"Dans le pacte de stabilité, il y a des flexibilités. Utilisons-les sans le remettre en cause", a plaidé le commissaire européen au marché intérieur Michel Barnier, intervenant dans le débat sur la relance de la croissance en zone euro qui a marqué les trois journées de ces rencontres internationales, entre ceux qui ne veulent plus entendre parler du 3% de déficit budgétaire maximum et ceux qui le défendent bec et ongles.
Dès la session inaugurale du 4 juillet, l'économiste irlandais Kevin O'Rourke avait lancé une lourde charge contre les politiques d'austérité en Europe, suivant la même ligne que les Prix Nobel, Joseph Stiglitz ou Paul Krugmann. "Il faut rompre avec les politiques d'austérité et ne pas imposer de limites aux investissements publics", a affirmé ce professeur d'Oxford.
Le commissaire européen au marché intérieur Michel Barnier (droite), le 20 juin |
Conscient que cet argument ne trouverait pas grâce auprès de Bruxelles et de Berlin, cet économiste l'a dès lors formulé d'une autre manière en appelant à "exploiter beaucoup plus la flexibilité déjà présente dans les traités européens pour le déficit public".
Cette formulation a trouvé un écho favorable du côté des autorités européennes. Le membre français du directoire de la Banque centrale européenne (BCE), Benoît Cœuré, a confirmé l'existence "de flexibilités dans les règles du pacte de responsabilité", mais sous certaines conditions.
"Il y a de la flexibilité pour les pays qui font des réformes majeures, mais il faut évidemment que ces réformes soient prouvées et qu'il ne s'agisse pas uniquement de promesses", a-t-il souligné, laissant entendre implicitement qu'il n'est pas nécessaire de le remettre en cause si les réformes sont entreprises.
Donner du temps
Le "pacte de stabilité et de croissance" vise à assurer la discipline budgétaire des États membres. Pour éviter l'apparition de déficits excessifs, il fixe une limite de 3% du PIB pour le déficit public des États membres et de 60% pour la dette publique. Il a été renforcé avec la crise de la dette, avec notamment l'introduction de possibles sanctions.
Mais au-delà de "l'exploitation des flexibilités existantes", le discours sur la rigueur budgétaire s'est également fait entendre à Aix, par la voix notamment du gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer.
"L'équilibre est fragile, on a accumulé des décennies de déficits et, si la trajectoire budgétaire est laxiste, elle se paiera elle aussi par des taux d'intérêt beaucoup plus élevés", a-t-il expliqué.
Mais les récentes élections européennes, marquées par une forte hausse des partis populistes et eurosceptiques, ainsi que la constitution d'une nouvelle commission, ont donné l'occasion au chef du gouvernement italien, Matteo Renzi, de plaider en faveur d'une meilleure utilisation de la "flexibilité" permise par les règles budgétaires européennes, afin de relancer les investissements en faveur de la croissance.
Son prédécesseur, Enrico Letta, a également demandé du changement à Bruxelles. "Le temps est venu d'entamer une discussion au niveau européen entre ceux qui pensent que la croissance est un enjeu uniquement national et ceux qui pensent qu'il s'agit d'un enjeu européen", a-t-il affirmé samedi 5 juillet.
"Il est impossible de demander en même temps aux États des coupes budgétaires et des investissements", a prévenu M. Letta.
AFP/VNA/CVN