>>«Brosser le portrait de la galaxie des maths» avec Cédric Villani et Ngô Bao Châu
L’Espace - Institut français de Hanoi a vécu hier une soirée extraordinaire. À 17h45, des centaines de personnes étaient massées devant la porte de l’auditorium en attendant la rencontre avec les professeurs Ngô Bao Châu et Cédric Villani, programmée un quart d’heure plus tard. Tous étaient très enthousiastes à l’idée de cette table ronde sur le thème des mathématiques animée par deux lauréats de la prestigieuse médaille Fields, la plus haute récompense internationale dans le domaine des mathématiques, aussi prestigieuse que le prix Nobel, qui n'existe pas en mathématiques.
Des centaines d'auditeurs ont participé à la rencontre avec Ngô Bao Châu et Cédric Villani. |
La table ronde a débuté à 18h00 pétantes, dans un auditorium bondé. Le comité d’organisation a mis des chaises supplémentaires dans les allées de l’auditorium pour satisfaire l’affluence. Pas suffisant. Les derniers rentrés ont été invités à s’assoir... où ils pouvaient : sur la scène, derrière les orateurs ou contraints de rester debout. Les moins chanceux ont même été obligés de quitter les lieux, la contenance de l’auditorium étant limitée.
Malgré l’affluence, un silence absolu régnait lorsque la directrice de L’Espace, Eva Nguyên Binh, a présenté les deux animateurs, considérés comme «les étoiles des mathématiques».
Avant d’entamer les débats à proprement parler, les organisateurs ont projeté une vidéo sur la cérémonie de remise de la médaille Fields à Ngô Bao Châu et Cédric Villani, organisée en Inde en 2010. Puis, des salves d’applaudissements ont accueilli l’annonce par le comité d’organisation de ces deux mathématiciens.
Les maths ouvrent toutes les portes
Les auditeurs font la queue devant la porte de l'auditorium. |
«Parfois, en avez-vous marre des maths ?», a interrogé, non sans humour, le modérateur de la table ronde, Duong Nguyên Vu, directeur de l’Institut John Von Neumann de l’Université nationale de Hô Chi Minh-Ville.
Cédric Villani, surnommé la «Lady Gaga des maths» (sic), a insisté sur deux sentiments qui traversent souvent son esprit : le découragement quand il n’arrive pas à résoudre un problème et la joie quand il a réussi à trouver «quelque chose de nouveau». Et d’ajouter que souvent, il doit suivre un projet de recherche pendant plusieurs années.
Le professeur de l’Université Claude Bernard Lyon 1 a également dévoilé le classement du Wall Street Journal sur les meilleurs métiers du monde en 2009, établi sur de nombreux critères. Et ce ne fut ni princesse, ni PDG, ni avocat qui arriva en tête de la course, mais bien mathématicien ! Cédric Villani a souligné que les maths étaient utilisées dans de nombreux secteurs : médecine, biologie, informatique, commerce, etc. «Il est certain que les gens voient de plus en plus l’importance des maths».
Interrogé sur la nécessité d’orienter les enfants vers les mathématiques, Ngô Bao Châu a rappelé qu’il fallait toujours respecter le choix de ses enfants. Ce sont à eux de développer leurs passions et leurs talents.
L’amour (des maths) ne s’explique pas
La deuxième partie de la table ronde était consacrée aux questions du public. Et les candidats étaient légion. Pas simple pour le modérateur Duong Nguyên Vu.
Ngoc Trâm, étudiante à l’Université de la culture de Hanoi, s’est confiée : «J’étais une bonne élève en maths lorsque j’étais au primaire. Mais au collège, et pire encore au lycée, je ne comprenais plus rien. J’ai eu des zéros lors des épreuves du bac blanc. Pourquoi ?». Explications de Ngô Bao Châu : «Du primaire au collège, les maths passent des calculs avec des nombres aux symboles». Si le professeur n’a pas de solutions pour cette question, il est certain que l’on doit s’habituer aux symboles pour avancer dans l’étude de cette discipline.
Face à l’inquiétude de Vu Minh Hùng, élève de 5e classe (CM2) à l’École primaire Dang Trân Côn 2, sur la baisse de ses résultats en maths, Ngô Bao Châu l’a rassuré, lui disant qu’il avait «quelques années pour changer la situation» et qu’«il n’est jamais trop tard pour apprendre».
Interrogé sur la raison de son amour pour les maths, Ngô Bao Châu a conclu que «l’amour ne s’explique pas».
La table ronde s’est terminée vers 20h00. Beaucoup d’auditeurs ont exprimé leurs regrets de ne pas avoir pu poser de questions à ces deux grands mathématiciens. Avant d’en terminer, les étudiants sont montés sur l’estrade pour se faire photographier avec eux et immortaliser ce moment.
Texte et photos : Vân Anh/CVN