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Les membres des délégations du gouvernement colombien saluent les membres de la guérilla de l'ELN, après une conférence de presse pour annoncer les résultats des pourparlers de paix à Caracas, le 21 novembre. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"La paix est notre rêve, les changements notre chemin. Les délégations du gouvernement et de l'Armée de libération nationale (ELN) nous nous sommes rencontrés avec optimisme (...) pour construire la paix à partir d'une démocratie juste", selon le communiqué lu lundi, après la première prise de contact dans la matinée.
Les négociations devraient durer "trois semaines" dans la capitale du Venezuela, un des trois pays garants du processus (avec Cuba et la Norvège). Elles réunissent une trentaine de personnes dont les délégués du premier président de gauche élu en août en Colombie Gustavo Petro et ceux de l'ELN.
Initié en 2017 à Cuba, le dialogue avait été interrompu par le président conservateur Ivan Duque (2018-2022) après une attentat à la voiture piégée en juin 2019 contre une école de police (22 morts).
"Dépasser la dynamique de la mort"
Cette volonté de "construire la paix" est réclamée par "les habitants qui souffrent de la violence et de l'exclusion", selon le texte qui souligne la "nécessité" d'"engagements permanents et vérifiables qui sèment les graines d'une nouvelle culture de la paix (...) dépassant la violence politique et ses causes".
"Nous considérons avec espoir le processus qui prend forme aujourd'hui. Il s'agit sans aucun doute d'un pas important vers la réalisation de la paix en Colombie", se sont félicités les nations garantes.
Le Commissaire à la paix colombien Danilo Rueda, nommé par Petro, a estimé que la Colombie se trouvait "à un moment historique, presque unique".
"La première réunion (...) nous donne la certitude et la conviction profonde que nous allons atteindre l'objectif qui nous unit: être filles et fils de la même patrie avec des changements et des transformations (..) qui nous amèneront à dépasser la dynamique de la mort (...) pour construire une nation où nous avons tous notre place."
"L'heure du changement"
Le chef de la délégation de l'ELN Pablo Beltran s'est lui aussi montré optimiste, soulignant que le fait que la Colombie soit dirigée par un "gouvernement de gauche" était la "principale différence" avec les échecs des négociations antérieures.
"L'heure du changement" est venue, a-t-il dit, "en Colombie nous devons tous changer (...) les Colombiens ne doivent pas se voir comme des ennemis."
Il a aussi balayé les doutes émis par de nombreux observateurs qui soulignent des divisions au sein de la rébellion: "L'ELN ne signe pas ce qu'elle ne peut pas respecter et ce qu'elle signe, elle le respecte".
Pour sa part, Carlos Ruiz Massieu, représentant spécial en Colombie du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a appelé "les parties et la société colombienne à profiter de cette opportunité historique". "Je réitère le soutien du secrétaire général @antonioguterres à ce processus", a-t-il écrit sur Twitter.
Après la suspension des pourparlers, les effectifs de l'ELN sont passés de 1.800 à 2.500 membres, selon les estimations officielles. L'organisation a une structure fédérée avec des porte-parole sur chaque front, ce qui, selon les experts, rend les négociations difficiles.
Fondée en 1964 par des syndicalistes et des étudiants sympathisants d'Ernesto "Che" Guevara et de la révolution cubaine, l'ELN reste à ce jour la dernière guérilla constituée comme telle encore active en Colombie, alors que les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) ont signé un accord de paix en 2016.
Le gouvernement et l'ELN n'ont pas convenu d'un cessez-le-feu, mais se sont entendus en octobre pour "reprendre tous les accords et les progrès réalisés depuis la signature de l'agenda" du 30 mars 2016. Ces dernières semaines, elles ont donné des "gages de confiance" à l'autre avec notamment des libérations de prisonniers ou la baisse des opérations sur le terrain.
Cependant, le ministre colombien de la Défense, Ivan Velasquez, a prévenu à Bogotá que la reprise des négociations n'implique pas un "ordre de suspendre les opérations" contre cette guérilla.
Si l'armée croise "quelqu'un qui a un mandat d'arrêt, alors il faut qu'il soit capturé (...). Il n'y a pas de cessez-le-feu", a-t-il dit.
Présente massivement à la frontière vénézuélienne, l'ELN a moins de puissance militaire que les FARC dissoutes, mais sa base sociale, composée de miliciens, est plus large et plus diversifiée, selon les chercheurs.
M. Petro, ancien guérillero lui-même, travaille sur un plan de "paix totale" qui ambitionne de mettre fin à toutes les violences dans son pays après plus de 50 ans de guerres internes.
Il a affirmé sa volonté de négocier avec l'ELN mais aussi avec les dissidents des ex-FARC (marxistes) qui rejettent l'accord de paix de 2016, ainsi que de discuter avec les gangs de narcotrafiquants de leur reddition à la justice.
Samedi 19 novembre, des affrontements entre une faction dissidente des FARC et un autre groupe armé ont fait 18 morts, près de la frontière avec l'Équateur.
AFP/VNA/CVN