Un chirurgien lors d'une opération à cœur ouvert dans un hôpital français. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Geneviève Fioraso, secrétaire d'État à la Recherche, a salué vendredi 16 janiver cette "avancée prometteuse" : une "première implantation mondiale" qui "démontre une fois de plus le niveau d'excellence" de la recherche française.
Les cellules souches embryonnaires dites "pluripotentes", représente un fort potentiel thérapeutique car elles sont capables de fabriquer toutes sortes de tissus (cardiaques, musculaires, etc.).
Des essais à partir de telles cellules embryonnaires ont déjà été réalisés dans le monde pour corriger des pathologies de l'oeil, mais c'est le premier essai pour l'insuffisance cardiaque, selon ces médecins.
La greffe sur la zone du coeur lésée par un infarctus, couplée dans le même temps à un pontage coronarien, a été réalisée le 21 octobre 2014, chez une patiente de 68 ans, par le professeur Philippe Menasché et son équipe du service de chirurgie cardiovasculaire de l'hôpital européen Georges Pompidou (AP-HP, Paris).
Cette thérapie reposant sur un procédé développé par le Pr Jérôme Larghero (hôpital Saint-Louis, Inserm) a été présentée vendredi aux 25e Journées Européennes de la Société française de cardiologie à Paris.
La patiente souffrait d'insuffisance cardiaque sévère avec altération nette de sa fonction cardiaque à la suite d'un infarctus ancien, mais sans être au stade ultime qui aurait relevé d'une greffe cardiaque ou d'un coeur artificiel.
À présent, elle "va bien, son état s'est nettement amélioré, sans qu'aucune complication n'ait été observée", a dit le Pr Menasché.
L'essai a été autorisé par l'Agence de la biomédicine pour 6 patients. Il s'agit d'"un essai de phase 1 pour vérifier la sécurité et la bonne tolérance de la thérapeutique cellulaire", précise-t-il.
Les jeunes cellules cardiaques obtenues à partir des cellules souches embryonnaires en laboratoire ont été incorporées dans un gel qui a été posé sous forme de patch sur la zone du coeur de la patiente, rendu inerte par l'ancien infarctus.
Cette partie du cœur "bouge aujourd'hui", mais il serait prématuré de dire si l'amélioration provient de la greffe de cellules ou du pontage, souligne le chirurgien.
"Tentative de réparation"
"Nous ne pensons pas que ces cellules vont vivre éternellement et fabriquer du tissu cardiaque", ajoute le Pr Menasché. "En revanche, il y a des arguments sérieux pour penser qu'elles sécrètent des substances qui peuvent induire une forme de réparation à partir du coeur lui-même".
"C'est un espoir et d'abord la démonstration que c'est faisable, ce qui n'était pas acquis", dit-il à propos de cette "tentative de réparation" du coeur après infarctus.
Un "tri" est effectué en laboratoire pour obtenir un concentré de jeunes cellules cardiaques, en écartant les cellules restées au stade embryonnaire qui comportent un risque de tumeur : "On obtient ainsi 98 à 99% de cellules purifiées", note le Pr Larghero.
La lignée de cellules embryonnaires provient de la société israélienne Technion car au début de cette recherche, il était interdit d'en produire en France.
Il y a un an, précise le Pr Ménasché, un patient de 77 ans, "en bout de course", intransplantable et "très demandeur", avait également été traité, mais n'a pas survécu en raison de son mauvais état général et de multiples pathologies, sans que le patch ne soit en cause.
Selon lui, il faudra faire une étude comparative avec un groupe avec patch placebo et pontage, pour démontrer précisément l'apport de la thérapie cellulaire.
Le pontage permet de contourner un obstacle qui obstrue une coronaire, artère nourricière du cœur, à l'aide d'un petit morceau de vaisseaux. L'insuffisant apport sanguin via les coronaires est la cause de l'infarctus.
Les cellules souches embryonnaires au centre de débats éthiques, sont issues d'embryons surnuméraires sans projet parental donnés à la science.
"C'est bien de mener de nouvelles pistes jusqu'à l'application chez l'homme", relève le Pr Gabriel Steg, cardiologue, saluant le Pr Menasché, "expert indiscutable dans ce domaine". "Il faut continuer, il y a un potentiel d'avenir, mais cela reste expérimental", ajoute le Pr Jacques Mansourati.
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