s’est développée. Je souhaite, à la sortie de l’université, retourner à Nguyên Dinh Chiêu pour enseigner aux enfants malvoyants», a-t-il confié.

L’art comme un exutoire

Père d’un élève de l’école Nguyên Dinh Chiêu, le peintre Dào Ngoc Huynh n’est pas prêt d’oublier Elisabeth Person. Il a rencontré cette artiste aux cheveux blonds platine et au visage doux lors d’une exposition de peinture organisée à Hanoi. «Est-ce que l’art peut dépasser ce handicap que constitue la malvoyance? Comment être artiste lorsqu’on ne peut pas avoir? C’est possible, avec un bon encadrement», avait-elle déclaré.

Une œuvre des élèves de l'école Nguyên Dinh Chiêu, à Hanoi.
Photo : Net/CVN

Depuis cette rencontre, Dào Ngoc Huynh soutient davantage son fils dans ses études. Grâce à leurs efforts, le projet intitulé «L’art dépasse la vue», lancé par Elisabeth Person, a pu voir le jour. Soutenu par des organisations internationales comme le Lion’s Club (Suède) et la DED (Allemagne), il en est à sa huitième édition.

En 2011, près de 200 céramiques et une centaine de peintures sur le thème «L’art dépasse la vue» ont été exposées au Musée des beaux-arts du Vietnam. Elisabeth Person a salué cette exposition. En effet, chaque œuvre est un exutoire qui révèle les rêves, les intérêts et les pensées intimes des élèves malvoyants.

De passage à Hanoi récemment, Elisabeth Person a déclaré : «Pour les enfants malvoyants, l’art est plus qu’un hobby. C’est une sorte de thérapie qui leur permet de reprendre confiance en eux et en la vie. L’art nourrit aussi leur âme».


Truong Giang /CVN

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