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L'Hôtel Salé, dans le quartier du Marais, "est un endroit magique, un des plus beaux hôtels particuliers de France, les volumes sont extraordinaires et vraiment adaptés à l'œuvre de Picasso", souligne Laurent Le Bon, nouveau directeur du musée.
Oubliés les retards d'ouverture, la dégradation du climat social, la grave crise interne qui a conduit au limogeage de l'ancienne directrice, Anne Baldassari : l'heure est à la célébration d'un génie et à la redécouverte d'une collection remarquable (4.755 oeuvres), point d'orgue d'une semaine artistique exceptionnelle avec la FIAC et l'inauguration de la Fondation Louis Vuitton.
Un visiteur regarde le tableau "Femmes dans la salle de bain" de Picasso, au musée Picasso rénové, le 18 octobre, à l'Hôtel Salé à Paris, lors d'une visite de presse. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Achevé en 1659 et ainsi baptisé parce que son constructeur, Pierre Aubert, était percepteur de la gabelle, l'impôt sur le sel, l'Hôtel Salé a fait l'objet d'une considérable rénovation conduite par l'architecte Jean-François Bodin et Anne Baldassari : climatisation enterrée dans le jardin, bureaux dans un immeuble mitoyen, combles et caves transformés en lieux d'exposition, hall d'accueil créé dans les anciennes écuries.
Au final, les espaces destinés au public ont plus que doublé, passant de 2.300 m2 (dont 1.600 m2 d'exposition) à 5.000 m2 (dont 3.600 m2 d'exposition), et la circulation a été optimisée. "Il y a beaucoup de fluidité dans le parcours", souligne M. Le Bon.
Le coût de l'opération s'élève à 43 millons d'euros, financés à 65% par le musée lui-même grâce aux 21 expositions de chefs d'oeuvre organisées dans le monde, fait valoir Anne Baldassari. Quant aux retards sur le calendrier et au climat social tendu qui lui ont coûté sa place, elle les conteste, avant de lancer: "C'est du passé, il faut tourner la page".
Picasso en trois parcours
Sur proposition de la ministre de la Culture de l'époque, Aurélie Filippetti, l'ancienne directrice a finalement accepté de procéder à l'accrochage inaugural, à la fois chronologique et thématique, qui vise à "restituer Picasso dans tous ses états".
Elle a conçu trois circuits de visite, dont un parcours magistral sur trois niveaux retraçant l'ensemble de l'œuvre jusqu'en 1972. Les combles sont dédiés à une "confrontation entre Picasso et ses artistes de prédilection", modernes ou contemporains, tels Cézanne, Degas, Matisse, Braque ou Le Douanier Rousseau... Dans les caves, sont évoqués les différents ateliers du maître, et à travers eux son processus de création.
Monochromies, Primitivisme, Cubisme, Peintures de guerre... Les "séquences" et les 37 salles au décor minimaliste s'enchaînent, et avec elles les chefs d'œuvre : l'Autoportrait sur fond bleu (1901), La Célestine (1904), tenancière d'une maison close de Barcelone qui symbolisait pour Picasso la peinture-prostituée, Trois figures sous un arbre (1907-1908).
Plus loin, la Nature morte à la chaise cannée (1912), Paul en Arlequin (1924) inspiré par Velasquez, Goya et Manet, La Danse villageoise (1922), en hommage à Renoir, l'Homme au chapeau de paille et au cornet de glace (1938), portrait de Van Gogh en réponse à Goebbels qui prône la stérilisation des artistes modernes, Femmes nues à leur toilette (1937-38), le plus grand collage de Picasso, réalisé avec des chutes de papiers peints de Guernica....
"Quel que soit le langage, qu'on soit dans le classique, le naturaliste, la représentation ou la figuration, Picasso va toujours plus loin", affirme Anne Baldassari, notant qu'il "peut faire une chose et son contraire". "J'ai voulu montrer les logiques profondes qui guident l'oeuvre au-delà et en deçà des apparences", ajoute-t-elle,
"Avant, on avait tendance à mettre les dessins, les peintures et les sculptures un peu de manière séparée. Là, dans chaque salle, il y a une espèce de mixte entre les médiums", relève encore M. Le Bon.
La collection, qui compte 297 peintures et 368 sculptures, provient de deux dations, celle des descendants de Picasso en 1979, et celle des héritiers de Jacqueline Picasso en 1990.
AFP/VNA/CVN