Les Européens entre dialogue et fermeté face à la Pologne, divergences sur l'énergie

Les dirigeants européens réunis en sommet ont tendu la main, jeudi soir 21 octobre, la main à la Pologne, en conflit avec Bruxelles sur l'indépendance de la justice et la primauté du droit européen, sans exclure des mesures de rétorsion.

>>Un sommet européen assombri par le conflit ouvert avec la Pologne

Le président du conseil européen Charles Michel en visioconférence avec la chancelière allemande Angela Merkel, la présidente de la Commission Ursula von der Leyen et le président français Emmanuel Macron le 20 octobre, veille du sommet européen.

La crise de l'énergie avait auparavant fait l'objet d'intenses débats pendant quatre heures entre les Vingt-Sept, qui ne sont pas immédiatement parvenus à des conclusions, Prague et Budapest mettant en cause le marché du carbone européen, principal outil climatique de l'UE, dans la flambée des prix. Dans le bras de fer avec Varsovie, les chefs d'État et de gouvernement "se sont prononcés en faveur du dialogue", tout en réaffirmant la possibilité de "recourir aux mécanismes existants prévus par les traités européens et les textes en vigueur", a indiqué une source européenne.

Il peut s'agir du déclenchement d'une nouvelle procédure d'infraction pouvant conduire à la saisine de la justice européenne. L'UE dispose également d'un nouveau mécanisme qui permet de suspendre les versements de fonds européens aux pays où sont constatées des violations de l'État de droit affectant le budget communautaire. Mais les États veulent attendre la décision de la Cour de justice européenne sur le recours en annulation de Varsovie et Budapest pour l'utiliser.

"Nous n'agirons pas sous la pression du chantage (mais) nous sommes prêts au dialogue", avait prévenu le chef du gouvernement polonais Mateusz Morawiecki dans l'après-midi à l'issue d'un entretien avec Emmanuel Macron. Le président français l'avait appelé "à engager un dialogue avec la Commission pour trouver une solution", selon l'Élysée.

Varsovie est en conflit avec Bruxelles depuis plusieurs années à propos des réformes judiciaires engagées par le parti conservateur nationaliste au pouvoir (PiS), accusées de saper l'indépendance des juges.

Les tensions se sont accrues depuis une décision le 7 octobre du Tribunal constitutionnel polonais - proche du PiS et saisi par Mateusz Morawiecki -, qui a décrété certains articles des traités européens incompatibles avec la Constitution nationale. Une décision dénoncée par Bruxelles comme une attaque sans précédent contre la primauté du droit européen et la compétence de la Cour de justice de l'UE.

Litiges en cascade"

Varsovie peut compter sur le soutien de Budapest : "Il y a une chasse aux sorcières en Europe contre la Pologne, les Polonais ont raison", a déclaré à son arrivée le souverainiste Viktor Orban, lui aussi régulièrement épinglé par Bruxelles sur les questions d'État de droit.

Le Premier ministre polonais Mateusz Morawieckidevant le Parlement européen à Strasbourg, le 19 octobre.

À l'opposé, le dirigeant néerlandais Mark Rutte a jugé qu'il fallait "être ferme", jugeant "non négociable" l'indépendance du système judiciaire polonais.

"La Pologne doit prendre très au sérieux les menaces de sanctions financières", a renchéri son homologue autrichien Alexander Schallenberg.

Mais l'Allemagne s'est montrée soucieuse d'éviter une "confrontation" avec Varsovie. "Des litiges en cascade devant la Cour de justice de l'UE ne sont pas une solution en matière d'État de droit", a averti la chancelière Angela Merkel, qui s'est aussi entretenue avec M. Morawiecki. Ce sommet est le dernier d'une centaine pour la dirigeante allemande, sur le départ après 16 ans au pouvoir et qui s'est prêtée à une "photo de famille" avec ses homologues.

La présidente de la Commission Ursula von der Leyen, en tant que gardienne des traités, a promis mardi 19 octobre au Parlement européen de sévir contre la Pologne. Plusieurs capitales jugent inconcevable l'approbation du plan de relance polonais de 36 milliards d'euros, actuellement bloqué par la Commission qui réclame des garanties sur l'indépendance judiciaire.

"Spéculation" ?

Sur l'énergie, le Premier ministre tchèque sortant Andrej Babis a, selon des sources concordantes, empêché momentanément l'adoption de conclusions par les Vingt-Sept sur les remèdes à l'envolée des prix. Il a imputé cette flambée, qui menace de faire dérailler la reprise économique, aux fluctuations du marché du carbone, où les entreprises s'échangent des "droits à polluer" et où le prix du CO2 a plus que doublé en un an pour dépasser le niveau record de 60 euros la tonne.

Dénonçant "la spéculation", de concert avec son homologue polonais, il a réclamé une enquête sur d'éventuelles manipulations de marché. Commission et experts estiment pourtant que seul 1/5e de la hausse des prix de l'électricité est attribuable au marché du carbone.

"Le débat est sensible et complexe : fonctionnement du marché européen de l'électricité (où les prix dépendent du cours du gaz), mix énergétique des différents pays" entre charbon, gaz, nucléaire et renouvelables, a reconnu une source diplomatique française, précisant que le sujet sera à nouveau débattu plus tard dans la soirée.


AFP/VNA/CVN

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