L’espoir d’un futur radieux tombé à l’eau : les conséquences du changement climatique au Vietnam

Dès 1950, Marguerite Duras écrit sur l’obstination de sa mère à construire Un barrage contre le Pacifique en Indochine française, alors que ses plantations se voient constamment détruites par les forces de la nature. Aujourd'hui, c’est un tout autre défi qui se présente au Vietnam, l'un des pays les plus susceptibles d'être touchés par les conséquences du changement climatique, selon le GIEC.

Cliché d’une de mes excursions le long de la Mer Orientale, en 2011.

Originaire du Sud du pays, je rêve depuis mon plus jeune âge d’un jour rejoindre la côte pour m’y installer. Cependant, c'est sans compter sur la menace climatique qui pèse sur le Vietnam. Hausse du niveau de l'eau, extrêmes sécheresses, perturbations météorologiques… Malgré sa faible empreinte carbone au niveau mondial, ce pays au climat tropical et très humide est en proie à de nombreux risques environnementaux. En 2019, le think-tank allemand Germanwatch attribuait déjà au Vietnam un indice de risque climatique de 29.83, faisant de lui le 6e pays le plus menacé par des événements climatiques.

L'une des régions les plus vulnérables est sans aucun doute le delta du Mékong. D’une superficie de 39.000 km², il abrite 17 millions de personnes et se situe à une altitude moyenne de 80 cm au-dessus du niveau de la mer. Cette région représente 70% des productions agricoles et d’aquaculture du pays, notamment grâce à ses cultures de riz. Toutefois, avec une montée du niveau de l’eau estimée à 3,6 mm par an de 1993 à 2018, le littoral est à présent menacé.

Selon les projections, si le niveau d'eau venait à croître d'un mètre, 40% du delta seraient inondé, entraînant la disparition de cette même part de production de la région. Dao Xuan Lai, le chef de l’unité "Changement climatique et environnement" du Programme des Nations unies pour le développement du Vietnam, alertait dès 2017. Après une tempête survenue en raison du dérèglement climatique, de nombreuses inondations et glissements de terrains se sont effectivement produits dans la région.

À cela s’ajoutent de multiples autres conséquences climatiques. Hô Chi Minh-Ville, traversée par la rivière de Saigon, se voit par exemple également confrontée aux risques d’inondations. Les Fonds monétaires internationaux redoutent quant à eux une hausse des émissions de gaz à effet de serre du pays, menaçant de tripler d’ici 2030, en raison de la forte dépendance du pays aux énergies fossiles. Par ailleurs, des impacts socio-économiques sont aussi à craindre. Une enquête sur le niveau de vie des ménages au Vietnam estime qu’un jour supplémentaire passé au-dessus de la barre des 33°C entraîne une baisse des revenus et une hausse des inégalités. En effet, les foyers à faibles revenus connaissent une perte de 1,51% de leur revenu. Enfin, en tant que 5e producteur mondial de riz, ce produit assure une sécurité alimentaire, des échanges commerciaux et 2/3 des emplois ruraux du pays. Des impacts sur sa production engendrent donc de fortes conséquences macro-économiques.

Pour faire face à ces défis, le gouvernement vietnamien a d’une part voté la Résolution 120, visant à "répondre activement au changement climatique" et "renforcer la gestion des ressources naturelles et la protection de l’environnement". Elle a notamment pour objectif de rendre 80% de la production du pays durable d’ici 2050. D’autre part, une politique d'"organisation de l’espace territorial" a été instaurée pour diviser les terres selon leur écosystème local, afin d’adopter la meilleure approche pour parvenir à ces objectifs. Des organisations internationales tentent elles aussi de répondre à ces défis, comme ce fut le cas lors de la Conférence du delta du Mékong de la Banque mondiale en juin 2019, avec l’attribution de 880 millions d'USD supplémentaires au pays pour implémenter sa résolution. À l’échelle locale, des initiatives telles que la "planification régionale proactive" de la Commission du Mékong aspirent à fonder un projet d’investissement conjoint entre les différents acteurs, pays et secteurs, dans ce même but.

Si des mesures sont mises en place par différents acteurs, elles ne sont néanmoins pas nécessairement bien accueillies par la population. Une étude sur la perception des risques du changement climatique chez les agriculteurs du delta du Mékong révèle par exemple que les mesures sont différemment perçues, selon que l’information provienne d’un proche, d’internet ou des autorités locales.

Mon espoir de rejoindre la côté n’est toutefois pas éteint, alors que le Programme des Nations unies pour le développement décrit un grand potentiel des énergies renouvelables au Vietnam. Cela impliquerait toutefois un investissement massif du secteur public aussi bien que privé. C’est pourquoi, pour assurer un avenir radieux au Vietnam, il est important de s’éduquer au mieux et d’informer autrui du mieux que l’on peut.

Tran Emilie/CVN

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