France
Un Français prend les rênes d'ASML en pleine guerre des puces

Une tâche ardue attend le Français Christophe Fouquet, qui prend mercredi 24 avril les rênes de l'équipementier européen du secteur des semi-conducteurs ASML, tandis que l'industrie est devenue un champ de bataille géopolitique.

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ASML emploie environ 40.000 personnes dans le monde.
Photo : AFP/VNA/CVN

De par son importance stratégique dans la fabrication de machines destinées à produire des micro-puces qui alimentent la plupart des technologies de pointe dans le monde, le groupe néerlandais endosse un rôle qui va bien au-delà du domaine commercial.

Politiquement, M. Fouquet devra naviguer en eaux troubles alors que les puissances occidentales, les États-Unis en tête, veulent restreindre l'accès de la Chine aux puces les plus avancées, susceptibles d'être utilisées pour la fabrication d'armes.

Les analystes ne s'attendent toutefois pas à un changement radical pour ASML avec le départ de l'actuel PDG, Peter Wennink : après 16 ans passés dans l'entreprise, M. Fouquet, 50 ans, était le candidat de la continuité.

"Je pense que ce sur quoi nous travaillons depuis de très nombreuses années est toujours ce que nous voulons réaliser avec ASML", a-t-il déclaré lors de sa nomination. "Il fait partie des meubles", a souligné son prédécesseur en lui tapotant affectueusement le bras dans une vidéo d'entreprise.

M. Fouquet a étudié la physique à l'Institut polytechnique de Grenoble, dans le Sud-Est de la France, un bagage théorique crucial pour diriger une entreprise technologique d'une telle stature.

Après avoir travaillé dans les sociétés de semi-conducteurs KLA Tencor et Applied Materials, il rejoint ASML en 2008, occupant d'abord des postes en marketing et en gestion de produits.

M. Fouquet a longtemps dirigé l'important programme de systèmes EUV (Extreme Ultraviolet), ces machines de pointe qui impriment des puces ultra-fines essentielles au développement de l'intelligence artificielle.

Il est devenu vice-président et directeur commercial en 2022. "L'initié Christophe Fouquet, c'est la continuité en chair et en os", estime le journal spécialisé Bits&Chips. "Le Français connaît l'entreprise et le secteur comme sa poche."

Simon Coles, analyste ASML chez Barclays, a déclaré : "Le nouveau PDG a aidé à définir et à planifier la stratégie actuelle, nous nous attendons donc à une continuation."

"Joueur vedette"

En janvier, le gouvernement néerlandais a révoqué les licences d'exportation de certaines des machines avancées d'ASML, suscitant la fureur à Pékin.

Les derniers résultats trimestriels ont montré que la Chine représente près de la moitié (49 %) des ventes d'ASML. Le groupe a aussi enregistré un nombre de commandes en deçà des attentes, provoquant une chute en Bourse.

M. Fouquet avait précédemment déclaré qu'il était "extrêmement difficile et extrêmement coûteux" de découpler la chaîne d'approvisionnement de l'industrie.

"C'est une question de temps avant que les gens réalisent que la seule manière de réussir dans le secteur des semi-conducteurs passe par la coopération", a-t-il mis en avant auprès du média spécialisé Nikkei Asia l'année dernière.

"L'idée selon laquelle nous pourrions retourner dans notre coin et tout faire tout seul est très probablement un concept très ambitieux", a-t-il ajouté. Aux Pays-Bas, l'avenir du siège d'ASML à Veldhoven, une sorte de "Silicon Valley" néerlandaise, est devenu un enjeu politique.

Après la victoire aux législatives du politicien d'extrême droite Geert Wilders, grâce à sa promesse de stopper l'immigration, M. Wennink a averti qu'ASML pourrait quitter le pays si le groupe ne parvient pas à attirer des employés compétents aux Pays-Bas.

La Haye a alors dévoilé "l'Opération Beethoven", une offensive de charme se chiffrant à 2,5 milliards d'euros destinée à garder des entreprises comme ASML dans le pays.

"ASML est notre Messi et un tel joueur vedette amène toute une équipe avec lui", a déclaré le ministre de l'Économie Micky Adriaansens lors de la présentation du plan, comparant le groupe au célèbre attaquant argentin.

L'entreprise et la région autour de Veldhoven envisagent de loger environ 20.000 nouveaux employés. M. Fouquet est après Eric Meurice le deuxième Français à diriger ASML, et Bits&Chips estime que sa nationalité pourrait jouer dans les deux sens.

S'il pourrait être désavantagé face aux hommes politiques néerlandais, "ses origines françaises pourraient l'aider sur la scène internationale, où les tempêtes géopolitiques continuent de faire des ravages", écrit le journal.

"La France représente une Europe fière et sûre d'elle. Ainsi, lorsqu'il s'agira de freiner l'ingérence américaine, comme les mesures à l'exportation, le nouveau PDG d'ASML trouvera invariablement le président français à ses côtés."

AFP/VNA/CVN


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