Une œuvre des plus originales née de l'esprit du peintre Vo Quy Quôc qui veut dépeindre, de sa propre manière, la résistance héroïque du peuple vietnamien pour l'indépendance nationale dont le point culminant a été la victoire légendaire de Diên Biên Phu en 1954, qui a mis fin à la première guerre d'Indochine au Vietnam. Sans oublier la vénération pour le général Vo Nguyên Giap, commandant en chef des forces armées du Vietnam d'alors.
Constitué d'une myriade de petits morceaux de coque de noix de coco finement taillés et très nuancés de couleurs, ce tableau magnifique retrace toute une longue période héroïque du Vietnam : des scènes reflétant la souffrance du peuple sous la domination française, l'offensive contre les agresseurs, des scènes décrivant la campagne de Diên Biên Phu avec de nombreuses images devenues historiques : les soldats tirant les canons vers le front, les miliciens transportant des munitions sur leurs vélos, le drapeau rouge à l'étoile d'or (du Vietnam) hissé sur l'état-major du général français de Castries, le portrait du général Vo Nguyên Giap en uniforme, ou encore l'image des 34 premiers militants de l'Armée vietnamienne de propagande et de libération. Se distingue en particulier l'image du Président Hô Chi Minh au front à la frontière, en 1950.
Chose remarquable, c'est que ce tableau sera "immortel", selon l'auteur, grâce à la matière première utilisée - la coque de noix de coco séchée - qui est une des plus tenaces.
Pour réaliser cette oeuvre picturale colossale, Vo Quy Quôc et les artisans de son atelier ont dû consacrer 40 jours et nuits d'affilée. Un volume énorme de matières premières a été employé : 9.000 coques de noix de coco, 2 kg de coir (fibre de noix de coco), 5 kg de pédoncule et tige de coco, 9 cadres en fer, 9 tableaux en bois, 50 litres de maroufle...
Celui qui réveille "l'âme de la coco"
Originaire de la province de Quang Binh (Centre) où poussent en abondance les cocotiers, Vo Quy Quôc, 27 ans cette année, suit une carrière de peintre depuis tout jeune, poursuivie après ses diplômes de l'Université des beaux-arts de Huê (Centre), puis de l'Université des beaux-arts de la décoration de Dông Nai (Sud). Au lieu de dessin, de toiles, de pinceaux... ou encore d'arts appliqués réalisés au moyen d'ordinateur comme tant d'autres collègues, ce jeune peintre s'est consacré au cocotier dans lequel il a découvert des "matières premières sans précédents, disponibles et particulièrement propres à la création picturale". Chevauchant une vieille Vespa, il a souvent été à Bên Tre, le royaume de la coco dans le delta du Mékong où il a examiné en détail les différentes parties de cet arbre : la tige, la feuille, le coir, la coque de la noix de coco..., mais dans l'optique de les utiliser pour faire de la peinture.
Dans les yeux de ce jeune peintre, la coque de la noix de coco n'est plus un déchet, au contraire, elle possède une grande valeur pour ne pas dire qu'elle "a son âme". Il y a trouvé une "matière première riche de couleurs nuancées", allant du blanc ivoire au brun le plus foncé en passant par un jaune nuancé suivant l'âge de la noix. Ce qui permet de "réaliser une œuvre picturale. L'important, c'est de savoir combiner les couleurs provenant de ces matières premières naturelles", dit-il.
Pour faire une peinture en coque de noix coco, outre un sens esthétique et un esprit créatif, le peintre doit être habile de ses mains comme un menuisier, sachant manier le ciseau. Vo Quy Quôc a réussi à créer son premier tableau alors qu'il était étudiant à l'Université de Dông Nai. Seulement 4 ans après la création de son atelier à Biên Hoa (province de Dông Nai) en 2003, il avait à son actif quelque 1.000 tableaux en cette matière. Les œuvres de ce jeune peintre "sans pinceau" forcent l'admiration des gens, professionnels comme amateurs.
Un nouveau style pictural caractéristique du Vietnam
Mais cela ne s'arrête pas là. Début 2007, Vo Quy Quôc s'est mis à matérialiser son rêve d'esquisser un tableau sur l'Oncle Hô bien aimé. Titré "La chanson de solidarité" (nom d'une chanson très connue chez les Vietnamiens), ce tableau de grand format (3,2 m x 3,2 m) représente en son centre le Président Hô Chi Minh debout, chef d'orchestre avec baguette à la main droite. Tout autour du "Père de la nation" surgissent les images représentant les 54 ethnies du Vietnam. Derrière, figure une carte du pays, légèrement agrémentée de divers paysages habituels du Vietnam : fleuves, ruisseaux, végétations, fleurs, pagodes, tours... Chose extraordinaire, cette carte nationale, en forme de S donc, stylise un dragon prenant son envol - symbole de la puissance et de la prospérité du pays.
Le tableau a pris à Vo Quy Quôc et ses 6 collègues une bonne année de travail sans relâche, comprenant 11 étapes différentes : l'esquisse sur toile puis sur bois, la taille des millions de pièces de coque de coco différentes de couleur comme de forme, le polissage, l'assemblage et le collage sur le bois. À elle seule, l'esquisse sur toile a exigé 2 mois pleins. Quy a dû alors se rendre sur les lieux, dans des contrées montagneuses de par tout le pays, pour rechercher des documents et examiner les modes de vie des ethnies minoritaires. L'assemblage a, lui, duré 30 jours et nuits d'affilée. Achevé début 2008, La chanson de solidarité a été d'emblée reconnu comme la plus grande peinture en coque de la noix de coco, remplaçant Vietnam, mon pays natal dont Vo Quy Quôc est également l'auteur, et qui détenait à cette époque le record national.
Encore une fois, le jeune peintre a battu son record avec Les héros de Diên Biên.
La peinture en coque de noix de coco est un nouveau style pictural, au Vietnam comme dans le monde, selon le peintre sans pinceau. "Qu'elle devienne un jour un style pictural caractéristique du Vietnam, à l'instar de l'estampe populaire de Dông Hô, ou de la peinture en laque poncée", souhaite Quy. Et il espère qu'en contemplant ces tableaux, tout le monde pensera d'emblée au Vietnam. C'est pour cette raison que les créations de Vo Quy Quôc sont empreintes d'un parfum et d'une couleur propres au Vietnam.
Nghia Dàn/CVN