Une formation pour développer la médecine légale au Vietnam

L’Association humanitaire Vietnam au cœur tisse des liens depuis 15 ans entre la France et le Vietnam. Son fondateur, René Combemorel, nous a accordé une entrevue, pour parler notamment du projet de développer la médecine légale au Vietnam.

>>De Marseille au Vietnam, une amitié toujours plus vaste

Le Dr René Combemorel et son épouse.

Vous avez fondé l’association humanitaire Vietnam au cœur. Pouvez-vous nous en expliquer les raisons ?

L’Association a été crée d’abord et suite à la découverte de ce beau pays, et ensuite par amour du Vietnam. Les premiers temps, notre association n’avait que des médecins Marseillais. Puis, de nombreux amis de différentes villes comme Paris et Lyon se sont joints à moi pour que nous mettions en commun nos savoir-faire et nos compétences afin d’aider le Vietnam. C’est pourquoi nous avons décidé de changer le nom de l’association, qui était au départ Amitié Marseille Vietnam.

Quel bilan tirez-vous après quinze ans d’activités ?

Le bilan est très positif et riche, avec des amitiés solides forgées dans les différents hôpitaux comme Bach Mai, Viêt Duc, l’Institut de cardiologie du Vietnam, ainsi que l’Hôpital Saint Paul. Les liens professionnels sont devenus des liens personnels d’amitiés forts et dévoués. On a la satisfaction d’avoir mis en place en sept ans toute une formation en chirurgie du rythme cardiaque, en chirurgie cardiothoracique, et accompagnés nos amis Vietnamiens  pour qu’ils deviennent à leur tour des formateurs, nous avons développés un projet de greffe du cœur, de même pour l’orthopédie et la chirurgie vasculaire. Nous avons maintenant la venue dans les hôpitaux vietnamiens d’étudiants français en rééducation effectuant ainsi leurs stages obligatoires de six semaines, portant ainsi le développement de  la rééducation peu connue actuellement.

L’objectif de l'Association est de former des praticiens vietnamiens pour qu’ils deviennent eux-mêmes des enseignants.

Vous avez visité plusieurs fois le pays. Quelles en sont vos impressions ?

J’ai parcouru en effet de nombreuses fois le Vietnam et cela dans tous les sens. Et c’est sans compter le Laos et le Cambodge. Le Vietnam est un pays de gens souriants, désireux d’apprendre et que j’apprécie beaucoup. Dans ses grandes villes telles que Hanoi, Hô Chi Minh-Ville ou ailleurs, je retrouve de très belles architectures et urbanisation typiquement françaises. Sur le plan personnel, mes attaches sont fortes. Ma mère est née à Hanoi, et ma femme est Vietnamienne.

Par l’intermédiaire de votre association, l’Université de médecine de Hanoi a signé un accord de coopération avec celle de Marseille afin de «créer» la médecine légale. Est-ce cela veut dire qu’elle n’existait pas auparavant ?

L’importante différence est que nous sommes là dans une démarche universitaire. Et nous souhaitons appliquer le modèle français, qui est unique et qui est une référence en soi. De là viendra la future médecine légale qui fera autorité dans le cadre de grandes décisions de société.  Et elle sera un outil d’expertise pour la justice, entre autre dans les accidents, les crimes, ou mêmes dans les affaires liées aux pollutions, eau, air, aliments, etc.

Vous parlez d’appliquer un modèle français. Pourquoi s’en inspirer ?

Avant tout, c’est un modèle de médecine légale qui existe depuis plusieurs années, et son application incite la population à un bon usage des choses et à se responsabiliser vis-à-vis des autres citoyens. La France, et c’est très important, offre une procédure claire et précise dans sa justice. Il n’y a qu’un seul endroit où les juges, avec l’aide des médecins experts, rendent leur jugement, limitant dès lors des comportements irresponsables.

Les cours organisés par l’Association Vietnam au cœur ont permis à des médecins vietnamiens d’apprendre beaucoup de leurs confrères français.
Photo : VN au Cœur/CVN

Alors quels sont concrètent les étapes et les grandes lignes de ce projet ?

Pendant les deux premières années, les médecins inscrits suivent des cours durant l’année et ce par visioconférence. Ensuite des professeurs viendront  exprès de France pour assurer certains cours. En troisième année, les élèves auront la possibilité de poursuivre la formation en France, et de revenir par la suite au Vietnam. Ces derniers seront donc certifiés à la fois par les hôpitaux vietnamiens et français, et pourront par la suite exercer le métier de médecin légiste au Vietnam.

Comment adopter ce modèle dans un pays qui a une autre culture et approches ?

Dans tous les pays, une victime est une victime. Il n’y a pas de différence. Si le malheur frappe une mère de famille victime d’un mari violent avec des blessures définitives et graves, il est normal que l’agresseur soit puni. Quelle que soit la culture de même que si votre enfant est tué par un motard qui a trop bu, il est normal que l’assassin de votre enfant soit puni ou que si votre enfant est handicapé ou paralysé il paye les conséquences de son acte. Il n’y a pas de hiérarchie quand on parle de responsabilité. Il faut voir cela comme un bienfait et une amélioration des pratiques. La loi va s’adapter à ces temps nouveaux, en suivant l’évolution de la société vietnamienne ell même en constante progression.

Quelles qualités sont requises pour être médecin légiste ?

Il faut avoir un sentiment élevé de la charge. Ces médecins, qui ne le seront plus dans le sens habituel du terme, deviendront des experts associés à la justice.

Une dernière question. Quels sont vos futurs projets ?

Mon premier but est bien entendu d’amener à bien ce long et difficile projet pour la plus grande satisfaction de ceux qui nous ont confié cette mission. Sachez aussi qu’en novembre prochain nous serons à l’hôpital Bach Mai pour cette fois de la chirurgie cardiaque, et qui est le fruit une collaboration très étroite menée depuis sept ans. Nous avons reçus et formés des praticiens vietnamiens devenus par la suite eux-mêmes des enseignants, grâce aux soutient de l’Institut de cardiologie du Vietnam et de la société vietnamienne de cardiologie. De plus, nous serons également à l’hôpital Viêt Duc pour un congrès  d’orthopédie.

Phuong Nga/CVN

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