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À Capitol Carbonic, à Baltimore, le 20 novembre. |
C’est alors que le téléphone a sonné. Au bout du fil, c'était Pfizer. En quelques minutes et après des va-et-vient ayant suivi ce premier contact, la PME familiale se retrouve plongée dans la campagne de vaccination la plus rapide de l'histoire. Le géant mondial de la pharmacie était en quête de la neige carbonique que Capitol Carbonic extrait depuis six décennies d’une machine ressemblant à un outil de fabrication de pâtes dans un entrepôt de Baltimore, dans le Maryland.
Cette glace sèche permet de conserver à de très basses températures les doses du vaccin co-produit par Pfizer et la société allemande BioNTech pour prévenir le COVID-19.Les autorités américaines doivent se prononcer la semaine prochaine sur la demande d’autorisation déposée par Pfizer/BioNTech. En cas de feu vert, ce serait le début d’un énorme défi logistique dans lequel les fabricants de neige carbonique, comme Capitol Carbonic, vont occuper un rôle central.
"Nous n'avons jamais vécu quelque chose comme ça dans l'histoire de l'administration d’un vaccin aux États-Unis", souligne Omar Chane, consultant chez PwC. "Nous sommes prêts, nos réservoirs sont pleins", assure Brian Gallizzo, le directeur financier de Capitol Carbonic. Pfizer et BioNTech envisagent de distribuer 6,4 millions de doses de leur vaccin dès le feu vert attendu peu après le 10 décembre et des millions de doses supplémentaires d’ici la fin du mois.
Loin de la fourchette habituelle de 2° à 8°C - similaire à celle d’un réfrigérateur - nécessaire pour des doses de vaccins antigrippaux, ce vaccin ne devra pas être exposé à des températures supérieures à -70°C pour garantir son efficacité.
Neige carbonique
Les boîtes d’expédition des doses seront remplies de glace sèche, une substance obtenue à partir du dioxyde de carbone solidifié qui se transforme en gaz aussi vite qu’il est produit. Dans son entrepôt qui fait la taille d’un terrain de basket, Capitol Carbonic en fabrique des dizaines de milliers de tonnes par jour. Cette neige carbonique fabriquée au son des hurlements de machines est conditionnée par taille allant de la plus grosse, comme un bloc, à la plus petite, comme un grain de riz.
Dans cet éventail, on trouve la pastille qui intéresse Pfizer, qui a créé des containers spéciaux pour maintenir une température très basse avec de la glace sèche pendant 15 jours. Mais pour cela, seules deux brèves ouvertures par jour du colis seront autorisées. Une permission a été obtenue auprès de l’aviation civile afin d’augmenter la quantité de neige carbonique transportable par voie aérienne, la sublimation - passage de l’état solide à gazeux - pouvant être dangereuse pour l’équipage.
Fabriquer ou produire de la neige carbonique n’est pas chose aisée. "La nature même de la glace sèche est que, aussitôt que vous en fabriquez, elle commence à s’évaporer", reconnaît John Dillinger, l’administrateur général de Capitol Carbonic. "Que se passe-t-il si une (pharmacie) CVS ou Walgreens en reçoit et qu’après onze jours leur boîte n’en a plus ?".
Année sans précédent
Pendant les mois qui ont précédé l’appel de Pfizer, Capitol Carbonic avait connu une année contrastée. D’une part la demande pour la glace sèche avait flambé, alimentée par un bond des commandes en ligne de denrées alimentaires par des consommateurs confinés chez eux. De l’autre, il y avait une pénurie de dioxyde de carbone, qui est extrait de produits pétroliers raffinés, comme l'essence.
"Cette année est sans précédent", résume Brian Gallizzo, enthousiaste à l'idée de prendre part à une aventure au retentissement planétaire. Il assure que l’industrie de la glace sèche saura faire face à la demande mais ne peut en dire autant des autres acteurs de la chaîne d’approvisionnement. "Le défi va être de savoir comment nous faisons parvenir le vaccin aux clients", avance-t-il.
Si d'autres vaccins fabriqués par les concurrents de Pfizer pourront être stockés dans un congélateur normal, des experts disent qu'il n'est pas exclu qu’on ait recours à de la glace sèche aussi pour les garder froids pendant le transport. "Chaque fois qu’ils seront déplacés par un responsable, la température ambiante sera plus chaude, ce qui aura un impact sur la température de la boîte", dit Glenn Richey, professeur en gestion de la chaîne d'approvisionnement à l’université Auburn.
AFP/VNA/CVN