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Boeing pourrait riposter à l'alliance Airbus - Bombardier en s'associant au brésilien Embraer dans le moyen-courrier tout en lançant un nouvel avion |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"Tout ce qui est bon pour Airbus est mauvais pour Boeing", confie Jim Corridore expert de CFRA, résumant le sentiment général dans le monde de l'aéronautique, après l'annonce inattendue dans la nuit de lundi 16 octobre à mardi 17 octobre d'un partenariat stratégique Airbus - Bombardier en pleine dispute commerciale entre Washington et Ottawa au sujet des avions CSeries.
Ce rapprochement permet au premier d'ajouter dans son catalogue le segment moyen-courrier de 100 à 150 places à moindre coût car l'accord lui offre 50,01% des parts dans le programme CSeries du second sans qu'il ne débourse un centime.
Airbus pourra en outre désormais se concentrer sur le haut de sa gamme de moyen-courriers, des avions de 180 places et au-delà, et conforter son avance dans ce secteur sur Boeing qu'il domine déjà avec les A320neo remotorisés.
"Nous pensons qu'Airbus veut mettre la pression sur Boeing dans les moyen-courriers et étendre sa présence nord-américaine", en déduit Chris Higgins, analyste à MorningStar.
"Cet accord n'a aucun impact ni effet sur les procédures en cours. Toutes les taxes d'importation enfin imposées au CSeries (qui sont désormais de l'ordre de 300%) devraient être payées sur chaque appareil CSeries importé (...) ou il ne sera pas autorisé dans ce pays", a insisté de son côté le directeur juridique de Boeing Michael Luttig.
Renouveler
Un modèle réduit d'un Embraer E195-E2, un monocouloir concurrent direct du CSeries de Bombardier |
Photo : AFP/VNA/CVN |
L'avionneur américain devrait sans surprise demander aux autorités de la concurrence de s'opposer à l'accord, dont il devrait ressentir les conséquences à l'horizon 2025, date à laquelle les ventes du monocouloir 737 MAX sont appelées à se tasser, avance Michel Merluzeau chez Air Insight.
"Je ne vois pas la base juridique sur laquelle les régulateurs vont se fonder pour empêcher l'alliance", fait toutefois valoir Jim Corridore.
C'est surtout sur le terrain technologique que Boeing devrait répondre à ses rivaux car Airbus va mettre les moyens pour accompagner le développement et le succès commercial du CSeries, s'accordent les experts.
D'autant qu'une version allongée de ce programme, le CSeries 500, bardée des dernières technologies, devrait arriver sur le marché d'ici 2025 pour concurrencer le 737 MAX 8 de Boeing pouvant transporter jusqu'à 200 passagers.
"Boeing va devoir renouveler beaucoup plus tôt que prévu sa gamme de monocouloirs s'il veut garder l'initiative technologique", souligne Michel Merluzeau, tandis que Chris Higgins estime que l'avionneur n'a plus d'autre choix que de combler le trou dans son catalogue entre le 737 MAX (jusqu'à 220 passagers) et le 787 (à partir de 250 sièges) en lançant un nouvel avion.
"Nous pensons que les chances de lancement d'un nouveau programme par Boeing dans les douze prochains moins ont désormais augmenté et sont au-dessus de 50%", estime M. Higgins.
"Je suis convaincu que ça va se faire maintenant", renchérit M. Merluzeau.
En juin, Boeing a laissé entendre qu'un tel projet, le "MoM" (milieu du marché), était dans les tuyaux pour répondre à la demande des compagnies aériennes qui veulent des monocouloirs pouvant effectuer de longues distances.
Boeing pourrait également renforcer ses liens avec l'avionneur brésilien Embraer, dont le monocouloir E2 est un concurrent direct du CSeries. Les trois versions de cette famille E2 (E175, E190 et E195) doivent entrer en service entre 2018 et 2020.
"Il est dans l'intérêt d'Embraer de s'associer à Boeing car battre Bombardier avec son offre de E2 n'était pas difficile quand l'avenir du CSeries était incertain, mais la donne a changé", argumente Chris Higgins.
Les deux constructeurs aéronautiques travaillent déjà ensemble sur l'avion de transport militaire KC-390, Boeing s'occupant notamment de la partie commerciale et marketing.
Le rapprochement Airbus-Bombardier intervient au moment où le second est soumis à une forte pression des États-Unis qui ont imposé des droits préliminaires de 220% sur ces avions CSeries importés sur leur sol, ainsi qu'une taxe antidumping de 80%.