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Michel-Edouard Leclerc à Paris, le 25 mai 2016. |
"Menteur", agitateur de "chiffon rouge", "propos outranciers" : depuis mercredi soir 27 septembre, agriculteurs, industriels et rivaux de la grande distribution tirent à boulets rouges sur M. Leclerc. En cause ? Une note de blog dans laquelle il met en garde contre "des hausses de prix de 5 à 15% sur des milliers d'articles alimentaires... sous prétexte d'aider les agriculteurs".
"Je condamne les propos outranciers de Michel-Edouard Leclerc. C'est scandaleux ! Il cherche à faire peur pour que rien ne change" : la charge, sans équivoque, est signée du député PS de la Mayenne Guillaume Garot, qui préside l'atelier sur le gaspillage alimentaire.
Contactée par l'AFP, la direction de Leclerc n'a pas souhaité s'exprimer dans l'immédiat.
"Certains groupes qui font du prix à tout prix disent que les prix vont augmenter de 15%, c'est-à-dire du niveau du seuil de revente à perte, c'est du mensonge", s'est indigné Serge Papin, patron de Système U et responsable d'un atelier crucial qui vise à mieux rémunérer l'agriculture française qui traverse une crise terrible depuis deux ans.
"Le Nutella est subventionné par la pomme Royal Gala", a affirmé M. Papin, pour qui la marge moyenne en fruits et légumes se situe entre 30 et 40%, alors que les produits les plus vendus sont à moins de 10% de marge : "voila la base de l'injustice que vit le monde agricole aujourd'hui", estime-t-il, déclarant vouloir "changer ça".
Pour ce faire, il a présenté jeudi 28 septembre devant les chambres d'agriculture ce qui semble devoir être une avancée majeure dans le cadre de la première phase des États généraux de l'alimentation, sur laquelle l'ensemble des protagonistes sont selon lui tombés d'accord.
"Si on veut sauver la filière agricole, la proposition que l'on fait, c'est que ce soient les prix agricoles qui soient au début de la relation contractuelle et non pas l'inverse et ils vont donc proposer, en fonction d'indicateurs de prix de revient de leurs coûts de production, un processus de contrat qui part du prix payé à l'agriculteur, donc ça va tout changer", a affirmé M. Papin.
Briser la "loi du plus fort"
L'accord, qui doit tenir compte des prix du marché, passe par un "renforcement du rôle de l'observatoire des prix et des marges et un renforcement des interprofessions qui seront probablement, dans ce cadre-là, rallongées aux distributeurs", poursuit M. Papin.
Par ce biais, il affirme s'être attaché à "réconcilier" distributeurs, industriels et agriculteurs, fustigeant une nouvelle fois la loi de modernisation de l'économie actuellement en vigueur, qui "a favorisé la loi du plus fort et la guerre des prix".
Interrogé sur un éventuel changement de cette loi, il a renvoyé au 11 octobre, date à laquelle le président Emmanuel Macron, qui a convoqué ces États généraux, doit annoncer les mesures retenues à l'issue de cette première phase.
"Michel-Edouard Leclerc dit faux, une fois de plus, ce n'est pas normal qu'il essaye de brandir le chiffon rouge de cette façon-là", s'est agacée, avant Serge Papin, la patronne de la FNSEA Christiane Lambert au micro de RTL.
"Pour redresser l'ensemble de la filière, cela représente (un coût, NDLR) de 30 centimes d'euros par personne et par semaine. Sur un an, ça fait 15 euros. On ne va pas chercher 5 à 15% de plus, comme on l'a entendu", avait déjà contesté mercredi soir Jean-Philippe Girard, président de l'association des industries alimentaires (Ania).
"La seule question qui vaille, c'est comment nous pouvons trouver des accords entre les consommateur, les distributeurs, les transformateurs et les producteurs pour qu'il y ait cette création de valeur. (...) Ca ne passe pas nécessairement par une hausse des prix", a pour sa part estimé le ministre de l'Agriculture, Stéphane Travert, lors de la présentation du budget 2018 de son ministère.
AFP/VNA/CVN