>>Une famille hanoïenne poursuit la fabrication des moules à gâteaux de lune depuis des décennies
>>Trân Van Ban, gardien de l’esprit des gâteaux de lune
Trân Van Ban fabrique depuis 40 ans des moules à gâteaux de lune en bois. |
Photo : VOV/CVN |
Chaque année, environ deux mois avant la Fête de la mi-automne, la famille de Trân Van Ban, du village de Thuong Cung, en banlieue de Hanoï, s’affaire à fabriquer des moules à gâteaux de lune en bois pour répondre aux commandes. Poursuivant ce métier depuis 40 ans, sa famille est l’une des rares à Thuong Cung à le maintenir jusqu’à ce jour car pour des raisons économiques, la plupart des villageois se sont tournés vers d’autres produits d’art et d’artisanat dont l’écoulement est meilleur.
M. Ban raconte qu’il y a une dizaine d’années, à chaque automne, l’atelier familial fonctionnait à plein régime du fait de nombreuses commandes provenant du Nord au Sud, et même de l’étranger. "Nous produisions environ 500 à 600 pièces, chacune vendue entre 150.000 et 300.000 dôngs, en fonction de sa taille. Le prix des grands moules pouvait monter jusqu’à un million de dôngs. Il y a des années où grands-parents, parents, enfants et petits-enfants se mobilisaient pour répondre aux commandes à temps".
Concurrence du plastique
Ces dernières années, la production de sa famille a connu une chute considérable avec l’apparition des moules plastiques à prix compétitifs. En particulier, depuis l’an passé, "en raison de l’épidémie de COVID-19, les commandes ont chuté de deux tiers par rapport aux saisons automnales précédentes", se soupire-t-il.
Pourtant, M. Ban ne tombe pas dans la morosité. Il reste toujours enthousiaste avec ce métier et affirme qu’il veut "le préserver et le transmettre à la génération suivante pour qu’il ne se perde jamais". De plus, selon lui, il vit encore bien de cet artisanat car nombreux sont ceux qui préfèrent les moules en bois traditionnels, bien que ceux en plastique envahissent les marchés.
Leur fabrication demande surtout un vrai savoir-faire qui ne s’acquiert qu’après de longues années de pratique. "L’important est de choisir du bois solide résistant aux termites". À l’origine, ces formes à gâteaux étaient faites en Diospyros decandra, un arbre fruitier qui donne du bois bien solide. Mais, cette essence étant devenue rare, sa famille est passée à l’utilisation de bois de nacre dont la qualité est approximativement égale. "Traditionnellement, les moules sont ronds ou carrés, mais se déclinent aussi souvent sous d’autres formes avec des motifs décoratifs allant des idéogrammes aux feuilles en passant par des animaux (dragon, licorne, tortue, phénix)… pour séduire une clientèle de plus en plus exigeante".
Pour créer une forme à gâteaux, l’artisan doit consacrer beaucoup de temps et d’efforts et suivre différentes étapes : découpe du bois, séchage, sculpture de motifs… "Auparavant, un moule était complètement fait à la main. Rien que l’étape d’aplanir son intérieur nécessitait une journée entière. Maintenant, grâce à l’aide de machines, le temps s’est beaucoup raccourci. Cependant, l’étape la plus importante consistant à ciseler pour créer des motifs décoratifs doit toujours être réalisée entièrement à la main. Elle demande d’être habile et méticuleux pour rendre les motifs bien unis et lisses, élément important pour un produit parfait".
Apposer son sceau
Comme Trân Van Ban, Pham Van Quang est aussi un fabricant de moules à gâteaux de lune issu du village de Thuong Cung. Mais au début du XXe siècle, il s’est installé dans le centre-ville de Hanoï, précisément rue Hàng Quat, pour ouvrir un commerce. Actuellement, chaque jour dans sa petite maison, M. Quang confectionne des formes traditionnelles, par passion et aussi pour préserver un savoir-faire ancestral auquel il est attaché depuis plus de 40 ans.
La confection d’un moule demande un vrai savoir-faire qui ne s’acquiert qu’après de longues années de pratique. |
Photo : VOV/CVN |
"Dans le passé, on consommait surtout des gâteaux de lune à Hanoï, Hai Phong et Nam Dinh (Nord). Mais au fil des années, la consommation s’est élargie à d’autres villes et provinces et la capitale est devenue le grand fournisseur de moules. Il y a eu des années où j’ai vendu plusieurs centaines de pièces et je n’arrivais pas à répondre à toutes les commandes", raconte-t-il.
De nos jours, les formes à gâteaux en bois entrent en concurrence directe avec leurs homologues en plastique, avec des répercussions énormes sur le commerce des artisans. Afin de conserver ce métier, M. Quang cherche à faire la différence en ajoutant dans ses moules des gravures au nom de la propriétaire, des messages…
"Avec l’évolution de la société, les artisans doivent savoir s’adapter afin de survivre. Pour bien vendre, le plus difficile est de comprendre vraiment le goût du client. Créer des modèles aux motifs attractifs, personnalisés, voilà le chemin qu’il faut suivre !", affirme-t-il, résolument optimiste.
Pour cet artisan, un moule à gâteaux de lune est une véritable œuvre d’art, du fait des motifs inspirés de scènes de la vie et de la nature : animaux, fleurs de lotus, soleil, lune… Ainsi, lorsqu’il en vend à des Vietnamiens d’outre-mer, il n’oublie pas d’y associer une petite présentation sur la signification de ces motifs.
Minh Huê - Linh Thao/CVN