Un ours au zoo de Bratislava, en Slovaquie. |
«Les deux-tiers des gens étaient favorables aux ours il y a quelques années, mais la proportion s’est inversée», témoigne Andreas Agreiter, un fonctionnaire de l’administration italienne chargée d’indemniser les éleveurs.
Car comme les loups, les ours bruns croquent parfois un mouton. Mais à la différence des loups, des ours ont été mis en cause dans quelques attaques, parfois mortelles, visant des humains. Si le pire ne s’est pas produit en Europe de l’Ouest, un homme a été blessé en Italie l’été dernier encore.
La nouvelle a fait peur à certains habitants, rappelant d’autres polémiques survenues en France notamment, dans le massif des Pyrénées.
«Je ne suis vraiment pas fan des ours», témoigne Monika Windegger, agricultrice de montagne à Nals, dans la région italienne du Haut-Adige, frontalière de l’Autriche, où les plantigrades ont été réintroduits il y a une quinzaine d’années.
Monika et son mari ont perdu quatre brebis cette année dans des attaques d’ours. Surtout, dit-elle, «j’ai peur pour mes enfants. On ne peut plus se promener en toute sécurité comme on pouvait le faire avant».
Chassés pour leur fourrure
Un ours mâle pèse jusqu’à 350 kilos et se déplace bien plus vite qu’un humain. Dressé sur ses pattes arrière, il mesure jusqu’à deux mètres de haut.
Les ours sont omnivores et se nourrissent aussi bien de baies et de noix que d’animaux de toutes tailles. Avant l’hibernation, ils peuvent engloutir jusqu’à 40 kilos de nourriture par jour.
Un ours brun européen. |
«L’ours est un animal merveilleux, mais dans une zone densément peuplée comme celle-ci, cela ne peut pas marcher», assure Hans Gessebner, un retraité qui a entouré ses ruches d’une clôture électrique, après que des ours ont détruit plusieurs d’entre elles.
Les ours bruns ont longtemps été communs dans toute l’Europe, l’Asie, les montagnes d’Afrique du Nord et l’Amérique du Nord jusqu’au Mexique. Mais chassés pour leur fourrure et privés de leurs territoires par l’expansion de la présence humaine, ils ne sont plus présents que sur 2% de leur habitat originel dans le monde.
La moitié des quelque 200.000 survivants se trouvent en Russie. Ils sont environ 30.000 en Amérique du Nord, et 8.000 en Europe.
Comme dans les Pyrénées, où la dernière ourse de pure souche locale, Cannelle, avait été abattue par un chasseur français en 2004, une dizaine de plantigrades arrivés de Slovénie ont été implantés en Italie du Nord à la fin des années 1990. Ils y seraient actuellement entre 40 et 60. Certains ont essaimé en Suisse, en Autriche et en Allemagne.
De l’utilité des ours
Les défenseurs des ours rappellent que les grands prédateurs dont ils font partie sont des «espèces-clé», essentielles pour l’équilibre des écosystèmes.
L’un des exemples les plus connus est celui de la réintroduction des loups dans le parc national de Yellowstone (Ouest des États-Unis) dans les années 1990. Celle-ci a conduit les proies des loups, notamment les cerfs, à éviter les clairières. Ce faisant, la pousse de la végétation a été favorisée, offrant une protection à d’autres espèces animales et stabilisant le sol, qui est mieux protégé contre l’érosion.
Les ours, dit le WWF, régulent quant à eu les populations d’autres espèces, et contribuent à la dissémination des graines.
En Haut-Adige, une personne par an en moyenne rapporte avoir croisé un ours. «Statistiquement, un promeneur court plus de risques de tomber d’une falaise, de se faire écraser par une voiture ou de se faire attaquer par un chien sans laisse», dit Andreas Agreiter.
Dans l’Est de l’Europe, d’où les ours n’ont jamais disparu - il y en aurait quelque 500 pour la seule Slovénie -, leur présence ne suscite pas de controverse. En Bulgarie et en Roumanie, pays où pourtant un plantigrade a encore tué un retraité en 2012, les touristes vont les observer. Et le «taux d’approbation» des plantigrades atteint 85% en Croatie.
«J’admets volontiers que les ours sont parmi les animaux européens les plus difficiles à réintroduire», reconnaît le spécialiste britannique George Monbiot, l’un des principaux promoteurs du «réensauvagement».
«Mais les ours», ajoute-t-il, «sont aussi une composante essentielle du vivant. À mes yeux, cela serait une grande tragédie que nous ne puissions trouver le moyen de vivre avec eux».
AFP/VNA/CVN