Un sapotillier de 10 m de haut ? En 3 minutes, la fringante octogénaire est au sommet. Là-haut, avec une perche en bambou, elle saisit les fruits qu'elle dépose ensuite dans un grand sac fixé à la ceinture. Dans le village campagnard où elle vit, ses exploits sportifs en inquiètent plus d'un. Mais, pour elle, pas la peine d'"en faire un fromage" de cette affaire-là. "Franchement, j'aime bien cueillir les fruits. Rassurez-vous, il n'y a aucun danger. L'important, c'est de toujours rester calme", explique-t-elle.
Nguyên Thi Lan vit dans le bourg de Nam Ðàn, province de Nghê An (Centre). Svelte, visage vermeil et souriant, la vieille dame respire la santé. Son agenda quotidien est des plus chargés. Marché le matin où elle écoule ses fruits cueillis la veille et achète le nécessaire pour le repas familial du midi, qu'elle prépare elle-même. Après le déjeuner, cueillette. Vers 15h00, jardinage. Et le soir, après avoir fait la cuisine, elle s'occupe de ses petits-enfants et prépare les fruits pour le marché matutinal du lendemain. Encore une chose surprenante : l'inusable grand-mère roule à vélo, qu'elle charge souvent de paniers de fruits.
Des nerfs d'acier et le pied sûr
Dans le jardin de la maison familiale poussent des dizaines d'arbres fruitiers tels que sapotilliers, longaniers, caimitiers (pomme étoilée), pommiers..., tous hauts de 5 à 10 m. Le terrain de jeu depuis 20 ans de cette dame paysanne. Jamais elle n'a chuté. Jamais non plus une branche n'a cédé sous son poids.
"Autant que je m'en souvienne, j'ai toujours aimé grimper aux arbres. Quand j'étais gamine, mes parents élevaient des cerfs. Et j'allais tous les jours en forêt chercher des feuilles pour les nourrir. À 13 ans, je pouvais déjà grimper sur des arbres très hauts. Et je me sentais fière devant les garçons", confie l'octogénaire avec un sourire malicieux.
Son mari, Nguyên Van Nghi, ne cache pas son admiration : "Vraiment, ma femme est une sacrée grimpeuse. Depuis que notre jardin donne des fruits, elle se porte volontaire pour la cueillette. Elle grimpe tous les jours, en dépit de son âge". Sa fille, Nguyên Kim Yên, est moins euphorique : "J'ai toujours le cœur serré quand je vois ma mère là-haut. J'essaie de la dissuader, mais elle ne veut rien savoir". À ceux qui lui disent qu'elle ferait mieux de rester sur le plancher des vaches et de s'occuper de ses salades comme tous les retraités du monde, Mme Lan réplique : "De toutes mes activités quotidiennes, c'est grimper aux arbres que je préfère. Ne vous inquiétez pas. J'ai l'esprit tranquille et le pied sûr".
Pas la peine de préciser que Mme Lan est une célébrité locale. Et presque célébrité nationale depuis que des reportages sur elle sont passés sur le Net. Nguyên Thi Loan, une femme de 60 ans, qui tient un bistroquet au bout du village, confie : "Jamais je n'ai vu quelqu'un grimper aux arbres comme Mme Lan. Un vrai singe. Et puis elle pédale comme un coureur !". Pour sa part, Nguyên Van Cuong, un ado, avoue sur un ton admiratif : "Pour ce qui est de grimper aux arbres, Mme Lan est notre maître à tous". La vieille dame regarde tout ce battage autour d'elle avec un certain détachement. Pour elle, cette hardiesse inhabituelle à un âge aussi respectable s'explique simplement : "J'ai les nerfs solides. C'est ce qui me donne de la force et de la confiance en soi".
Nghia Ðàn/CVN
(14/08/2009)