>>Washington et Moscou discutent de la sécurité des opérations aériennes en Syrie
Dans la capitale autrichienne où elles étaient réunies pour tenter de trouver une sortie politique au conflit syrien, la diplomatie russe - soutien clé du régime syrien depuis 2011 - était en minorité face aux diplomaties américaine, turque et saoudienne, farouches adversaires de Damas.
Mais Moscou a créé la surprise en annonçant une nouvelle alliance : une "coordination" de ses opérations militaires dans le ciel syrien avec la Jordanie, alliée des Etats-Unis et membre de la coalition contre l'organisation jihadiste État islamique (EI).
De gauche à droite : les ministres des Affaires étrangères turc Feridun Sinirlioglu, laméricain John Kerry, saoudien Adel al-Jubeir et russe Serguei Lavrov à Vienne, le 23 octobre à Vienne. |
Si les contours de cette coopération n'ont pas été précisés, un "mécanisme" permettant sa mise en oeuvre est en place à Amman, ont assuré les ministres russe et jordanien. Le ministre jordanien des Affaires étrangères Nasser Judeh était à Vienne.
Amman a précisé dans un communiqué que "la coopération entre la Jordanie et la Russie est ancienne" et que la "Jordanie est toujours membre de la coalition internationale contre le terrorisme" menée par les États-Unis.
M. Kerry a quitté Vienne en fin de journée pour se rendre en Jordanie, un déplacement programmé avant cette annonce. Moscou et Washington, après cette première réunion inédite, veulent élargir à de nouveaux acteurs l'effort diplomatique international en vue d'un règlement du conflit mais avec des objectifs divergents sur le sort du régime de Bachar al-Assad.
Aussi, cette réunion quadripartite de Vienne, une première diplomatique, pourrait être suivie d'un autre rendez-vous vendredi prochain, impliquant davantage de participants, ont annoncé le secrétaire d'État américain John Kerry et son homologue russe Sergueï Lavrov.
M. Kerry a dit "espérer pouvoir dès vendredi prochain tenir une réunion plus large", et Sergueï Lavrov a jugé que "le quartette (...) doit être élargi". Ce dernier a insisté sur la nécessité d'impliquer l'Iran, l'Égypte, le Qatar, les Émirats Arabes Unis et la Jordanie.
John Kerry a préféré mettre en avant la France, le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Italie et le Qatar. S'agissant d'une intégration de Téhéran, autre fidèle allié du régime de Damas, "nous n'en sommes pas là", a répliqué John Kerry. Le sort du président syrien Bachar al-Assad continue de diviser clairement Washington et Moscou : "la plupart des pays d'Europe, des dizaines de pays (...) comprennent que Bachar al-Assad crée une dynamique rendant la paix impossible. Qu'on ne peut rien faire (...) s'il reste en place", a souligné M. Kerry.
Le chef de la diplomatie russe a estimé lui que c'était au "peuple syrien" de décider du sort de son dirigeant, et s'est déclaré en faveur de pourparlers sur un règlement "politique" du conflit incluant le gouvernement Assad et "le spectre complet" de l'opposition syrienne.
Coupure d'une route vitale vers Alep
Moscou reproche régulièrement aux États-Unis de chercher à se "débarrasser" du dirigeant syrien. Après avoir exigé inlassablement le départ immédiat de Bachar al-Assad comme préalable à un processus politique, Washington a admis ces derniers mois que le calendrier était négociable, mais sans céder sur l'objectif. Signe de l'internationalisation des efforts de règlement du conflit syrien, la réunion avait pour but "de trouver de nouvelles idées pour sortir de l'impasse", a ajouté le chef de la diplomatie américaine, reconnaissant que les participants avaient conscience que ce serait "difficile".
Les Américains et leurs alliés pilotent une coalition internationale contre l'EI et apportent leur soutien à des rebelles syriens ennemis du régime de Damas. En face, la Russie a lancé il y a trois semaines une campagne de bombardements aériens en Syrie. Une intervention contre le "terrorisme", affirme Moscou. Des raids destinés plutôt à sauver le chef de l'État syrien, accusent Washington et ses partenaires.
Les raids aériens russes ont fait près de 450 morts depuis le 30 septembre, a indiqué le 23 octobre l'ONG Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Barack Obama a nommé le 23 octobre Brett McGurk, un expert de l'Irak, nouvel émissaire pour coordonner la campagne contre l'EI. L'EI a coupé le même jour une route vitale pour le régime entre Homs et Alep, près de Khanasser, et contrôle une portion d'au moins 6 km de cette artère, selon l'OSDH. Le régime syrien a ainsi perdu sa dernière route d'approvisionnement vers les quartiers qu'il contrôle à Alep, la capitale économique de la Syrie.
AFP /VNA/CVN