Énergie : recherche capitaux désespérément

Bien que considéré par les experts mondiaux comme l'un des 10 pays les plus potentiels en matière énergétique, le Vietnam doit actuellement faire face à un manque d'énergie imputable à une pénurie de fonds. Attirer les capitaux dans ce secteur se révèle en effet problématique.

Analyse et réflexions de différents acteurs sur ce dossier crucial pour le développement du pays.

Ces dernières années, le Vietnam est devenu un important producteur de pétrole et de gaz naturel à l'échelle régionale. Il a su augmenter sa production en réformant son marché pour accélérer sa stratégie énergétique nationale.

Cependant, la consommation énergétique nationale n'a cessé de croître en raison d'une forte croissance économique. Selon les prévisions de Saranya Skontanarak, représentante de la Banque britannique Standard Chartered, en 2011, le Vietnam pourrait devenir un pays importateur d'énergie car l'augmentation de sa demande se révèle plus élevée que la Chine ou l'Inde. Aussi, "faut-il promouvoir les investissements pour ne pas pénaliser le développement socio-économique du pays", préconise-t-elle.

La Stratégie nationale de développement énergétique à l'horizon 2020 et perspectives pour 2025, approuvée fin 2007 par le Premier ministre Nguyên Tân Dung, s'est fixé des objectifs concrets à atteindre pour garantir une fourniture suffisante d'énergie. À savoir : environ 47,5-49,5 millions de tonnes d'équivalent pétrole (TEP) d'énergie primaire en 2010 et 310-320 millions de TEP en 2025. Pour cela, il faut rehausser la précision de l'évaluation des sources d'énergie primaire (charbon, pétrole-gaz, hydroélectricité et uranium). Il s'agit aussi d'élargir la coopération extérieure dans la recherche, la prospection et l'exploitation du charbon, du pétrole et du gaz, ainsi que d'autres sources d'énergie à l'étranger pour compléter les sources énergétiques nationales insuffisantes. De plus, il importe de développer le réseau électrique national pour que sa fiabilité atteigne 99,7% en 2010. Par ailleurs, il est nécessaire de porter le taux d'énergies nouvelles et renouvelables à environ 3% de la production totale des énergies primaires à des fins commerciales en 2010, à 5% en 2020, puis à 11% en 2025. En outre, il faut achever le programme énergétique en zones rurales et montagneuses, qui prévoit notamment que 50% des familles utilisent des énergies commerciales pour faire la cuisine en 2010, et 80% en 2020. Par ailleurs, environ 90% des familles paysannes devraient avoir accès à l'électricité en 2010 et presque la totalité en 2020. La stratégie prévoit également l'élaboration d'objectifs et de normes à long terme en matière d'environnement, conformes aux normes régionales comme mondiales, ainsi qu'aux conditions économiques du pays. À cet effet, l'autre priorité sera de contrôler et d'atténuer la pollution de l'environnement dans les activités énergétiques afin qu'en 2015, tous les ouvrages énergétiques répondent aux normes environnementales. En plus, il importe de restructurer les secteurs de l'électricité, du charbon et du pétrole en les orientant vers un mécanisme de marché concurrentiel, sous la régulation de l'État.

Cette stratégie de développement énergétique nécessitera de gros investissements auxquels les entreprises nationales ne peuvent pas répondre entièrement. C'est pourquoi, "le Parti et l'État encouragent toujours dans ce secteur l'investissement étranger et la promotion de la coopération internationale pour mobiliser des capitaux, dans l'immédiat comme sur le long terme", insiste Lê Tuân Phong, chef adjoint du Département des énergies du ministère de l'Industrie et du Commerce.

Conformément à la Planification 2006-2015 de développement de l'électricité, et perspectives pour 2025 (dite Schéma directeur électrique VI), ce secteur nécessiterait environ 80 milliards de dollars d'investissement, dont le groupe Électricité du Vietnam (EVN) ne pourrait assurer que la moitié. Alors, où trouver les quelque 40 milliards de dollars qui manquent ? "Un vrai casse- tête!", avoue sans ambages Ðâu Ðuc Khoi, directeur général adjoint d'EVN.

Un manque de 40 milliards de dollars à combler

Selon lui, la pénurie d'électricité ces derniers temps résulte d'un investissement trop lent dans ce secteur, avec comme cause principale le manque de fonds. Actuellement, le prix moyen de l'électricité au Vietnam est autour de 5 cents/kWh, très inférieur aux 17-18 cents appliqués au Cambodge, "ce qui n'incite pas les investisseurs étrangers à injecter des capitaux dans ce secteur", explique-t-il.

Ce point de vue est partagé par Ðô Huu Hào, vice-ministre de l'Industrie et du Commerce. "La plus grande difficulté pour le développement énergétique du Vietnam est que le prix de l'électricité n'est pas indexé sur le prix du marché, voire est bien inférieur à celui-ci, estime-t-il. Il est même actuellement le plus bas de la région grâce aux subventions budgétaires". Selon la grille tarifaire progressive appliquée depuis des années, le prix unitaire pour la première tranche (=<50 kWh) est considéré comme subventionné et s'applique à toute la population. Le prix de vente pour la 2e tranche, comprise entre 51 kWh et 100 kWh, est équivalent au prix de revient, et c'est seulement la 3e tranche (> 100 kWh) qui dégage des bénéfices.

Alors, pour Ðâu Ðuc Khoi, il est nécessaire de se régler sur le prix du marché de l'électricité. Car "si le coût de l'électricité n'évolue pas, nous n'aurons jamais assez d'argent pour réinvestir dans ce secteur", renchérit-il.

D'après lui, afin de remédier à cette situation, il faut diversifier les sources de capitaux, dont la plus importante est l'investissement étranger. Mais "c'est seulement lorsque le prix de l'électricité atteindra les 7-8 cents/kWh qu'il pourra attirer des investisseurs étrangers", prévoit-il. Et d'ajouter que si la situation actuelle perdure, la pénurie d'électricité durera jusqu'en 2015-2020 car les projets en cours d'exécution ne pourront s'achever qu'à ce moment-là, faute de fonds.

Toujours selon M. Khoi, la grille tarifaire actuelle, si elle était rationnelle il y a 10 ans, n'est plus opportune. À ses yeux, le gouvernement devrait la réexaminer en distinguant les divers types de consommateurs. Par exemple, la subvention de la première tranche (=<50 kWh) ne vaut pas grand-chose pour les familles dont la facture d'électricité mensuelle atteint les 30 millions de dôngs, alors qu'elle est inadaptée aux familles rurales qui ne consomment en général que 20 kWh au maximum chaque mois.

Pour sa part, Trân Viêt Ngai, président de l'Association des énergies du Vietnam, estime que celle-ci proposera au gouvernement de supprimer la grille tarifaire progressive. Concrètement, les personnes bénéficiaires de politiques sociales, les pauvres, les personnes à bas revenus, les élèves et étudiants devraient jouir de tarifs préférentiels, tandis que les autres devraient payer leur facture d'électricité selon le prix du marché.

À ce propos, d'après le vice-ministre Ðô Huu Hào, le gouvernement envisage une feuille de route pour tarifer l'énergie selon le mécanisme de marché.

Cependant, pour les investisseurs, l'ouverture le plus tôt possible du marché de l'électricité constituera la meilleure solution pour pallier cette crise électrique. "Car si le monopole de l'État dans la production électrique se maintient, la pénurie s'aggravera", conclut-il.

* Une source d'énergie primaire est une forme d'énergie disponible dans la nature avant toute transformation.
* 1 TEP = 41,855 gigajoules (GJ) (parfois arrondi à 42 GJ) = 11,628 MWh = 1.000 m3 de gaz = 7,33 barils de pétrole.

Hông Nga/CVN

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