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Les enfants considèrent souvent les gadgets troublants de Doraemon comme la "porte qui mène partout" ou la classique machine à voyager dans le temps. |
Photo : CTV/CVN |
Un matin, de très bonne heure, mon petit-fils Ngoc Khánh, âgé de 5 ans, saute du lit pour me dire avec allégresse :
- La nuit dernière, le But m’est apparu en songe et m’a donné un énorme gâteau de cannelle…
- T’as rêvé du But, tu n’as pas rêvé de Doreamon ? Lui demandai-je en souriant.
- Grand pépé, je préfère le But.
Je ne sais pas si tous les enfants vietnamiens entre 5 et 14-15 ans pensent comme mon petit-fils, car ils raffolent maintenant de Doreamon. Ce dernier, le chat-robot astucieux, est un personnage de BD créé par Fujiko Fujio dont le comics a connu au Japon 105 éditions entre 1976 et 1991, la même fureur de lire s’est emparée des enfants du Vietnam depuis fin 1992. Lors du Têt dernier, Hô Chi Minh-Ville a vendu 400.000 exemplaires des quatre premiers fascicules de Doraemon, chiffre record de best-seller en ce temps où l’édition vietnamienne doit faire face à des difficultés nées de l’économie marchande nouvellement adoptée.
Doraemon a conquis le public enfantin vietnamien, surtout en ville, comme il a fasciné les gosses japonais, thaïlandais, indonésiens, etc., sans doute parce que son auteur a su marier les rêves éternels de l’enfance avec la psychologie de l’âge télématique, les soucis moraux de l’Orient avec les enseignements d’un Piaget et les expériences d’une Astrid Lingren.
Au secours des pauvres
Les enfants vietnamiens aiment bien le But dans les contes populaires. |
Photo : ST/CVN |
Mais revenons au But de mon petit-fils. Le mot But est la transcription phonétique populaire de "Bouddha", la transcription savante sino-vietnamienne étant Phât. Le bouddhisme fut introduit au IIe siècle au Vietnam par des missionnaires venus de l’Inde par voie maritime, et surtout par les bonzes chinois par le canal des sutras traduits en chinois. À partir du Xe siècle, il devient rapidement la religion prépondérante, se partageant l’empire spirituel avec le confucianisme et le taoïsme, sans parler de l’animisme qui remonte à des millénaires avant l’ère chrétienne.
Le bouddhisme savant avec ses concepts des quatre Nobles Vérités, du Prajna et du Satori, s’est transformé chez le peuple en une vague croyance basée sur la pratique du Bien et la Compassion universelle, baume indispensable à une population menacée par les catastrophes naturelles et les invasions étrangères au fil d’une histoire mouvementée et parfois tragique.
Le bouddhisme populaire vietnamien a créé son propre Bouddha, le But qui est bien loin du détachement olympien de Çakyamuni. Le But vient au secours des pauvres et des déshérités qui aspirent au bonheur terrestre et non à lointain et brumeux Nirvana.
Typiques à ce sujet sont deux contes populaires, Cây tre tram đôt (Bambou à cent entrenœuds) qui rappelle L’Oie d’or des frères Grimm et Tâm Cám qui constitue la réplique de la Cendrillon de Perrault. Chaque fois que le héros ou la héroïne pleure sur un malheur causé par de vilains gens, richard ou marâtre, le Bouddha apparaît pour lui demander :
- Pourquoi pleures-tu, mon enfant ?
Puis, tout est bien qui finit bien.
(Juin 1993)