Partager votre table avec un inconnu est la règle dans le restaurant Ho Hung Kee à Hong Kong. Photo : AFP/VNA/CVN |
Des dizaines de personnes font la queue tous les midis devant les portes de ce minuscule restaurant à Hong Kong (Chine). Comme d’autres dans ce territoire du Sud de la Chine, cette échoppe qui ne paye pas de mine est étoilée au Michelin et permet de se régaler pour l’équivalent de quelques euros.
Comme d’autres centaines de petits établissements à Hong Kong, appelés «cha chaan teng» (cantines à thé) dans le dialecte local, ce restaurant modeste sert des plats simples à base de nouilles et de riz : les nouilles aux wontons (sorte de raviolis à la pâte fine, fourrés habituellement de porc et de crevettes), ou encore le congee, un porridge à base de riz servi avec un accompagnement.
La salle peut accueillir une cinquantaine de clients (en se serrant bien). Partager sa table avec un inconnu est la règle. Les cuistots démarrent la journée très tôt, préparant les crevettes et les enveloppant dans la pâte à wonton, pour servir le millier de clients quotidiens de ce restaurant familial, qui a vu le jour dans les années 40 en tant que simple stand de rue. Il a déménagé dans du «dur» en 1964.
La propriétaire actuelle, Patty Ho, est la belle-fille des fondateurs. Elle n’a jamais varié des recettes originales car elle veut que ses clients connaissent l’expérience d’«une culture culinaire traditionnelle». «Les restaurants modernes ont modifié la façon de préparer les wontons, en n’utilisant par exemple que des crevettes. Mais nous gardons la recette originale, qui comprend du porc, ce qui donne une saveur mœlleuse», déclare la patrone. Pour elle, c’est ce respect des traditions qui lui vaut son macaron.
«La nourriture est exceptionnelle»
Un chef de cuisine prépare les repas. Photo : AFP/VNA/CVN |
En 2011, lorsqu’ils ont appris que le Michelin leur avait accordé une étoile, les salariés du Ho Hung Kee ont sauté de joie. «Qu’un petit restaurant comme le nôtre ait reçu une étoile Michelin... J’avais le sentiment que c’était la reconnaissance d’une tradition culinaire propre à Hong Kong», se souvient Patty Ho.
«J’ai vu la queue devant le restaurant, j’ai regardé le menu, toutes des spécialités de Hong Kong, et j’ai donc voulu essayer», déclare Jordan Mok, un citadin trentenaire, qui prend place à l’intérieur. «Les wontons, le congee, le jarret de porc... toutes des spécialités de Hong Kong et de la province du Guangdong (Sud)».
Le «Tim Ho Wan», lui aussi établissement très modeste étoilé par le Michelin, propose un panier de dim sum, ces bouchées cantonaises, pour un prix compris entre 3 et 5 euros. «Pang’s Kitchen», un autre «une étoile» à petits prix, s’adresse aux estomacs cantonais: intestins de poissons grillés et soupe de serpent au menu, des mets prisés dans la région. Manger étoilé à tout petit prix, «si j’en crois mon expérience, c’est possible uniquement à Hong Kong», déclarait Michael Ellis, directeur international des guides Michelin, à l’occasion de la présentation du guide Hong Kong/Macao en décembre.
«Le cadre n’est sans doute pas l’équivalent d’un restaurant une étoile en Europe: il faut parfois faire la queue, se retrouver à l’étroit dans une toute petite salle et rincer ses baguettes dans un bol d’eau chaude», ajoutait-il. «Ce n’est pas très chic» mais «la nourriture est exceptionnelle». Hong Kong est l’endroit «le moins cher» dans «l’univers étoilé» Michelin des restaurants, selon lui. Les cuisiniers savent «porter de la nourriture très humble à un niveau étoilé». Le Michelin fera-t-il tourner la tête de ces simples échoppes? Ho Hing Kee a ouvert une autre branche dans un centre commercial tout neuf, pour répondre à l’afflux des clients étrangers. La sélection est plus vaste mais les prix identiques à ceux pratiqués dans la petite boutique originelle, assure Patty Ho.
AFP/VNA/CVN