>>Doàn Viêt Tiên, l’art au bout des doigts
Dans son atelier situé au Centre d’apprentissage professionnel pour les handicapés (Maison Chance), dans l’arrondissement de Binh Tân, à Hô Chi Minh-Ville, Tâm fait face à une toile, accrochée au chevalet. Pinceau en bouche, il pioche dans les différentes teintes de sa palette. Trait après trait, un portrait finit par se dégager du fond, et la vie prend forme sur la toile.
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| Dô Minh Tâm, un artiste-peintre handicapé doté d’un sacré talent. |
Depuis huit ans, Dô Minh Tâm, domicilié à Hô Chi Minh-Ville, commence à se faire un nom dans le monde de la peinture. Ce jeune homme originaire de la province de Thanh Hoa (Centre) a la particularité de peindre avec sa bouche et est l’un des rares peintres vietnamiens contemporains à avoir des oeuvres bien cotées lors des ventes aux enchères en Europe. L’une d’entre elles a été achetée par un Viêt kiêu d’Italie au prix de 9.000 dollars (environ 190 millions de dôngs).
Une œuvre vendue 9.000 dollars
Tâm a reçu bon nombre de prix avec notamment sa peinture, Tài nguyên et môi truong (Ressources naturelles et environnement), primée lors d’une exposition mondiale d’oeuvres réalisées par des handicapés en septembre 2008 à Hanoi. En octobre 2010, il décroche le premier prix pour son Buoc ngoat (Virage) lors d’un concours des beaux-arts co-organisé au Vietnam par le gouvernement allemand et le ministère vietnamien du Travail, des Invalides de guerre et des Affaires sociales. L’an passé, un de ses portraits a figuré dans la liste des 40 meilleures du concours «Portraits», organisé par le Musée des beaux-arts de Hô Chi Minh-Ville.
Dô Minh Tâm souffre d’une paralysie des membres supérieurs des suites d’un grave accident de la route survenu en 2001. Le jeune homme, alors âgé de 28 ans, perd ce jour l’usage définitifs de ses membres supérieurs et doit suivre depuis régulièrement des traitements médicaux à l’hôpital. En 2003, il est envoyé à la Maison Chance. Il s’agit d’un centre d’apprentissage professionnel humanitaire en faveur des handicapés, fondé à Hô Chi Minh-Ville par la Suisse Tim Aline Rebeaud.
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| En huit ans, il a réalisé une centaine d’œuvres. |
Cohabitant avec son handicap, Tâm décide de faire quelque chose pour ne pas être oublié. «Une souffrance permanente, mais avec les années, on s’y habitue. C’est à la Maison Chance que j’ai commencé à dessiner. Ce coup du sort ne m’a jamais empêché de rêver», dit-il. Prendre le pinceau dans la bouche pendant des heures est pour lui pénible. «Parfois, je sens ma mâchoire figée. Et le travail de concentration que cela demande me donne aussi des tensions nerveuses, ce qui m’oblige à interrompre mon travail pour aller au service de traitement médical physique», raconte le peintre.
Du cœur à l’ouvrage
Il consacre une année pour apprendre à portraiturer. Trois ans après, il est spécialisé dans deux domaines : le portrait et l’huile. Des efforts qui paient, puisque ses œuvres se négocient aux alentours de 5 millions de dôngs pièce. Lors de sa première vente dans le cadre d’une exposition en 2006 à l’Opéra de Hanoi, une de ses huiles se vend 10 millions de dôngs.
Interrogé sur la clé de son succès, Tâm affirme : «Peindre avec la bouche n’est pas trop difficile, mais pour avoir une œuvre appréciée, le peintre doit insuffler une partie de son âme dans son travail. Moi, je peints avec ma volonté, mon énergie et mon coeur». Ses créations nécessitent beaucoup de temps. Il faut des mois, voire des années pour accomplir une œuvre. «Certaines m’ont pris trois mois, d’autres quatre ans. Cela dépend de ma santé et de mon inspiration», sourit-il.
L’artiste recherche aujourd’hui un parraineur pour ouvrir une exposition privée à Hô Chi Minh-Ville. L’appel est lancé.
Linh Thao/CVN