À l’ère de la musique dématérialisée, la cassette audio rêve d’une nouvelle jeunesse

À une époque où la musique peut être téléchargée à volonté, instantanément et gratuitement sur internet, la vieille cassette audio tombée en désuétude avec l’avènement du CD se refait une jeunesse dans le monde entier.

«Personne, et nous encore moins, ne s’attendait à ce que cela se produise», confie Sean Bohrman, l’un des dirigeants du label californien Burger Records, qui a écoulé 350.000 cassettes depuis sept ans.

Une goutte d’eau dans l’univers de l’industrie musicale, mais qui signe néanmoins le modeste retour d’un support tombé en disgrâce dans les années 1990.

Les cassettes pourraient faire leur grand retour.

À l’instar des événements organisés pour redorer le blason des disques vinyle il y a quelques années, plusieurs dizaines de magasins de disques dans le monde ont célébré récemment le jour de la cassette.

Nostalgiques et nouveaux fans de ces petits rectangles de plastique à bande magnétique ont pu ainsi acheter le dernier opus du groupe indien en pleine ascension Foxygen ou des classiques réédités pour l’occasion comme ceux des rockers They might be giants.

Rares sont ceux néanmoins qui s’attendent à ce que la cassette - réputée pour s’emmêler et avoir des problèmes pour se rembobiner- retrouve son heure de gloire des années 1980. L’an dernier, les cassettes ont représenté moins de 0,1% des 289 millions d’albums vendus aux États-Unis, marché où le CD devance toujours les téléchargements numériques, selon les données de l’institut Nielsen.

Reste que pour M. Bohrman, la cassette a un avantage certain : sa production revient à un peu plus d’un dollar l’unité à Burger Records, et permet d’enregistrer pour un coût modeste de petites quantités. Tandis que la production d’un vinyle peut atteindre des milliers de dollars et prendre plusieurs mois.

Grâce au prix de revient moindre, la maison de disques s’est spécialisée dans les contrats avec d’obscurs groupes de rock garage dont les créations ne sortent que sur cassettes. En tant qu’acheteur, «vous êtes beaucoup plus susceptible de prendre des risques avec des musiciens si ça vous coûte seulement 5 dollars l’unité», explique M. Bohrman.

Et, comme il est plus difficile de sélectionner les chansons qu’avec un CD, un MP3 ou même un vinyle, l’acheteur est beaucoup plus enclin à acheter un album entier.

«Vous pouvez vous asseoir et laisser Spotify ou Soundcloud ou Facebook vous dire quoi écouter, ou vous pouvez vous bouger pour trouver de nouvelles musiques», poursuit M. Bohrman, nostalgique du temps où les fans découvraient eux-mêmes les groupes chez un disquaire de quartier.

Valeur sentimentale

Même si les pays industrialisés ont cessé de vendre des cassettes, le support reste assez présent en Afrique sub-saharienne, ce qui oblige souvent les fans de musique afro-pop à chercher des cassettes.

La production de la cassette revient à un peu plus d’un dollar l’unité à Burger Records, et permet d’enregistrer pour un coût modeste.

Le hip-hop et le punk hardcore rendent plutôt bien sur cassette, relève Hope Silverman, gérante du magasin new-yorkais Rough Trade.

«S’il s’agit d’un enregistrement dans un studio nec plus ultra, la cassette n’a pas un bon rendu. C’est la raison pour laquelle les cassettes hardcore se vendaient si bien : tout tourne autour de l’ambiance trouble et grungy», explique-t-elle.

À l’occasion du «Jour de la cassette», la gérante a co-réalisé un coffret de deux cassettes de groupes américains et britanniques émergents. Elle a confié avoir été surprise par l’intérêt suscité dans sa boutique et dans le magasin d’origine Rough Trade de Londres.

«Ça ne va pas être comme pour le vinyle, ce sera une niche. Mais je pense que davantage de personnes vont s’y mettre», pronostique-t-elle, comptant notamment sur la nostalgie de l’époque où les fans de musique confectionnaient des compilations sur cassette sur leurs chaînes à double lecteur.

Chris Pantelino, âgé de 43 ans, a sélectionné dans le rayon dévolu à la cassette chez Rough Trade un opus du groupe de rock indépendant Wild Nothing.

Mais, problème, il n’a pas de lecteur de cassette. Alors il expose ses cassettes, pendant qu’il écoute sa musique sur CD.

«J’aime simplement les regarder. Peut-être que la principale raison, c’est que ça me ramène à ma jeunesse», a-t-il expliqué.

Jose Boyer, chanteur et guitariste du groupe new-yorkais Las Rosas, qui vient juste de sortir une cassette, avance une autre explication : «Elles sont pour les gens comme mes amis et moi qui avons des voitures merdiques».

AFP/VNA/CVN

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