L’exposition "Tubes de respiration", une rétrospective de l’urbanisation

L’exposition "Tubes de respiration" de 16 artistes vietnamiens est un dialogue entre architecture et art contemporain. Les œuvres expriment la vision des artistes devant les problèmes sociaux alarmants de la vie citadine.

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L’installation Nettoyage de la rivière Tô de Vu Xuân Dông.

"Tubes de respiration" se déroule jusqu’au 7 juillet au 342, rue Bà Triêu, à Hanoï. L’exposition s’inspire des maisons tubes, une spécificité architecturale de la capitale. Tournons-nous vers le passé : de 1885 à 1995, quelque 30.000 parcelles de terrain ont été aménagées de bâtisses à l’image de tubes, d’une longueur de 25 m, sur une largeur de 4 à 6 m. Avec l’élargissement de la capitale, le nombre de ces maisons tubes n’a cessé d’augmenter. Elles sont les témoins du développement urbain de Hanoï.

L’exposition se déroule dans une maison tube typique. Haute de 8 étages, elle est le fruit de la créativité de deux frères architectes Vu Hoàng Son et Vu Hoàng Hà, sur le terrain hérité de leurs parents. L’espace se veut ouvert : les grands murs transparents et les petites fenêtres de verre coloré accueillent la lumière naturelle. Les murs en béton sont laissés bruts. Les architectes ont décidé de garder le matériel principal de la maison intact et nu. Le bâtiment accueille différents espaces : un café open-space, un magasin de décoration d’intérieur, le lieu d’exposition où nous découvrons "Tubes de respiration", un cabinet d’architectes et enfin une partie habitable occupée par les résidents.

Les impressions sur verre baptisées Trous lumineux de Pham Khac Quang profitent des fenêtres en verre coloré du bâtiment.

Les artistes ont été invités à étudier les particularités de la maison afin de trouver l’inspiration pour leurs créations. "J’ai passé deux semaines à découvrir la maison. Chaque jour, j’en ai observé tous les recoins pour saisir l’âme du lieu", informe Nguyên Thi Hoài Giang, l’auteur de l’œuvre Se familiariser. La jeune artiste a esquissé chaque détail de la maison depuis le dessin architectural. Le nom de l’œuvre exprime les impressions de l’artiste vis-à-vis du bâtiment : tout d’abord inconnu, l’artiste s’est familiarisée avec le lieu avec le temps.

"Pourquoi ai-je décidé d’utiliser le dessin architectural du bâtiment ? Je voulais lui donner une nouvelle vie car cet objet est doté d’une forte charge émotionnelle. Il contient l’histoire des détails techniques du bâtiment, à travers lesquels on peut ressentir l’énergie et la créativité des architectes qui ont créé le bâtiment", exprime Hoài Giang. Elle ajoute également qu’en réutilisant ces documents, elle participe aussi, à sa façon, à édifier la maison.

Vu Kim Thu réalise son oeuvre sur le vitre du bâtiment.

D’autres œuvres sont en harmonie parfaite avec le bâtiment. L’installation Disproportion parallèle de Vu Kim Thu suscite l’émotion du public. Sur une grande vitre donnant sur le jardin verdoyant, la lumière traverse le dessin de l’artiste effectué sur du papier washi. L’arrière-plan vert s’entremêle au dessin et en compose les détails du second plan, ce qui provoque un effet visuel très spécial.

Les impressions sur verre baptisées Trous lumineux de Pham Khac Quang profitent de la lumière perçant les petites fenêtres en verre coloré du bâtiment. La lumière des fenêtres rend les dessins vivants. Les spectateurs peuvent observer les rayons du soleil ricocher sur la voûte des arbres et les différentes nuances des dessins.

Peindre les revers de l’urbanisation

L'image sur les maisons noires des pauvres de Lê Dang Ninh.

Plusieurs artistes ont traité des impacts de l’urbanisation sur la physionomie des villes. L’installation Nettoyage de la rivière Tô de Vu Xuân Dông tire la sonnette d’alarme sur la pollution des rivières de la capitale. L’urbanisation incontrôlée cause la mort de certaines rivières. L’artiste veut faire entendre sa voix haut et fort pour sauver les rivières liées étroitement à l’histoire de Hanoï.

Nguyên Thê Son a réalisé 5 sculptures représentent des maisons tubes dont les façades donnent sur la rue. Les façades des maisons sont étouffées par les panneaux publicitaires gigantesques. Une image que l’on retrouve partout à Hanoï. Au pied de ces bâtiments, les vendeurs ambulants cherchent à gagner leur vie péniblement et les motos s’entremêlent dans un rythme précipité.

Les installations Maison noire et Haut et Bas de Lê Dang Ninh décrivent la vie des populations démunies vivant sur les maisons flottantes du fleuve Rouge à Hanoï et du fleuve Saigon à Hô Chi Minh-Ville. Les personnes les plus vulnérables doivent supporter une vie précaire dans des maisons vétustes, sans le confort minimal. Ils restent en marge du développement économique à grande vitesse des deux plus grandes villes du Vietnam.

Grâce à leurs œuvres : dessins, installations, vidéos, sculptures, les artistes réussissent à toucher au plus profond le coeur du public et à le sensibiliser aux conditions de vie des laissés-pour-compte du miracle de l’urbanisation.

Texte et photos : Vân Anh/CVN

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