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Aylin Yazicioglu, cheffe du restaurant Nicole à Istanbul. |
Photo : APF/VNA/CVN |
Une nouvelle génération de cuisiniers bouleverse ainsi la scène gastronomique turque avec une approche innovante. Objectif : dépasser publiquement le stade du fameux döner kebab.
À l’étranger, la cuisine turque est souvent assimilée à ce sandwich à la viande grillée sur une broche verticale. Un plat exporté en Europe par la diaspora turque, principalement en Allemagne, où il est généralement servi avec un apport de mayonnaise et de salade que ne connaît pas la version turque.
Mais ils sont peu nombreux hors de Turquie à avoir déjà goûté aux karniyarik (aubergines farcies à la viande) ou aux yaprak sarma (feuilles de vignes farcies).
Ces plats peuvent s’ac-compagner d’un bout de fromage, comme du tulum (un fromage de chèvre préparé dans la peau de l’animal) ou du kasar (généralement à base de lait de brebis), pour terminer avec un peu de cezerye (des carottes caramélisées avec de la noix de coco) pour le dessert.
«La cuisine turque est méconnue. Ce qui vient en tête, ce sont toujours de mauvais exemples», regrette Aylin Yazicioglu, cheffe du restaurant Nicole à Istanbul. «Nous faisons de notre mieux pour que cela change», assure-t-elle.
Huile d’olive
Nicole propose des dégustations de menus comptant plusieurs plats pour découvrir la multitude des produits locaux et le must de la gastronomie turque.
«Dans un monde où l’on se tourne vers le local, nous commençons à comprendre la valeur de notre cuisine, de nos produits», explique Mme Yazicioglu. «Dans notre pays, tout est disponible pendant les quatre saisons.»
La Turquie doit apprendre à mettre en avant ses atouts, comme l’huile d’olive, estime la cheffe.
«Il y a un mouvement» en ce sens, selon elle. Le chef Serkan Bozkurt, de l’académie de cuisine stambouliote Chef’s Table, se réjouit que des restaurants et des cafés turcs fleurissent en Europe, avec des chaînes turques comme celle de boulangerie Simit Sarayi ou les cafés Kahve. Dünyasi qui commencent à s’exporter.
Mais pour Mme Yazicioglu, il reste beaucoup à faire pour changer les perceptions vis-à-vis de la gastronomie turque. «Les conditions ne sont pas encore réunies pour une révolution», dit-elle.
Ragoûts, mezzés, fromages
Un plat d’Aylin Yazicioglu, cheffe du restaurant Nicole à Istanbul. |
Photo : APF/VNA/CVN |
Arnaud de Clercq, enseignant au sein de la structure stambouliote du Cordon Bleu, une école de cuisine internationale basée en France, estime que la cuisine turque est «très rustique» avec ses plats en sauce et ses ragoûts.
«C’est proche de la cuisine traditionnelle française, comme le bœuf bourguignon, la blanquette de veau, le navarin d’agneau... On trouve toutes ces choses ici, de façon un peu différente.»
En revanche, pour lui les mezzés turcs, des assortiments d’entrées chaudes ou froides, sont typiquement turcs. «C’est l’Empire ottoman qui, quand il s’est étendu partout, a étendu aussi sa cuisine», explique M. de Clercq. «Les mezzés turcs sont restés dans toutes les régions, et ensuite chaque pays l’a mis à sa sauce, comme au Liban, en Syrie, ou en Jordanie.»
Les étrangers mentionnent la cuisine turque comme un tout homogène, mais elle connaît de nombreuses déclinaisons locales, les spécialités égéennes différant radicalement de celles de la mer Noire.
Antakya, dans le Sud-Est, a un héritage culinaire inspiré de la province syrienne d’Alep, alors que vers la mer Noire, on peut trouver des plats comme le muhlama, une sorte de fondue à base de maïs, de beurre et de fromage.
Le chef Serkan Bozkurt insiste sur la variété de cette cuisine, des légumes à l’huile d’olive et aux herbes de la mer Égée, aux plats majoritairement à base de viande de l’Est du pays.
Pour lui, la Turquie pourrait faire plus d’efforts pour faire connaître ne serait-ce que la variété de ses fromages.
«Je dis toujours que si l’on organisait un séjour d’une semaine en se concentrant sur la dégustation de fromages de sept régions, les gens en seraient basourdis», affirme-t-il. «La cuisine turque ne se limite pas à la viande ou au kebab.»
AFP/VNA/CVN