Papiers votifs, plus qu’un rite séculaire

Pour mieux comprendre l’histoire, la tradition de brûlage des papiers votifs des Vietnamiens ainsi que la dextérité des artisans en ce domaine, l’œuvre Dô ma Viêt Nam (Papiers votifs du Vietnam) de Nguyên Thi Thu Hoà est le choix idéal.

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Couverture du livre Dô ma Viêt Nam de Nguyên Thi Thu Hoà.
Photo : TN/CVN

Dans la croyance des Vietnamiens, brûler des papiers votifs est une habitude bien ancrée dans les pratiques culturelles. À l’occasion de fêtes nationales comme Vu Lan (15e jour du 7e mois lunaire) et le Nouvel An lunaire, les familles n’oublient pas de brûler des vàng ma ou papiers votifs censés faire le lien entre le monde des vivants et celui des morts, mais aussi pour hommage aux défunts. Depuis environ dix ans, moins de papiers votifs sont brûlés pour éviter le gaspillage et les incendies. Ce rite existe toujours lors de fêtes, mais avec un nombre réduit de papiers. Malgré sa longue histoire, peu de personnes connaissent ses origines, son histoire, la fabrication d’antan…

Le Dr. Nguyên Thi Thu Hoà, directrice du Musée de la céramique de Hanoï apporte ses analyses à travers ses recherches approfondies sur ces coutumes dans son livre récemment publié : Dô ma Viêt Nam.

Elle a consacré du temps à collecter des archives des régions du pays ainsi que des musées étrangers pour les inclure dans son œuvre. Les documents sur la fabrication des papiers votifs sont rares. Elle a trouvé quelques têtes de figurines en porcelaine d’hommes et de femmes recouvertes d’émail jaune ou bleu, conservées au Musée de l’histoire nationale, datant des XIe et XIIIe siècles de la dynastie Ly. Ces antiquités ont été découvertes dans les sites archéologiques de l’ancienne Cité impériale de Thang Long, tels que Kim Ma, Quân Ngua et Ngoc Hà. Le Dr. Hoà suppose que ces figurines avaient un corps en papier, mais au fil du temps, ils ont été détruits, seules les têtes sont restées.

Des papiers votifs d’exception montrant la dextérité des artisans.

"Actuellement, il y a encore quelques artisans à Hoài Duc, Hanoï, et à Trang Bàng, Tây Ninh (Sud), qui continuent à faire des +tiên si giây+ (Docteurs en papier) en les moulant avec de l’argile puis les séchant au soleil avant de les recouvrir de plusieurs couches de papier et les décorer avec de la peinture".

Dans son livre, l’auteur montre de nombreuses photos qui démontrent que lors des funérailles du roi Khai Dinh le 25 novembre 1925, des objets votifs tels que la maquette du palais Kiên Trung, le palanquin, le parapluie, et le véhicule de transport du roi ont été brûlés en mémoire du défunt souverain.

Depuis un certain temps, les musées étrangers s’intéressent à l’artisanat de la confection des papiers votifs. Des artefacts liés à ceux-ci, datant du début du XXe siècle, ont été exposés dans plusieurs musées en France et aux États-Unis.

D’après Mme Hoà, les papiers votifs de la première moitié du XXe siècle étaient plus soigneusement confectionnés et délicats que ceux d’aujourd’hui.

Témoin de l’Histoire

Dans son livre Dô ma Viêt Nam, l’auteur raconte des anecdotes passionnantes qui marquent les étapes importantes de l’histoire nationale. En étudiant les papiers votifs, nous pouvons comprendre les habitudes, tendances et changements de chaque époque dans le passé. La photo montrant la maquette en papier d’un vélo Peugeot est un exemple. Pendant les années 1990 à 2000, le vélo était le moyen de transport principal et populaire des Vietnamiens, seulement les familles aisées pouvaient se permettre d’acheter une moto.

Selon l’auteur, la recherche sur les papiers votifs nous permet de mieux comprendre des aspects culturels peu connus, comme dans le cas du village des estampes populaires de Dông Hô dans la province de Bac Ninh (Nord), qui est un lieu de production de papiers votifs. Ce site est connu pour son artisanat de production manuelle des estampes populaires depuis longtemps.

Cependant, pendant la période de la fête de Ky yên (cérémonie de prière pour la paix et la prospérité du 3e mois lunaire), le village se concentre sur la conception des papiers votifs. Ceux-ci sont raffinés et reflètent l’habileté et le goût esthétique des artisans. Après avoir établi le squelette en bambou des hinh nhân (maquettes de l’homme en papier), les artisans appliquent des couches de papier avec de la colle, puis passent aux étapes de séchage et de décoration. C’est grâce à cette attention du détail que les papiers votifs du village sont d’excellente qualité.

Un artisan âgé du village d'estampes populaires de Dông Hô fabriquant des vàng ma.
Photo : VNA/CVN

Les ethnies vietnamiennes ont également leurs propres coutumes liées aux papiers votifs. L’art de couper les papiers des Nùng Din dans le district de Muong Khuong, province de Lào Cai (Nord) est un exemple. Ce rite, obligatoire lors des funérailles, consiste à inviter des artisans à couper des papiers pour les placer sur l’autel et les disposer sur le cercueil du défunt. Les papiers coupés sont en forme d’objets de la vie quotidienne tels que maisons, pièces ou outils de travail. Cet art a été reconnu patrimoine culturel immatériel national en 2013.

Les papiers votifs font partie des coutumes vietnamiennes et bien que leur combustion ait été limitée pour éviter le gaspillage, cette coutume persiste et est considérée comme un trait culturel du pays.

Trinh Nguyên - My Anh/CVN

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