L'Union européenne pour une interdiction du commerce international du thon rouge

L'Union européenne (UE) a décidé le 10 mars de soutenir, dans la foulée des États-Unis, une interdiction du commerce international du thon rouge qui reviendrait à arrêter la pêche industrielle de ce poisson très prisé pour les sushis.

Au siège de l'UE À Bruxelles (Belgique), les ambassadeurs des 27 pays membres de cette alliance se sont mis d'accord sur cette position commune pour la prochaine réunion de la CITES, l'organisation de 175 membres affiliée à l'ONU chargée de la protection des espèces en danger, qui s'ouvre samedi à Doha. La question d'une interdiction du commerce du thon rouge de l'Atlantique au niveau mondial y sera posée, une première pour une espèce faisant l'objet d'une telle exploitation commerciale.

Les organisations de défense de l'environnement, Greenpeace et WWF en tête, ont applaudi ce ralliement à une mesure qu'elles réclament depuis des mois.

En un demi-siècle, de 1957 à 2007, les stocks de thon rouge ont baissé de 75% et de plus de 60% au cours des 10 dernières années, selon les défenseurs de l'environnement.

L'UE rejoint les États-Unis qui s'étaient prononcés la semaine dernière en faveur de l'interdiction. "Désormais, d'autres pays devraient suivre", se réjouit Sergi Tudela, du WWF.

Mais les Japonais, qui absorbent 80% des captures mondiales de ce poisson à la chair savoureuse, ont promis de "tout faire" pour empêcher son adoption par la CITES.

Le ralliement de l'UE, qui compte les plus importants États pêcheurs -France, Espagne et Italie totalisent à eux seuls 50% des captures- ne s'est néanmoins pas fait sans conditions.

L'UE proposera ainsi à Doha une entrée en vigueur différée de l'interdiction, suggérant d'attendre l'avis des scientifiques de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (CICTA), qui regroupe les États pêcheurs et doit se réunir en novembre prochain.

La décision serait ensuite renvoyée au comité permanent de la CITES, pour une entrée en vigueur au plus tard en mai 2011, selon la proposition européenne. Pour Saskia Richartz, de Greenpeace, on donne ainsi "plus de temps à l'industrie de la pêche pour vendre les prises de cette année".

Les Européens plaident en outre pour le maintien de "dérogations" pour la pêche artisanale dans les eaux nationales des États pêcheurs, a-t-on précisé de source diplomatique.

Réalisée à la palangre ou à la canne notamment, cette pêche artisanale pourrait continuer dans des zones bien délimitées, à destination du marché national.

L'interdiction affecterait surtout l'industrie des thoniers senneurs, de grands navires qui capturent vivants les bancs de thon rouge en vue de les engraisser pendant plusieurs mois dans des "fermes", sortes de cages flottantes.

En France, les thoniers senneurs réalisent à eux seuls 85% de la pêche au thon rouge, tournée surtout vers l'exportation. Pour les dédommager, l'UE s'est en outre engagée le 10 mars à "étudier" la mise en oeuvre d'aides financières spécifiques. Mais une belle dispute se prépare entre les États pêcheurs riverains de la Méditerranée et les autres, plus réticents à mettre la main au portefeuille, selon un diplomate européen.

La décision a été prise à la majorité qualifiée, contre l'avis notamment de Malte qui abrite plusieurs fermes, mais avec le soutien notamment de la France, selon un autre diplomate.

AFP/VNA/CVN

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