Une mère et ses deux éléphanteaux à un point d’eau dans le parc de Hwange. |
«Hwange est l’une des zones les plus chaudes du pays», relève Edwin Makuwe, chercheur associé à la direction des parcs nationaux du Zimbabwe, expliquant pourquoi des pompes doivent amener l’eau dans cette vase étendue de 14.600 km2 de juin à novembre.
Une cinquantaine de moteurs, consommant chacun 200 litres de diesel par semaine, sont utilisés pour abreuver les pachydermes. Le système semble fonctionner. Les autorités du parc n’ont recensé que 17 éléphants morts de déshydratation depuis le début de l’année, contre 77 l’an dernier.
«Je pense que les éléphants savent maintenant que quand ils entendent un moteur en marche, il y a des chances qu’il y ait de l’eau à proximité», plaisante M. Makuke. «Les éléphants boivent près de 90% de l’eau (pompée) ici», laissant le reste aux autres animaux, constate-t-il.
«C’est le pire moment de l’année pour les éléphants et nous avons encore un mois avant l’arrivée des pluies», souligne Tom Milliken, en charge des éléphants et des rhinocéros à l’organisation environnementale WWF. Les éléphants souffrent de stress à cause des pénuries d’eau à cette période de l’année, ajoute-t-il.
Mais en apportant l’eau, on sauve des éléphants, mais on contrarie peut-être le cours de la nature. Après avoir été décimée pendant des décennies pour le commerce de l’ivoire, aujourd’hui interdit, les éléphants sont désormais une espèce protégée, avec des mesures si efficaces que les populations sont en plein essor en Afrique australe, au risque de menacer les écosystèmes.
Deux fois trop d’éléphants
Selon la direction du parc, la population d’éléphants a trop augmenté à Hwange ces dernières années, pour atteindre entre 35.000 et 40.000 individus, deux fois sa capacité.
Des pompes doivent amener l’eau dans cette vase étendue de 14.600 km2 de juin à novembre. |
Le nombre de pachydermes pèse sur les ressources en eau, mais aussi sur l’ensemble de l’écosystème du parc, qui abrite plus de cent espèces animales différentes, dont les fameux «Big Five» : lion, léopard, buffle, rhinocéros et éléphant.
«Les éléphants sont tellement actifs que la végétation a été dégradée. Les arbres n’ont plus une croissance aussi rapide qu’ils le devraient, ils produisent moins de graines. À long terme, cela aura un effet négatif sur tout l’habitat de Hwange», note Edwin Makuwe.
Ces éléphants trop nombreux sont notamment accusés de décoller les écorces des arbres et de déterrer les racines pour se nourrir.
«La savane africaine est censée être une mosaïque d’arbres et d’herbes. Dès que vous commencez à avoir davantage d’herbages que d’arbres, elle ne fonctionne pas comme la savane africaine : si vous perdez les arbres, il n’y a plus que des prairies, et certaines espèces seront définitivement perdues», selon l’expert.
Les petits animaux et les insectes qui vivent dans les arbres sont notamment menacés de disparition. Les autorités en sont encore à chercher une solution.
«Certains préconisent de laisser la nature suivre son cours. (...) Mais jusqu’à présent, nous n’avons pas encore trouvé la méthode pour convaincre tout le monde d’accepter de faire baisser la population» d’éléphants, constate M. Makuwe.
Car, au moment où les touristes qui ont boudé le pays pendant la grande crise des années 2000 commencent à revenir, se mettre à abattre la principale attraction du plus grand parc national du pays n’est pas une perspective vraiment emballante.
Des opérateurs touristiques tels que Wildlife and Environment Zimbabwe (WEZ), Wilderness Safaris et Matupula Safari ont d’ailleurs offert du diesel à la direction du parc de Hwange pour faire fonctionner les pompes à eau.
AFP/VNA/CVN