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Le Professeur agrégé-Docteur Nguyên Lân Trung. |
Photo : NVCC/CVN |
À l’âge de 68 ans, Nguyên Lân Trung peut se targuer de n’avoir cessé d’être enseignant depuis 45 ans. Le français, il l’a découvert enfant, dans les livres de son père, lui aussi professeur de français dans les années 1930. Et depuis, cette langue ne l’a jamais quitté.
Au lycée, il traduit déjà des extraits de romans et des poèmes pour ses camarades. "Parce que nous ne disposions pas de traductions à l’époque, je traduisais moi-même des passages de Flaubert, des contes et des poèmes, des lettres d’amour… Voir mes amis lire avec autant d’assiduité, ça me motivait. J’étais très demandé !", raconte Nguyên Lân Trung, un pétillement dans les yeux.
À partir de 1972, il intègre le Département de français, quelques années après que ce dernier devienne un département à part entière de l’École normale supérieure de Hanoï, en 1967. "Nous n’avions que très peu d’outils d’apprentissage, nous devions nous partager trois dictionnaires pour une centaine d’étudiants… Je me suis donc d’abord tourné vers la littérature, qui était disponible en abondance : Ronsard, Lamartine, Victor Hugo, Flaubert, AlphonseDaudet… J’avais appris des passages entiers par cœur", se rappelle-t-il.
"La littérature française m’a nourri et m’a construit. De Victor Hugo j’ai pu apprendre le réalisme et l’importance de garder les pieds sur terre comme ses personnages des +Misérables+. De Lamartine et de Flaubert, j’ai appris le romantisme et l’optimisme, qui ne m’ont jamais quitté".
Un voyage d’étude déterminant
Un amour des grands auteurs qui le pousse à commencer sa carrière en tant que professeur de littérature française, en 1977, après cinq ans d’études supérieures. Deux ans plus tard, une opportunité unique se présente à lui : celle de poursuivre des études en France, à Paris.
"Je suis parmi les premiers boursiers à avoir eu la chance de partir étudier après la guerre. Avant cela, nous n’avions presque aucun contact avec les étrangers, et en étions réduits à discuter entre nous, avec les difficultés que cela implique. C’est pour cela qu’en 1979, quand je suis arrivé en France, j’étais émerveillé. Je me souviens d’avoir été époustouflé par les monuments. J’avais beau les connaître par cœur, sur le papier. Les voir en vrai, c’était fantastique".
Après une licence de science du langage à l’Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3, il poursuit avec un master, puis un diplôme d’études approfondies, avant de soutenir une thèse d’étude linguistique comparée du français et du vietnamien à la Sorbonne, en 1985. "J’ai étudié la didactique de la langue avec pour objectif d’enseigner le français. À l’époque, l’objectif du Département était principalement de former des professeurs pour le secondaire, avec un enseignement de masse".
Revenu au Vietnam la même année, Nguyên Lân Trung continue à enseigner cette langue, diversifiant ses activités. "Juste après mon retour de France, je suis revenu au Département de français. J’ai commencé à rédiger des cours de littérature, de pratique de la langue et de méthodologie, destinés à l’enseignement supérieur. J’étais le premier professeur à donner des cours de français à la Télévision nationale en 1989 et à La Voix du Vietnam à partir de 1991".
Une vie dédiée à la francophonie
Une profusion d’activités qui dépassent parfois l’enseignement du français, la connaissance de cette langue lui apportant parfois des opportunités uniques. "En 1992, j’ai commencé en tant que traducteur et assistant du réalisateur français Régis Wargnier pour le tournage du célèbre film +Indochine+, réalisé en grande partie au Vietnam. J’ai même fini par avoir un rôle, où j’étais le conducteur de Catherine Deneuve, la plus grande actrice française encore vivante !", s’exclame-t-il, avec admiration.
Le Professeur Nguyên Lân Trung (centre), à l’occasion d’une rencontre de l’Association d’amitié Vietnam - France de Hanoï dont il est président. |
Photo : NVCC/CVN |
Il sera aussi directeur d’une agence de voyages destiné aux touristes français, de 1991 à 2001. Sa curiosité le poussera même à s’engager dans le sport, en intégrant la direction de la Fédération vietnamienne de football (VFF), en qualité de vice-président, entre 2001 et 2010. Mais surtout, c’est à partir des années 1990 qu’il multiplie les initiatives et partenariats entre le Vietnam et la France.
"Depuis ces années-là, j’ai commencé à travailler beaucoup avec l’ambassade de France, pour des projets de coopération. J’ai aussi adhéré à l’Association d’amitié Vietnam - France de Hanoï, dont je suis l’actuel président, avant de participer à l’Association d’amitié et de coopération Vietnam - France, dont je suis vice-président".
Un investissement dans la coopération pour la francophonie né avant tout de son amour de la langue française. "Quand on aime une langue et qu’on communique grâce à elle, on garde à jamais un sentiment d’affection pour le pays qui la parle et ses hommes, explique-t-il avec émotion, avant de développer : La France joue toujours un rôle très important dans le cœur de beaucoup de Vietnamiens. Malgré une histoire faite de hauts et de bas, ce pays représente pour nous toujours quelque chose de positif, de sincère".
Pour le professeur devenu depuis 2015 président du Conseil de coopération et de développement de l’Université de langues et d’études internationales, la France et la langue française sont comme une seconde Patrie. "La France pour moi, c’est la moitié de ma vie. J’y ai passé sept ans et depuis je ne cesse de travailler dans les domaines francophones. Toutes mes activités sont reliées de près ou de loin à cette langue et à ce pays. C’est l’amour du français que j’ai envie de transmettre aux jeunes. Le français, c’est une belle langue, une langue d’amitié".
Jules Bois/CVN