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Des clients attendent à l'entrée d'une épicerie qui vend aussi des fleurs à Paris, le 17 avril. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Sous l'enseigne "Dandelion" dans le quartier Belleville du nord de la capitale, ils préparent des bouquets à la commande. Après le 16 mars, leur magasin est resté fermé un mois entier comme tous les commerces jugés non essentiels afin de lutter contre l'épidémie de COVID-19. Oubliées pour l'instant les cascades de fleurs multicolores sur les trottoirs devant les boutiques des fleuristes, un marqueur de la vie parisienne. La leur s'est transformée en atelier. Les clients ne sont pas autorisés à entrer. Certains passent quand même une tête à la porte pour prendre leur bouquet.
Comme Ylva et Antoine, près de 20% des 14.000 fleuristes français se sont réinventés en livreurs, indique la Fédération française des artisans fleuristes (FFAF) : une activité loin de compenser les pertes qui menacent la survie de nombre d'entre eux. "Je suis contente de voir un peu d'argent qui rentre dans l'entreprise, même si c'est une partie infime" du chiffre d'affaires d'avant, dit Ylva. "C'est rassurant, cela nous montre que les gens sont là et aiment toujours autant nos fleurs".
"Après un mois d'arrêt, nous sentons depuis cette semaine que les Français ont besoin de reprendre un semblant de vie normale, ce n'était pas le cas il y a 10 jours et c'est très encourageant", confirme Florent Moreau, président de la FFAF, installé à Saint-Laurent-sur-Sèvre (Vendée). La plate-forme Interflora a averti ses clients cette semaine que des fleuristes volontaires assuraient désormais des livraisons dans Paris et dans les départements de la petite couronne.
Dans le sud de la capitale, H, fleuriste lui aussi transformé par la crise en livreur, maugrée contre les plate-formes comme Interflora, accusées de "ponctionner des marges énormes". "Je préfère prendre les commandes moi-même et livrer directement mes clients" dit-il en requérant l'anonymat. "Il faut essayer de sauver la saison". Avec sa camionnette blanche, il sillonne les rues de Paris. Le lilas embaume, les pivoines explosent. Du réconfort après quatre semaines de confinement. "Un client était tellement heureux de me voir qu'il m'a donné un pourboire de 10 euros pour un bouquet à 20 euros", se rappelle-t-il, tout sourire malgré un regard fatigué.
"Un vrai drame"
La Fédération estime les pertes des fleuristes français depuis la fermeture des magasins à près de 200 millions d'euros.
Une cliente choisit des plantes à l'extérieur d'un supermarché à Paris, le 17 avril. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Côté producteurs, la perte est estimée à 360 millions par la Fédération nationale des producteurs horticulteurs pépiniéristes (FNPHP). Des tonnes de tulipes, de gerberas ou de géraniums sont partis à la benne : "un vrai drame" pour la filière végétale, a concédé jeudi le ministre de l'Agriculture devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale.
Pour les fleuristes, "nous demandons trois choses au ministère de l'Économie", énumère M. Moreau : "une annulation de nos charges pour la période de fermeture puisque nous n'avons eu quasiment aucun chiffre d'affaires, une autorisation d'ouverture anticipée des magasins à compter du 1er mai qui est une date symbolique forte pour les fleuristes car c'est le jour du muguet, et l'interdiction des ventes à la sauvette de muguet ce jour-là". Sur ce dernier point, les fleuristes semblent avoir obtenu satisfaction. Le ministre de l'Agriculture a indiqué devant les députés qu'il n'y aurait "pas de vente à la sauvette" de muguet cette année.
Au sortir de cette crise historique, Antoine, le fleuriste de Belleville, a quand même un espoir : "la clientèle prend de plus en plus conscience que les fleurs viennent de très loin et qu'on peut acheter localement. Et il commence à y avoir de nouveaux producteurs qui s'installent en Île-de-France. Si cette crise peut aider à accélérer une prise de conscience en ce sens-là, nous serions très contents".