L’appétit d’ogre de Phùng Van Lu

Malgré ses 45 kg, Phùng Van Lu est capable de manger une quantité astronomique de nourriture. Autour de chez lui, on le surnomme «Trang an» (Le jamais rassasié). Rencontre avec un phénomène.

Phùng Van Lu vit dans le village de Tang Câu, district de Ba Vi, Hanoi. Avant de le rencontrer, on s’imagine un homme de grande taille, costaud, «bien portant» comme on dit. Quelle surprise de découvrir un petit homme de 45 kg, chenu, d’allure plutôt chétive. Les apparences sont parfois trompeuses.

Phùng Van Lu, surnommé «Le jamais rassasié».

Nous le regardons prendre son repas : vingt trung vit lôn (œufs de canard fécondés) à la suite, agrémentés d’une dizaine de bols de riz, d’un bouillon de soupe, de légumes… À la fin, il nous montre son ventre, qui a pris un volume imposant. On le surnomme «Trang an», le jamais rassasié.

Un appétit d’ogre depuis l’enfance

Le petit Lu est né dans une famille aisée. Elle possédait, en effet, plus de 30 mâu de rizières (1 mâu = 360 m²), des dizaines de buffles, de cochons. Le gamin n’a jamais manqué de nourriture ni de vêtements. Il avait même un vélo, ce qui à l’époque était assez exceptionnel. Parce que l’école était loin de chez lui, ses parents lui louèrent un petit logement. Bien que ses parents lui donnaient suffisamment de nourriture et d’argent chaque mois, le petit ne cessait de piailler pour avoir plus de riz. Pour ses petits camarades, c’était déjà un phénomène.

«À 14 ans, j’enchaînais déjà les bols de riz. Un jour, devant des amis, j’ai avalé 20 œufs, 20 bols de riz et bu des litres d’eau. Cela les a surpris, explique fièrement Phùng Van Lu. Durant ma jeunesse, pendant la guerre, j’ai fait beaucoup de petits métiers. Cette période de vaches maigres a été très pénible pour un gars comme moi, dont le ventre ne cesse de crier famine !»

Manger 30 glaces avant le repas

À 75 ans, Phùng Van Lu s’exerce toujours aux arts martiaux qu’il a appris durant son service militaire.
Photo : ST/CVN

En 1960, comme d’autres jeunes, Lu entre dans l’armée. Les rations de guerre ont bien du mal à le contenter. «Quand j’avais faim, je partais en forêt chercher des légumes et tubercules», raconte-t-il. En 1967, une fois démobilisé, il retourne dans son village natal. En 1971, il se marie avec une villageoise. Après la réunification du pays, l’économie a du mal à se relever, lui et son épouse doivent travailler d’arrache-pied pour subvenir à leurs besoins. «Chaque mois, nous avions de trente à quarante kilos de riz, mais cela était insuffisant. Je devais partir à Lào Cai, Yên Bai pour chercher du travail. La faim ne cessait de me tarauder», confie-t-il.

Phùng Van Lu garde un souvenir en tête. En 1995, Nguyên An Duyên, président de la coopérative de Dông Thai, lui lance un défi : manger 30 glaces avant le repas. «L’affaire était réglée en quelques minutes. Après ça, j’ai bu des dizaines de chopes de bière et mangé normalement. Tout le monde était effaré», s’amuse-t-il encore.

Inutile de le préciser, Lu se porte comme un charme. Durant sa jeunesse, il a plusieurs fois été champion de lutte de son village. C’est durant ses années sous les drapeaux qu’il a appris les arts martiaux. À 75 ans, sa santé n’a rien à envier à celles des jeunes villageois. Il bêche et fend du bois comme un trentenaire.

Fort comme un Turc

En 1996, à l’occasion de la réfection de la nationale 32, les ouvriers devaient couper un grand caïlcédrat (Khaya senegalensis), en quatre tronçons de 2 m chacun. Phùng Van Lu leur donna un coup de main pour déplacer les billes de bois. «Si vous pouvez en porter une sur les épaules pour rentrer chez vous (plus de deux kilomètres, ndlr), on vous la donne», lui lança M. Duc, chef des ouvriers. M. Lu demanda à deux ouvriers d’en poser une sur ses épaules et rentra chez lui d’un pas vigoureux, sans tituber.

Phùng Van Lu et son épouse vivent dans une maison cossue de plusieurs centaines de mètres carrées. La période de vaches maigres n’est plus qu’un lointain et mauvais souvenir. Chaque matin, M. Lu jardine et s’occupe de son étang de pisciculture. «Mon épouse va rarement au marché parce que nous avons ici tout ce dont nous avons besoin. Et malgré mon âge, je n’ai jamais mis les pieds au dispensaire communal, bien qu’il soit à un pâté de maison», avoue-t-il. Et d’ajouter : «Maintenant, je suis vieux. Je réduis un peu ma ration alimentaire. Une dizaine de bols de riz, ça me suffit désormais».

«Depuis que je travaille ici, jamais je n’ai vu Phùng Van Lu. J’ai entendu dire qu’il mange beaucoup, mais il n’est pas bien gros à ce qui paraît. Pour expliquer cela, deux possibilités à mon avis : une vie très active, qui nécessite un important apport calorique, ou bien un organisme très sec, qui ne retient rien», estime M. Niên, médecin chef du dispensaire communal de Dông Thai.

Quê Anh/CVN

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