Toute la nostalgie de l'Amérique industrielle dans une pub

Le constructeur automobile Chrysler vient de relever un pari osé avec la publicité vraisemblablement la plus chère au monde, qui a atteint une corde sensible auprès des Américains : la puissance perdue de leur industrie.

Cette pub de deux minutes, diffusée le 13 février aux États-Unis à une heure d'écoute record, montre la ville symbole du déclin industriel, Detroit : ses cheminées, ses autoroutes, ses façades décaties, son patrimoine historique.

En fond sonore, un habitant du Michigan (11,7% de chômage, contre 9,0% nationalement) raconte d'une voix grave, comme marquée par les épreuves, une région qui lutte contre sa désindustrialisation. "Ce sont les feux les plus chauds qui font l'acier le plus dur. Ajoutez-y le dur travail, la conviction et le savoir-faire qui habitent chacun d'entre nous depuis des générations. C'est ce que nous sommes. C'est notre histoire".

Destiné à vendre la Chrysler 200, la nouvelle berline de luxe du constructeur, le spot s'achève sur le slogan : "Importé de Detroit".

D'après The Drum, site Internet britannique spécialisé dans la publicité, le spot est le plus cher de l'histoire de la télévision : l'annonceur aurait payé à la chaîne Fox près de six millions de dollars.

Sa longueur, inédite pour une finale du championnat de football américain (Superbowl), a exigé de demander une permission à la Ligue (NFL).

Les coûts de production ont été gonflés par l'apparition d'une star de la musique, le rappeur Eminem, lui aussi originaire de Detroit. "C'était une publicité du type 'tout ou rien'. Soit c'était un succès pour la marque, soit c'était de l'argent complètement gâché. Chrysler mérite qu'on reconnaisse cette prise de risque et je pense que cela a marché", explique Jeremy Anwyl, directeur général du site Internet d'analyse du marché automobile Edmunds.com. "Nous Américains, nous aimons ce message : que l'on peut essayer de vaincre l'adversité. Les gens ont accroché, en pensant au pays et à la façon dont l'économie s'est relancée après sa débâcle", ajoute-t-il.

Le journal local, le Detroit Free Press, et ses lecteurs sur Internet se sont enthousiasmés pour l'image projetée par la ville lors d'un événement regardé par 111 millions de personnes. "C'était une déclaration puissante sur les raisons pour lesquelles nous tous dans le Michigan devons croire en Detroit °...§ Des problèmes? Évidemment. Insurmontables? Certainement pas!", commentait un lecteur sous pseudonyme.

Ailleurs, les observateurs de l'automobile relevaient que des modèles Chrysler aujourd'hui sont importés... du Canada et du Mexique.

L'usine montrée dans la publicité n'appartient d'ailleurs pas aux "Big Three" (General Motors, Ford et Chrysler) de Detroit. C'est une raffinerie, plus impressionnante à l'écran. Un site de l'industrie peut-être la moins populaire du pays, le pétrole.

L'industrie automobile américaine est quant à elle tombée à 700.000 salariés, contre 1,3 million en 2000. Sa "renaissance", souvent citée en exemple par la classe politique, se traduit encore davantage en profits qu'en embauches.

Chrysler aurait pu disparaître. Le groupe a dû passer par des prêts gouvernementaux, un dépôt de bilan en avril 2009, une restructuration drastique de ses dettes et de son appareil industriel, et une alliance avec l'italien Fiat, avant de se payer ce spot.

Pour son directeur général, l'Italo-Canadien Sergio Marchionne, l'histoire de Detroit a pourtant beaucoup de quoi inspirer le reste de l'Amérique. "Beaucoup de gens sous-estiment ce qui s'est passé ici... Ce qu'il y a d'exceptionnel avec ce pays, c'est qu'il a la capacité d'apprendre", affirmait-il au magazine Forbes le 14 février.

Le 15 février en fin de journée, la publicité avait été vue 3,8 millions de fois sur le site Internet YouTube. Il n'est pas prévu qu'elle soit rediffusée à la télévision.

AFP/VNA/CVN

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