Colombie : le pape appelle à dissiper les ténèbres de la vengeance

Le pape François a célébré jeudi 7 septembre sa première messe pontificale en Colombie, en appelant à dissiper "les ténèbres de la soif de vengeance" dans ce pays en quête de paix et de réconciliation, après une guerre fratricide de plus de cinq décennies.

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Le pape François a célébré une messe le 7 septembre à Bogota
Photo : AFP/VNA/CVN

Le pape François a dénoncé "les ténèbres de la soif de vengeance et de la haine qui tache de sang humain les mains de ceux qui se rendent justice eux-mêmes", devant plusieurs centaines de milliers de fidèles rassemblés dans le parc Simon Bolivar, le plus grand de Bogota, capitale de quelque huit millions d'habitants.

Un peu plus tôt, il avait déjà encouragé les Colombiens à s'efforcer de "fuir toute tentation de vengeance et de recherche d'intérêts particuliers et à court terme", lors du premier discours de sa visite prononcé devant 700 personnalités politiques et religieuses, sur la place d'Armes du palais présidentiel Casa de Nariño.

"Il ne sert à rien de faire taire les fusils, si nous restons armés dans nos coeurs. Il ne sert à rien de terminer une guerre si nous continuons à nous voir les uns les autres comme ennemis", a pour sa part déclaré le président Juan Manuel Santos, prix Nobel de la Paix 2016, qui la veille avait accueilli le pape à son arrivée pour cette visite de cinq jours.

Saines utopies

François, dont c'est la première visite pontificale en Colombie, a souligné que la société "n'est pas constituée uniquement par quelques +pur-sang+, mais par tous", puis il a appelé les jeunes à "rêver en grand" et à "pardonner".

Le pape soutient le processus de paix engagé par M. Santos, qui a signé en novembre un accord de paix historique avec la puissante guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), apparue en mai 1964 et aujourd'hui reconvertie en parti politique légal.

Lundi 4 septembre, deux jours avant la venue du pape argentin, promoteur de ce processus de paix, le gouvernement a conclu le premier cessez-le-feu bilatéral de l'histoire avec l'Armée de libération nationale (ELN), dernière rébellion active, en pourparlers de paix depuis février.

Le souverain pontife, âgé de 80 ans, s'est aussi adressé jeudi plus particulièrement à la jeunesse de ce pays de 48 millions d'habitants, à grande majorité catholiques.

"Prenez le risque de rêver en grand!", a-t-il dit, depuis le balcon de l'archevêché, à près de 22.000 jeunes rassemblés sur la place Bolivar, coeur de Bogota. "Que vos illusions et projets donnent de l'oxygène à la Colombie et la remplissent de saines utopies", a-t-il ajouté, en les jugeant capables de "regarder en avant sans le fardeau de la haine".

Villavicencio et les victimes

Le pape François, le 7 septembre à Bogota.

"Votre jeunesse vous rend capables aussi de quelque chose de très difficile dans la vie : pardonner. (...) Il est remarquable de voir comment (...) vous nous regardez avec étonnement, nous les adultes, répéter des histoires de divisions seulement pour rester prisonniers des rancoeurs", a estimé le pape.

Puis il se rendra vendredi 8 septembre à Villavicencio, à environ 70 km de Bogota, où il rencontrera des indigènes, des victimes et d'ex-acteurs de cette guerre qui a impliqué une trentaine de guérillas, des paramilitaires d'extrême droite et les forces de l'ordre, faisant plus de 260.000 morts, plus de 60.000 disparus et au moins 7,1 millions de déplacés.

La réconciliation reste à construire dans ce pays, notamment pour des victimes telles que Luis Eduardo Martinez, qui a survécu à un massacre commis par les Farc à Villavicencio. "Pour nous, qui avons vu tomber beaucoup de victimes, le ressentiment reste", a admis cet homme de 63 ans, qualifiant le processus de paix avec les Farc de "mensonge".

Le pape, qui revient à Bogota chaque soir, est attendu samedi 9 septembre à Medellin, l'ancienne capitale mondiale du trafic de drogue et ex-fief du +capo+ Pablo Escobar, abattu en 1993. Il terminera sa visite dimanche 10 septembre par Carthagène des Indes, perle coloniale et touristique des Caraïbes, qui détient aussi le taux de pauvreté le plus élevé de Colombie, d'où il repartira pour Rome.


AFP/VNA/CVN

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