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La sortie mondiale du nouveau James Bond est repoussée d'avril à novembre. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"Je n'avais jamais rien vu de tel, avec autant de films affectés en même temps", relève Jeff Bock, spécialiste de la société Exhibitor Relations.
"Il y a des incidents isolés ou des drames qui peuvent toucher un film en particulier. Mais là, ça contamine toute l'industrie du cinéma, d'un bout à l'autre de la filière", souligne-t-il.
Les professionnels évaluent déjà à environ deux milliards d'USD les pertes financières des cinémas en Asie depuis le début de l'épidémie de COVID-19 dans le Nord de la Chine en décembre.
Et l'annulation in extremis de la sortie mondiale des nouvelles aventures de James Bond, No Time To Die (Mourir peut attendre), repoussée d'avril à novembre, illustre l'impact de cette crise du coronavirus sur l'industrie cinématographique.
Pour l'instant, la fréquentation dans les salles obscures aux États-Unis tient bon, et "Mulan", remake en prises de vues réelles du dessin animé de Disney, est censé faire ses débuts en avril en Amérique du Nord, comme prévu.
Mais la récente multiplication des cas de contaminations en Californie et à New York, ainsi que les premiers morts recensés dans l'État de Washington (Nord-Ouest), pourraient peser sur les recettes.
Les pertes des cinémas d'Asie sont estimées à deux milliards d'USD depuis le début de l'épidémie. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"On va commencer à voir une petite baisse cette semaine. D'ici la sortie de +Mulan+, si ça s'avère aussi sérieux qu'en Chine, ça va complètement changer la donne", analyse Jeff Bock.
En amont, le marché du divertissement est aussi secoué par le retrait des principaux acheteurs du secteur du festival culturel South by Southwest (SXSW) d'Austin, au Texas : les géants Amazon, Apple et Netflix ont fait savoir qu'ils ne prendraient pas le risque d'y envoyer cette année leurs équipes.
Productions en danger
Les grands studios ne sont pas les seuls à s'inquiéter.
Le tournage en Italie du prochain Mission Impossible a été annulé en février. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Stephen Nemeth, qui avait produit Johnny Depp dans Las Vegas Parano en 1998 et devait présenter son dernier film en avant-première mondiale à Austin en avril, se fait déjà des cheveux blancs. "Nous avons un cinéma de 1.100 places... Ça fait beaucoup de sièges à remplir si le festival n'est rempli qu'à 25% de sa capacité", dit-il.
Déterminés à maintenir l'événement, les organisateurs n'ont communiqué aucun chiffre précis sur la fréquentation attendue. Mais plus de 50.000 personnes ont signé une pétition sur internet pour demander l'annulation du festival.
"Je ne m'attends pas à avoir un acheteur parce que je crois que les acheteurs seront très peu nombreux", confie M. Nemeth, qui pense que son film Freak Power aura davantage de chances de se vendre lors de projections privées organisées à Hollywood. Il doutait même jeudi 5 mars que le festival d'Austin puisse être maintenu, alors que d'autres prestigieux rassemblements de professionnels et de stars, comme le CinemaCon de Las Vegas ou le festival de Cannes, sont en pleine réflexion.
Les productions sont aussi touchées. Un tournage de trois semaines prévu en Italie (principal foyer de l'épidémie en Europe) pour le prochain Mission Impossible avec Tom Cruise a été annulé en février.
Les studios Paramount ont agi "par principe de précaution pour la sécurité et le bien-être" des acteurs et de l'équipe. Netflix cherche d'autres sites pour tourner des scènes d'un film mettant en scène Dwayne Johnson qui devait se dérouler en Italie. Les studios ont certes la possibilité d'opter pour des lieux de repli en déplaçant leurs productions vers des pays moins exposés.
La plupart des tournages nécessitent cependant une importante logistique, impliquant parfois plusieurs centaines de personnes regroupées au même endroit, ce qui présente un risque non négligeable, estime Stephen Nemeth. "Je n'en voudrais pas à des acteurs de ne pas vouloir continuer un film", dit-il. "Chaque film est comme un petit village". "Ce sont les mêmes personnes qui prennent leur repas tous ensemble. Vous avez beaucoup, beaucoup de gens dans un endroit confiné", relève-t-il.
Le ralentissement provoqué par l'épidémie pourrait aboutir à des retards en série dans la sortie de nouvelles productions, voire une pénurie. "Plus ça dure et moins on aura de films dans les tuyaux pour 2021 et 2022", au risque de "vraiment paralyser l'industrie du cinéma", estime Jeff Bock.