Trân Trà My : des mots contre les maux

À 27 ans, Trân Trà My, écrivain, vient de présenter au public sa 3e nouvelle. Un petit exploit pour cette jeune femme quasi tétraplégique. Portrait d’une force de la nature.

L’écrivain Trân Trà My.


Il est difficile pour ses interlocuteurs de la comprendre. Ses jambes et ses mains sont paralysées. Elle ne peut bouger qu’un seul doigt. Mais derrière cette description simpliste, la réalité de la vie de Trân Trà My est bien plus complexe, et la jeune femme fait fi de tous les stéréotypes qu’elle véhicule au premier regard. Privée d’école et isolée du monde quand elle était enfant, elle est devenue un écrivain populaire.
Trà My naît en 1986 dans une famille de commerçants pauvres de la ville de Dông Hà, province de Quang Tri (Centre). À l’âge de trois mois, le nourrisson attrape une maladie rare, et subit une succession d’opérations qui auront raison de ses membres inférieurs et de ses mains. Son élocution est également touchée. Aucune n’école n’accepte Trà My, qui doit rester à la maison. Personne ne prend alors la peine de lui apprendre ne serait-ce qu’à lire.
Autodidacte par obligation
À neuf ans, elle commence péniblement à se déplacer avec des béquilles. Chaque soir, alors que sa sœur cadette de six ans fait ses exercices, elle l’observe. Ses parents reconnaissent bien le désir de leur fille de vouloir apprendre à lire et à écrire, mais ils ne peuvent la scolariser car elle a toujours du mal à s’exprimer et à communiquer. La voici donc enfermée dans ce corps paralysé, exclue du droit d’apprendre et de vivre.
Mais la foi peut déplacer des montagnes et Trà My continue de rester chaque soir à côté de sa petite sœur. À la surprise de ses parents, à 15 ans, elle maîtrise la lecture et résout des problèmes mathématiques. Pour l’écriture, elle apprend à composer sur un ordinateur, avec un seul doigt.
«À 16 ans, l’un de mes poèmes a été diffusé sur une radio locale. J’ai alors commencé à en rédiger d’autres, en choisissant des thèmes simples de la vie quotidienne, mes pensées, mes aspirations, mes rêves», confie-t-elle.
Un envol bien mérité
Passionnée de littérature vietnamienne, elle écrit également des contes publiés dans des journaux destinés aux enfants. Quatre ans plus tard, lasse d’être un fardeau pour sa famille, Trà My décide de s’installer à Hô Chi Minh-Ville. Une décision qui a choqué ses parents. «Ma famille constitue ma force motrice. Ils m’ont tout donné. Mais je ne veux pas devenir une charge», explique-t-elle.

Elle vient de présenter aux lecteurs sa 3e nouvelle Yêu trên tung ngon tay (L’amour au bout des doigts).
Photo : Tuôitre/CVN

À Hô Chi Minh-Ville, Trà My puise sur les économies qu’elle a gagnées avec ses contes pour louer un petit appartement. Elle s’inscrit à une formation de relations publiques et trouve un emploi à temps partiel dans ce secteur. «Je poursuis maintenant des cours approfondis d’anglais afin de reprendre mes études à Singapour», souligne-t-elle.
On l’a bien compris, Trà My est comme toutes les jeunes filles de son âge, l’énergie en plus. À côté de ses études, elle manie la plume avec brio et finesse, et publie deux ouvrages. Sa première œuvre, un recueil de 20 nouvelles Giâc mo dôi chân thiên thân (Un rêve sur des pieds d’ange) sort en juillet 2009, et reçoit le prix But moi (Nouvelle plume) du journal Tuôi tre (Jeunesse). Un an plus tard, elle écrit un nouveau recueil de 39 proses Chinh chung ta là mùa xuân (Nous sommes le printemps) qui séduit de nouveau les lecteurs. Et tout récemment, elle a proposé 11 nouvelles à son éditeur, Yêu trên tung ngon tay (L’amour au bout des doigts), marquant dix ans d’écriture.
«Le livre est en cours d’impression. Il sera sur les étals au premier trimestre de l’année prochaine», a-t-elle annoncé lors d’une récente rencontre avec les jeunes lecteurs de Hô Chi Minh-Ville.
Trà My participe également activement aussi à des activités caritatives. Elle est notamment membre fondateur du Fonds Le rêve sur des pieds d’ange (inspiré de sa première nouvelle) en faveur des handicapés. Récemment, le photographe Nguyên A a présenté une exposition de 90 personnes handicapées du Vietnam, et n’a pas oublié Trà My. Parce que l’exemple doit être mis en avant. Ou pas.

Linh Thao/CVN

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