S'il ne fait qu'exhumer des chiffres publiés chaque mois mais passés sous silence par le département du Travail, ce dirigeant, Dennis Lockhart, est le premier membre de la Fed à parler ouvertement du chômage réel, au moins depuis l'automne 2008, qui avait vu les destructions d'emplois s'accélérer à un rythme effréné. "Si l'on prend en compte les gens qui voudraient un emploi mais ont cessé d'en chercher un -les "travailleurs découragés", comme on les appelle- et ceux qui travaillent un nombre d'heures inférieur à ce qu'ils souhaiteraient, le taux de chômage passerait des 9,4% officiels à 16%", a déclaré M. Lockhart lors d'un discours à Chattanooga, dans le Tennessee, au Sud du pays.
Ces 2 catégories de personnes sont recensées chaque mois par le département du Travail, chargé de publier les chiffres officiels du chômage. Mais les "travailleurs découragés" sont exclus de la population active et les personnes contraintes de travailler à temps partiel du fait de la conjoncture économique sont comptabilisées comme des personnes employées, ce qui fait que ni les uns ni les autres n'apparaissent dans le taux de chômage officiel.
Selon les derniers chiffres du ministère, celui-ci était de 9,4% fin juillet. Les États-Unis comptaient alors près de 15,5 millions de chômeurs "officiels", auxquels s'ajoutent environ 9 millions de personnes à temps partiel malgré elles, et près de 800.000 chômeurs "découragés".
On pourrait allonger encore la liste avec quelque 1,5 million de personnes non comptées dans la population active bien que disant vouloir un emploi, mais n'ayant pas pu en chercher un "activement au cours des 4 dernières semaines".
La reconnaissance de l'ampleur réelle du chômage vient rappeler à quel point l'amélioration du marché de l'emploi sera capitale pour l'avenir de l'économie américaine, alors que la Fed a identifié la persistance d'un taux de chômage élevé comme l'un des facteurs risquant de freiner le plus fortement, voire d'enrayer, la reprise fragile attendue désormais d'ici fin septembre.
Dans son discours de Chattanooga, M. Lockhart, qui dirige l'antenne de la Réserve fédérale à Atlanta, en Géorgie, État du Sud du pays durement frappé par la crise, reconnaît que le niveau du chômage est un "défi", mais va jusqu'à parler de "la possibilité d'une reprise sans emplois".
Notant qu'il y a peu de chance de voir l'État fédéral prendre des mesures de relance budgétaire supplémentaires, sa marge de manoeuvre étant pratiquement consumée par la hausse vertigineuse du déficit, il a dit que la détermination affichée par la Banque centrale à maintenir longtemps son taux directeur à quasi-zéro était ce qu'il y a de mieux à faire.
Pour M. Lockhart, qui vote cette année au Comité de politique monétaire de la banque centrale, "cette politique devrait encourager les entreprises à être plus actives et faciliter des embauches supplémentaires". Mais un peu comme il en va de l'oeuf et de la poule, il estime que "le meilleur remède au chômage est le rétablissement d'une économie saine, équilibrée et croissante".
AFP/VNA/CVN