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Des prétendantes au titre de Miss France 2024 lors de la cérémonie retransmise sur TF1, le 16 décembre 2023 à Dijon. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Originaire de Quaëdypre, un village proche de Dunkerque, Eve Gilles, 20 ans, a fait de sa candidature le symbole de la "diversité" féminine. "Personne ne doit vous dicter qui vous êtes", a-t-elle déclaré lors du concours "de beauté", faisant de son seul choix de garder les cheveux courts une différence par rapport aux autres Miss, toutes à la chevelure longue.
"Je veux défendre les valeurs des femmes fortes (...) Le body shaming, on le subit au quotidien, peu importe. On n'a tous nos imperfections. Chaque femme est différente, nous sommes tous uniques", a-t-elle expliqué en conférence de presse. "Nous avons l'habitude de voir des belles Miss aux cheveux longs, moi, j'ai choisi un look androgyne aux cheveux courts", a-t-elle ajouté.
La nouvelle Miss France, étudiante en deuxième année de licence mathématiques et informatique, n'a pour autant pas précisé sa position sur le concours de "beauté" auquel elle a participé et qui est largement contesté par les féministes.
Succédant à Indira Ampiot, Miss Guadeloupe et France 2023, Eve Gilles a été sélectionnée au terme d'un grand "show", selon les mots de Jean-Pierre Foucault, 76 ans et présentateur depuis 1995.
"Ca me fait rêver! Depuis toute petite, je ne rate pas une seule cérémonie", a témoigné la Dijonnaise Emma, 22 ans, venue avec sa plus belle robe à paillettes assister enfin au concours dans sa ville, plutôt que de simplement le regarder sur TF1. "Les Miss ont une chance folle. C'est un conte de fées", s'est extasiée sa copine, Sylvie, 23 ans, ne tenant pas en place sur son siège dans la salle de spectacle du Zénith.
Le concours intervient cependant après une condamnation par le tribunal de Lille mardi, de la filiale de TF1, e-TF1, et la société Endemol qui coiffait alors la Société Miss France. En cause la diffusion à près de huit millions de téléspectateurs des images de deux Miss régionales, filmée la poitrine nue, le 15 décembre 2018, par une caméra installée à leur insu.
Les organisateurs avaient présenté leurs excuses pour ce "couac" mais l'accroc ajoute à la polémique entourant le concours de beauté qui, malgré quelques réformes, reste très critiqué.
Désormais centenaire, Miss France est un symbole de "réussite", assure la Société Miss France. "C'est un ascenseur social", affirme sa présidente Alexia Laroche-Joubert, évoquant des Miss devenues "femmes d'affaires, médecins ou encore réalisatrices".
Les critères ont de plus été "modernisés", assure-t-elle. Une candidate n'a désormais plus de limite d'âge et peut être transgenre, mariée, mère... et même tatouée.
Une seule candidate trans s'est jusqu'à présent présentée. Elle a échoué à l'élection de Miss Paris, en 2022.
Ces petites révolutions avaient fait vaciller le célèbre chapeau de Geneviève de Fontenay, figure historique du concours de beauté. Décédée en août à 90 ans, un hommage lui sera rendu samedi soir, jetant un voile pudique sur les relations houleuses qu'elle entretenait avec l'organisation actuelle des Miss.
"Hate-Watching"
Cette "évolution" est cependant encore loin de satisfaire les féministes. "C'est du +feminist-washing+: on reste dans une élection très misogyne", estime Mélinda Bizri, de la Ligue des droits de l'Homme à Dijon, qui appelle au boycott de la cérémonie avec de nombreuses autres associations. "Les femmes se violentent toute leur vie pour atteindre ces critères fantasmagoriques, selon des schémas qui mettent très longtemps à se déconstruire", souligne-t-elle.
"Miss France est toujours aussi sexiste dans le principe de classer les femmes sur des critères de beauté", renchérit Violaine de Filippis, porte-parole d'Osez le féminisme!
Pour autant, chaque cérémonie compte parmi les audiences les plus élevées de TF1 (7,1 millions de téléspectateurs l'an dernier).
La soirée des Miss "est toujours un succès car c'est tout d'abord un divertissement", explique à l'AFP Virginie Spies, analyste des médias à l'Université d'Avignon.
Mais ce succès est en partie dû au "hate-watching", c'est-à-dire "regarder ce que l'on n'apprécie pas forcément pour pouvoir le critiquer", définit Mme Spies.
AFP/VNA/CVN