Au chevet des animaux errants à Bagdad : un cœur gros comme ça mais zéro soutien

Bella n'arrive plus à tenir sur ses pattes. La chienne a été maltraitée par des personnes qui l'ont ensuite abandonnée. Par chance, elle a été accueillie dans un refuge de Bagdad qui aspire à devenir la première clinique vétérinaire pour animaux errants d'Irak.

>>Dans l'Inde confinée, les animaux s'approprient les rues

Une vétérinaire s'occupe d'une petite chienne blessée dans un refuge de secours pour animaux errants, le 16 janvier 2022 à Bagdad, en Irak.
Photo : AFP/VNA/CVN

Contrairement aux Européens et aux Nord-Américains, les Irakiens sont peu intéressés par les animaux de compagnie. Et les milliers de chiens et chats qui peuplent les rues de Bagdad à la recherche d'un peu de nourriture sont souvent victimes de mauvais traitements.

Il y a une quinzaine d'années, des milliers de chiens errants avaient même été abattus à l'arme automatique lors d'une campagne lancée notamment à Bagdad, car la municipalité jugeait que la capitale en était infestée.

Avec "L'équipe de secours aux animaux de Bagdad" qui a ouvert il y a une semaine dans la banlieue Ouest de la capitale irakienne, Nazik entend apporter sa pierre à la défense des animaux, cause pour le moins inhabituelle en Irak.

"Nous allons soigner toutes sortes d'animaux et nous les relâcherons quand ils iront mieux", explique Nazik, une jeune bénévole qui ne souhaite pas donner son nom de famille.

"Ils souffrent mais ne parlent pas"

Pour l'heure, le refuge accueille une petite dizaine de chiens et chats, dont Bella et Zaatar ("Thym" en arabe) un félin à la robe noire devenu aveugle après avoir été percuté par une voiture à Adhamiya un quartier résidentiel de Bagdad.

Dans le bâtiment neuf planté dans un bout de campagne à l'écart du centre-ville, les bénévoles s'affairent : beaucoup de réconfort, des caresses et de la bobologie, spécialité de Ouissam Mohammed, soignant d'une vingtaine d'années. "Je soigne les animaux et je fais aussi office de gardien", dit-il.

Lorsque la pathologie nécessite un traitement plus avancé, les animaux sont conduits chez un vétérinaire. Outre la pièce principale où les soins sont prodigués, le refuge compte un bâtiment de stockage et un ensemble de cages.

Il peut théoriquement accueillir plusieurs centaines d'animaux.

À terme, le refuge entend bien devenir une clinique vétérinaire pour animaux errants en bonne et due forme. Mais si la bonne volonté est bien là, l'argent manque.

"On nous signale les animaux blessés à la suite d'accidents. Nous les amenons ici et nous les traitons. C'est nous, l'équipe, qui partageons les frais induits par leur traitement", dit Sally Fayçal, une autre bénévole. Les animaux "souffrent mais ne parlent pas", ajoute-t-elle.

Une fois soignés, les animaux seront proposés à l'adoption ou, si aucun humain ne veut se dévouer, ils continueront leurs jours dans le refuge.

Les animaux? Pas une priorité

Un vétérinaire soigne un chat blessé dans un refuge de secours pour animaux errants, le 16 janvier à Bagdad, en Irak.
Photo : AFP/VNA/CVN

L'équipe a acquis le terrain pour 25 millions de dinars (environ 17.000 USD) grâce à des dons. "Nous n'avons reçu aucun soutien (des pouvoirs publics, ndlr), malgré toute la promotion que nous avons faite sur les réseaux sociaux", se désole Nazik.

"Nous avons besoin d'espaces aménagés supplémentaires pour les chiens et chats, mais malheureusement, personne ne nous aide", abonde Sally.

Pire : avant l'ouverture du centre, les bénévoles qui recueillaient des animaux blessés à la maison disent avoir fait face à l'incompréhension, voire au rejet de leurs proches, totalement opposés à l'idée d'avoir un chien ou un chat malade chez eux.

Dans un Irak englué dans une crise politique et où l'économie fait du surplace et la pauvreté gangrène une partie de la société, le bien-être animal est loin d'être une priorité.

Le refuge vétérinaire de Bagdad est l'un des premiers du genre en Irak. Il existe trois réserves destinées aux animaux sauvages comme les cerfs, explique-t-on au ministère de l'Agriculture, mais aucune structure pour soigner les espèces urbaines.

Dans un coin de la pièce principale, Loulou, poil blanc et blond, regarde apeuré ses congénères - le matou a perdu une patte après un accident.

Nazik émet un voeu : "il faudrait organiser une campagne de sensibilisation pour que cesse la maltraitance animale. Après tout, ils sont innocents".

AFP/VNA/CVN

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