>>Les baleines bleues préfèrent ne pas prendre de risques
>>Découverte d'un crustacé géant au large de la Nouvelle-Zélande
Image fournie par le CNRS le 9 octobre montrant un "Tethysbaena ledoyeri", crustacé de 2 à 3 mm découvert près de Marseille. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Mesurant à peine deux à trois millimètres, le crustacé habite les eaux saumâtres d'une rivière souterraine du parc national des Calanques, à environ un kilomètre des côtes méditerranéennes.
Baptisé "Tethysbaena ledoyeri", il évolue dans un milieu hostile, totalement obscur, entre des parois calcaires recouvertes de vase argileuse où ne pousse aucun végétal.
Dépourvu d'yeux, le crustacé se déplacerait dans l'obscurité grâce à un odorat très fin et au toucher, a détaillé Pierre Chevaldonné, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) en biologie et en écologie marine, à l'origine de cette découverte.
L'animal se nourrit de bactéries et peut "pratiquement jeûner" pendant de longs mois, a-t-il ajouté.
Les eaux souterraines sont peu explorées des scientifiques, car difficiles d'accès, ce qui explique l'identification tardive du crustacé, vingt ans après les premières observations réalisées dans les années 1990 par les spéléologues.
"Jusqu'en 2003, l'unique spécimen récolté était trop endommagé pour permettre de décrire l'espèce", explique Pierre Chevaldonné, dont les explorations ont débuté à ce moment-là.
Une vingtaine d'années plus tard, en 2019, il prélève l'échantillon qui lui permettra de formaliser la découverte, avec son homologue néerlandais, le biologiste H.P. Wagner, spécialiste de ce groupe d'espèces.
Le crustacé est finalement décrit en septembre 2020 dans la revue scientifique Crustaceana.
Situé dans une zone d'étroites criques rocheuses baignées par la Méditerranée, le parc national des Calanques s'est réjoui de cette découverte sur son territoire. "Le parc est un milieu très scruté et arpenté. Pourtant, nous continuons d'être surpris". D'autant que l'espèce pourrait être endémique, selon le chercheur.
La découverte de ce crustacé vient compléter un groupe d'espèces encore mal connu des scientifiques. Il s'agit de l'ordre taxonomique des Thermosbaenacés, évoluant dans des eaux souterraines, difficiles d'accès.
Le groupe ne compte pour l'heure que 37 espèces différentes dans le monde, dont aucune identifiée jusque-là en France. "C'est comme si je vous disais qu'on a découvert pour la première fois une espèce de chauve-souris en France", note Pierre Chevaldonné.
Cette découverte pourrait également en amener d'autres. Pierre Chevaldonné s'interroge actuellement sur une puce de mer, qui pourrait être un prédateur du crustacé.